Règles abondantes après un vaccin Covid : grave, que faire si on saigne ?

L'Agence du médicament reconnaît le lien entre la vaccination avec certains vaccins anti Covid et la survenue de troubles menstruels, dont des saignements abondants qui ont nécessité une hospitalisation.

Règles abondantes après un vaccin Covid : grave, que faire si on saigne ?
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En octobre 2022, l'Agence européenne du médicament a reconnu le lien de causalité potentiel entre vaccination anti Covid et troubles menstruels (retard ou absence de règles, saignements menstruels anormalement abondants). En janvier 2024, une étude française menée par Epi-Phare sur 4 610 femmes âgées de 15 à 50 ans a été plus loin et a mis en évidence une augmentation de 20% du risque de saignements menstruels abondants ayant nécessité une prise en charge à l'hôpital dans un délai de 1 à 3 mois suivant la primovaccination par vaccin à ARNm (Comirnaty ou Spikevax) en comparaison avec les femmes non vaccinées. Le nombre estimé de cas de saignements menstruels abondants ayant nécessité une prise en charge à l'hôpital attribuables à la primovaccination entre le 12 mai 2021 et le 31 août 2022 en France était de 103, soit un taux de 8 cas pour 1 000 000 femmes vaccinées sur l'ensemble des 13 millions de femmes de 15 à 50 ans vaccinées au 31 août 2022. En revanche, le risque n'apparaît pas augmenté au-delà de 3 mois après la primo-vaccination, ni après l'administration d'une dose de rappel, rapporte l'ANSM le 24 janvier 2024. Ces troubles menstruels sont ajoutés dans les résumés des caractéristiques du produit (RCP) et les notices des vaccins à ARNm depuis octobre 2022. Les femmes sont normalement informées lors d'une primo-vaccination. 

Symptômes : comment se manifestent ces troubles menstruels ?

Les troubles du cycle (aussi appelés anomalies du cycle) sont des irrégularités du cycle menstruel. Ils peuvent affecter à la fois la fréquence et l'intensité des saignements, rappelle l'ANSM dans son communiqué du 23 juin 2022. Au cours d'une réunion entre des représentants des associations de patients et de professionnels de santé sur les troubles menstruels déclarés après la vaccination, les troubles menstruels les plus fréquemment décrits dans ces témoignages ont été :

  • Des règles irrégulières
  • Des règles douloureuses (dysménorrhée)
  • Des règles trop abondantes ou trop prolongées (ménorragie) ou absentes pendant plusieurs mois (aménorrhée).
  • Des saignements entre deux cycles (métrorragie).
  • Des douleurs pelviennes importantes, ou abdominales
  • Chez les femmes atteintes d'endométriose : une réactivation de leurs symptômes douloureux alors que la maladie était bien contrôlée jusqu'ici ;
  • Chez les femmes ménopausées, des saignements anormaux
  • Dans certains cas, les saignements anormaux en quantité et en durée ont conduit à des hystérectomies.

​​​​​Ces troubles menstruels sont-ils graves ?

L'ANSM indique que les professionnels de santé ont expliqué qu'ils voyaient en pratique peu de cas graves de troubles menstruels et qu'il était difficile de les analyser car ils étaient souvent peu documentés. Dans leur expérience, la majorité des troubles menstruels observés étaient généralement non graves, de courte durée et spontanément résolutifs.

Quelles sont les causes envisagées ?

A ce jour, les données disponibles ne permettent pas de décrire le mécanisme de survenue de ces troubles du cycle menstruel.

Des troubles menstruels sont survenus aussi bien après la première injection qu'après la deuxième ou la dose de rappel. Concernant l'absence de règles, dans ses premières conclusions rendues au mois de juin 2022, le comité de pharmacovigilance (PRAC) de l'EMA a conclu que les preuves étaient insuffisantes pour établir le lien entre les vaccins ARN et les cas d'absence de menstruation. Néanmoins, le comité poursuit la surveillance de cet effet indésirable. Concernant les saignements menstruels abondants, les résultats dévoilés le 24 janvier 2024 fournissent de nouveaux arguments en faveur de l'existence d'un risque augmenté de 20% des saignements menstruels abondants dans les 3 mois suivant la primovaccination contre le Covid-19 par vaccin à ARNm. En revanche, les résultats ne suggèrent pas d'augmentation du risque de saignements menstruels abondants après une dose de rappel. A ce jour, les données disponibles ne permettent pas de décrire le mécanisme de survenue de ces troubles du cycle menstruel. Plusieurs hypothèses sont néanmoins émises :

  • La réactogénicité (fièvre, maux de tête, nausées...) provoquée par la vaccination. Celle-ci pourrait en effet, comme lors d'une infection, influer sur les hormones impliquées dans le cycle menstruel
  • Un stress ou une anxiété importante, engendré par l'acte de vaccination et/ou le contexte de pandémie. En effet, stress et anxiété sont des facteurs connus de perturbation de l'axe hypothalamo-hypophyso-ovarien qui régule le bon déroulement du cycle menstruel
  • Autres facteurs : maladie gynécologique sous-jacente, grossesse, traitement contraceptif...

Que faire et quelle est la conduite à tenir pour les femmes concernées ?

Si vous ressentez des effets inhabituels, des douleurs anormales, que votre cycle menstruel est bouleversé, et que ces troubles persistent, l'ANSM invite ces femmes :

  • à consulter le médecin. Il pourra vous écouter et, si nécessaire, procéder à des examens complémentaires.
  • à déclarer sur le portail du ministère chargé de la Santé : signalement.social-sante.gouv.fr ou rapprochez-vous d'un professionnel de santé.

Depuis juillet 2022, l'ANSM a mis à disposition un guide d'aide à la déclaration. Autrement dit, si vous souhaitez déclarer des troubles menstruels apparus après la vaccination contre le Covid-19, il est nécessaire d'apporter les renseignements les plus détaillés possibles dans le formulaire de déclaration. Ces éléments permettront en effet aux centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) de mener de la façon la plus efficace possible leur évaluation des cas déclarés. Ce document a pour objectif de vous guider dans cette déclaration en précisant les informations à apporter. Ces informations ne sont pas obligatoires, mais seront utiles aux CRPV pour leur analyse.

Quelle est la conduite à tenir pour les professionnels de santé ?

Devant tout symptôme de troubles menstruels évoqué par votre patiente et selon votre connaissance de son historique médical :

► Si la patiente prend un traitement hormonal : vérifiez qu'il n'y a pas eu de mauvaise observance ou des vomissements qui pourraient être à l'origine d'une interruption de la prise du traitement 

► Si la patiente ne prend pas de traitement hormonal ou s'il n'y pas eu d'interruption de traitement :

  • vérifiez qu'il ne s'agit pas d'une symptomatologie aigüe 
  • vérifiez l'absence de grossesse (retard de règles, saignements itératifs)
  • gardez en tête la possibilité que la patiente développe une maladie gynécologique (syndrome des ovaires polykystiques, hyperprolactinémie, adénomyose, etc.) de manière concomitante à la vaccination. Si les symptômes persistent le mois suivant, il est nécessaire de lancer des investigations et d'envisager une telle pathologie sous-jacente.

► Si vous observez des effets indésirables graves ou inattendus : déclarez sur le portail du ministère chargé de la Santé : signalement.social-sante.gouv.fr.

  • Troubles menstruels après la vaccination contre le Covid-19 : état des connaissances et conseils aux femmes concernées, ANSM, 23 juin 2022. 
  • Nouvelles données en faveur d’un risque accru de saignements menstruels abondants après la primovaccination contre le Covid-19 - ANSM - 24 janvier 2024
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