Colostomie : indications, poche, temporaire ou définitive ?
La colostomie est une intervention chirurgicale digestive qui consiste à relier une partie du côlon à la paroi abdominale, grâce à une petite ouverture. Comment se déroule-t-elle ? Quelles sont ses indications ? Ses risques ? Réponses avec le Dr Benjamin Darnis, chirurgien viscéral et digestif au Centre Lyonnais de chirurgie digestive.
Définition : qu'est-ce qu'une colostomie ?
La colostomie correspond à l'abouchement du gros intestin à la peau du ventre. En pratique, quand le chirurgien réalise une colostomie, il crée un passage à travers les muscles de la sangle abdominale et la peau du ventre, et coud le tube digestif à la peau. "Les selles s'évacuent alors à ce niveau dans un dispositif adhésif positionné exprès à ce niveau : une "poche" de colostomie. Cet "anus artificiel" ressemble à un rond de la taille d'une pièce de 2 euros, de la même couleur que la muqueuse de la joue, situé généralement à 5cm à gauche ou à droite du nombril. Les selles sortent une ou plusieurs fois par jour dans la poche, il n'est pas possible de contrôler leur évacuation", explique le Dr Benjamin Darnis.
Quelles sont les indications ?
Une colostomie peut être réalisée dans le cadre d'une opération du côlon ou du rectum, de façon programmée ou en urgence. Les indications les plus fréquentes sont :
- Opération en urgence pour une péritonite par perforation du côlon ou du rectum, quelle que soit la cause (cancer, diverticule, plaie iatrogène, désunion d'une suture après colectomie). "Le chirurgien intervient alors en urgence pour réaliser un lavage de l'abdomen et réaliser une colostomie au niveau de la perforation, de façon à ce que la fuite de selles s'évacue vers l'extérieur", indique le chirurgien digestif et viscéral.
- Opération en urgence pour une occlusion du côlon. "Dans cette pathologie, les matières fécales sont bloquées en amont d'un obstacle dont on ne connait pas précisément la nature lors de la prise en charge, détaille le spécialiste. Le chirurgien réalise alors en urgence une colostomie en amont de l'obstacle pour permettre l'évacuation des selles. Ainsi, le patient est à l'abri des autres complications de l'occlusion (perforation digestive, vomissements, inhalation...), le bilan diagnostique est poursuivi en toute sécurité."
- Opération programmée pour une ablation du côlon ou du rectum avec contre-indication à réaliser un rétablissement de continuité, c'est-à-dire une suture du tube digestif (colo-rectale, colo-colique, colo-anale). "Ces cas sont rares et sont en lien avec la nature de la maladie (cancer de l'anus ou du bas rectum par exemple), d'importants troubles de cicatrisation du patient, ou à une incontinence fécale préexistante", souligne le Dr Benjamin Darnis.
- Opération programmée pour un problème proctologique grave : incontinence fécale invalidante, trouble proctologique chronique (atteinte anale due à la maladie de Crohn, fistule ne cicatrisant pas après de multiples interventions).
Poche de colostomie : comment ça se passe ?
La poche de colostomie est le nom désignant l'appareillage de la stomie, c'est-à-dire le dispositif qui va recueillir les selles. Il s'agit d'un système adhésif placé par le patient ou son infirmière sur le ventre au niveau de la colostomie, pour recueillir les matières fécales et éviter les souillures. "Il existe de nombreux types de poche, de telle façon qu'on trouve toujours un appareillage qui convient au patient. Ces poches sont jetées à la poubelle lorsqu'elles se sont remplies, ce qui arrive en général une à trois fois par jour. Les poches de stomie sont en général opaques, étanches et équipées d'un filtre à charbon évitant les mauvaises odeurs. Lorsque le patient est autonome, le changement du dispositif se fait en totale autonomie. Si il est dépendant, ou ne souhaite pas participer aux soins, une infirmière se charge de l'appareillage tous les jours", rassure le Dr Benjamin Darnis.
Colostomie terminale, temporaire ou définitive ?
En fonction de l'indication opératoire, les caractéristiques de la colostomie sont variables :
- Si le chirurgien pense pouvoir un jour réopérer le patient pour rétablir la continuité digestive, il s'agit d'une colostomie temporaire. Dans le cas contraire, il s'agit d'une colostomie définitive.
- Si le colon est abouché complètement à la peau, il s'agit d'une colostomie terminale. Si l'ouverture du colon vers la peau se situe sur le côté du colon, il s'agit d'une colostomie latérale. Cette dernière est rarement réalisée.
- Deux sites du gros intestin (colon) sont propices à la réalisation d'une colostomie : la partie droite du colon transverse et le colon gauche dans sa portion sigmoïde.
Quels soins après une colostomie ?
"La colostomie n'est ni plus ni moins qu'un anus situé sur le ventre. Tout comme l'anus situé entre les fesses, un lavage quotidien sous la douche est recommandé. Après chaque selle, la poche pleine est jetée et une nouvelle poche est mise en place, poursuit le chirurgien digestif et viscéral. Dans certaines situations, des patients peuvent réaliser un lavement par la colostomie afin de vidanger complètement le colon, de façon à ne pas avoir à vider la poche pendant toute une ou plusieurs journées."
Quels sont les risques d'une colostomie ?
"Le fait d'être porteur d'une colostomie ne présente aucun risque, il est tout à fait possible de réaliser toutes les activités de la vie quotidienne et d'avoir une vie normale tant au niveau personnel que professionnel", rassure le Dr Benjamin Darnis.
Certaines complications locales peuvent survenir et nécessiter une prise en charge parfois chirurgicale :
- L'éventration péristomiale est l'élargissement de l'orifice musculaire au travers duquel passe le colon. Si l'éventration gêne pour l'appareillage, une réparation chirurgicale peut être envisagée.
- Le prolapsus stomial est l'allongement de la portion de muqueuse du colon s'extériorisant à la peau. Si le prolapsus gêne l'appareillage, une exérèse peut être proposée.
- La sténose ou la rétraction de l'orifice stomial peuvent gêner l'évacuation des selles et l'appareillage. Une réfection de la stomie peut alors être proposée.
Merci au Dr Benjamin Darnis, chirurgien viscéral et digestif au Centre Lyonnais de chirurgie digestive.