Polype à l'estomac : cause, symptômes, opération
Le polype à l'estomac est une tumeur habituellement bénigne localisée sur les muqueuses de l'estomac. Il prend la forme d'une petite protubérance et ne s'accompagne la plupart du temps d'aucun symptôme. Toutefois, des douleurs abdominales et des signes digestifs peuvent survenir. Le point avec le Dr Patrick Le Bars.
Définition : c'est quoi un polype à l'estomac ?
Un polype est une excroissance généralement développée aux dépens d'une muqueuse - paroi interne d'une cavité naturelle -, telle que le côlon, le rectum, l'utérus, le vagin, le nez, les sinus, la vessie, l'estomac... "La majorité des polypes à l'estomac (environ 80%) est de nature bénigne, explique le Dr Patrick Le Bars, gastro-entérologue et hépatologue. Le risque de malignité ou d'évolution maligne des polypes gastriques est étroitement dépendant de leur nature et celui-ci est dominé par les adénomes, qui sont associés à un risque important d'adénocarcinome".
On distingue différents types de polypes gastriques :
►Les polypes glandulo-kystiques du fundus (PGK). "Ils représentent entre 70 et 80% des cas. La plupart sont découverts de manière fortuite (ratio femme/homme : 1,5 ; âge moyen : 50 ans) et se développent sur une muqueuse saine au niveau de la partie haute de l'estomac du fundus ou du corps. Ils sont uniques, ou multiples (< 10 à 15), de petite taille (< 1 cm) avec une surface transparente ou lisse et régulière. Ils ont une couleur similaire à celle de la muqueuse avoisinante (mais parfois rosâtre ou framboisée) et ils se détachent facilement à la pince à biopsie". Les PGK sont associés à la prise chronique d'IPP (inhibiteurs de la pompe à protons), médicaments utilisés pour réduire la sécrétion acide gastrique. "Une étude sur 599 patients a montré une augmentation du risque par 4 chez des malades traités par IPP pour une durée supérieure à 5 ans par rapport à une prise plus courte ; la régression de ces lésions lors de l'arrêt de ce traitement semble confirmer cette hypothèse soutient cette association". ils peuvent aussi se développer chez des patients atteints de polypose adénomateuse familiale (PAF).
► Les polypes hyperplasiques. "Ils représentent environ 17 % des polypes découverts lors d'une endoscopie haute selon des études récentes et la majorité d'entre eux surviennent dans les régions géographiques où l'infection par Helicobacter pylori est prévalente. Cette bactérie qui touche 30% de la population attaque les défenses de la muqueuse gastrique". Les polypes hyperplasiques sont souvent de petite taille, sessiles (large base d'implantation), pédiculé (25 %) ou en grappe, de surface régulière et parfois ulcérée. "La plupart ne donne lieu à aucun symptôme ; toutefois ils peuvent être rarement responsables d'hémorragie ; ou en cas de gros polype (parfois 2 à 5 cm), d'une obstruction par enclavement au niveau du pylore, leur localisation préférentielle". L'éradication de H. pylori par traitement antibiotique peut entraîner la disparition d'un polype hyperplasique. Le risque de dégénérescence se situe entre 0,5 et 7 %. "Dans une étude récente de 1 341 polypes hyperplasiques, une dysplasie de bas grade a été constatée dans 5 cas (0,4 %) et aucun cas de dysplasie de haut grade. Ce risque est plus important quand le polype dépasse 2 cm. Cependant, alors que le risque de dégénérescence semble très faible, ces polypes sont associés à une augmentation du risque de cancer sur la muqueuse gastrique sous-jacente ou à des cancers gastriques synchrones". Il est donc légitime d'opérer les polypes hyperplasiques ayant une dysplasie et ceux dépassant 1 à 2 cm. L'exérèse de ces polypes n'annule pas le risque de développement néoplasique sur une muqueuse gastrique atrophique sous-jacente et il est important aussi d'explorer et de biopsier le reste de l'estomac afin de rechercher d'éventuelles lésions dysplasiques ou néoplasiques débutantes.
► Les adénomes, qui restent très rares (1 à 2 % des cas). "Les adénomes gastriques sont des vraies lésions néoplasiques passant par la séquence classique dysplasie – cancer. Leur fréquence est estimée entre 6 et 10 % toutefois, selon des données récentes, ils ne représentent que < 1 % des polypes gastriques découverts de façon fortuite". Ils sont généralement localisés dans la partie basse de l'estomac et sont pour la plupart sessiles avec un aspect en velours et parfois foncés. "Ils sont souvent associés à une muqueuse de gastrite chronique avec métaplasie intestinale". Le risque d'une transformation maligne se situe entre 1 et 10 %. "Le risque de transformation dépend naturellement aussi du grade dysplasique mais dépasse 40 % en cas de polype > 2 cm". Pour les adénomes, quel que soit le degré de dysplasie, il est recommandé d'effectuer une exérèse complète. "La surveillance, impérative après résection d'un adénome, doit être réalisée à 6-12 mois selon le degré de dysplasie et la sûreté de l'exérèse initiale. Elle a comme but de rechercher une éventuelle récidive sur le site de la résection initiale".
► On peut également citer les polypes hamartomateux gastriques comme les polypes juvéniles, les polypes de syndrome de Peutz-Jeghers. "Les polypes juvéniles sont de taille variable et souvent volumineux. Ils touchent le tube digestif et n'évoluent pas en cancer. De son côté, le syndrome de Peutz-Jegers correspond à des polypes parfois volumineux, qui ont un risque de transformation maligne supérieur à 50%".
Quels sont les symptômes d'un polype à l'estomac ?
Les polypes à l'estomac ne s'accompagnent la plupart du temps d'aucun symptôme. "Les polypes gastriques sont découverts de façon fortuite et relèvent de l'endoscopiste", répond le spécialiste. Lorsque les polypes sont nombreux, ils peuvent entrainer des soucis digestifs - nausées, vomissements ou saignements-, accompagnés de douleurs de l'abdomen, ou encore d'une anémie.
Quelles sont les causes d'un polype à l'estomac ?
Certains facteurs sont susceptibles de favoriser l'apparition de polypes à l'estomac :
- L'âge
- La bactérie Helicobacter pylori, qui est aussi une cause fréquente de gastrite.
- La Polypose adénomateuse familiale – un risque héréditaire pour les polypes de l'estomac et le cancer du côlon
- Certains médicaments pour le traitement du reflux œsophagien pathologique, comme l'inhibiteur de la pompe à protons (IPP).
"La forte consommation des inhibiteurs de la pompe à proton joue probablement un rôle dans l'augmentation de nombre de polypes glandulo-kystiques", souligne le Dr Le Bars.
Un polype à l'estomac peut-il évoluer en cancer ?
"Les adénomes sont les polypes les plus rares mais les plus dangereux, car ils présentent un risque important d'adénocarcinome, constate notre interlocuteur. Le risque d'une transformation maligne se situe entre 1 et 10 %. Celui-ci est étroitement lié à la taille et l'aspect histologique". Ils sont souvent associés à une muqueuse de gastrite chronique avec métaplasie intestinale.
Comment pose-t-on le diagnostic d'un polype à l'estomac ?
Selon l'OMS, ils font partie des polypes les plus fréquemment trouvés lors des endoscopies digestives hautes. "Des biopsies gastriques sont le plus souvent réalisées à la recherche d'une infection à Helicobacter pylori, détaille le Dr Le Bars. En cas de présence de la bactérie, cette dernière sera éradiquée par un lourd traitement antibiotique et il faudra impérativement contrôler la disparition de cette bactérie résistante 2 mois après grâce à un test respiratoire". Lors de l'interrogatoire, le médecin cherchera une prise d'inhibiteurs de la pompe à protons au long cours, surtout en cas de polypose glandulokystique. Il cherchera également de manière systématique des arguments pour une cause héréditaire.
Quel est le traitement d'un polype à l'estomac ?
"Tout dépend de la nature du polype, complète le médecin. Pour des polypes glandulo-kystiques, l'arrêt du traitement d'IPP (inhibiteurs de la pompe à protons) peut être proposé. Pour les polypes hyperplasiques, un traitement antibiotique sera mis en place pour éradiquer la bactérie Helicobacter pylori. Enfin, pour les adénomes, présentant un risque de transformation carcinomateuse, ils doivent être réséqués, si possible en endoscopie par polypectomie ou mucosectomie".
Quand opérer un polype à l'estomac ?
"On opère quand on n'a pas le choix, résume le spécialiste. C'est-à-dire lorsqu'il s'agit d'un polype à risque et que l'exérèse endoscopique n'est pas possible. Les adénomes gastriques doivent être réséqués. Le risque d'association à d'autres lésions gastriques étant important, toute la cavité gastrique doit être explorée, en biopsiant toutes les zones anormales. Un suivi endoscopique est recommandé après exérèse endoscopique d'un adénome gastrique, après 6 mois en cas d'exérèse incomplète ou de lésion de haut grade, après un an dans les autres cas".
Merci au Dr Patrick Le Bars, Gastro-entérologue, hépatologue, président médical territoire Paris Ouest Vivalto, CHP Europe à Port Marly (78)