Intolérance alimentaire : symptômes, test, que faire ?
Constipation, douleur abdominale, crampes... Les intolérances alimentaires entraînent de nombreuses difficultés digestives. Elles ont de multiples causes. Quel test pour la diagnostiquer ? Qui consulter ? Peut-on en guérir ?
L'intolérance alimentaire est la plupart du temps liée à une irritation de l'intestin. Elle provoque des inconforts digestifs (douleurs abdominales, ballonnements, diarrhée etc). Si leurs symptômes se ressemblent, les intolérances se distinguent des allergies alimentaires. Comment faire la différence ? Comment diagnostiquer une intolérance alimentaire ? Peut-on en guérir ?
Quelle est la définition d'une intolérance alimentaire ?
Une intolérance est une réaction irritante du système intestinal suite à l'ingestion d'un aliment.
Quelle est la différence entre une intolérance et une allergie alimentaire ?
Une allergie est une réaction du système immunitaire face à un allergène alors que "dans le cas de l'intolérance, il n'y a pas d'activation du système immunitaire" explique le Pr François Mion, gastro-entérologue. "L'allergie provoquera des symptômes de type réactions cutanées, gonflement des muqueuses associé parfois à des signes digestifs. L'intolérance alimentaire se traduit toujours par des symptômes digestifs" poursuit le médecin.
Quels sont les symptômes d'une intolérance alimentaire ?
Une intolérance alimentaire se manifeste principalement par des difficultés digestives : "ballonnements, douleurs abdominales, diarrhée, crampes" énumère Déborah Ohana, diététicienne nutritionniste. "On retrouve aussi parfois de la constipation mais ce signe est moins fréquent" ajoute le Pr Mion. L'intolérance alimentaire peut aussi être responsable d'acné. En cas d'intolérance au lactose, on note des infections associées de la sphère ORL (sinusite fréquente par exemple). "De nos jours, beaucoup de suspicions d'intolérances alimentaires sont confondues avec le syndrome de l'intestin irritable" constate Déborah Ohana.
Quelles sont les intolérances alimentaires les plus courantes ?
Les intolérances les plus fréquentes sont l'intolérance au gluten (céréales comme le blé, le seigle, l'orge, l'épeautre et l'avoine) et l'intolérance au lactose. "Les oeufs font partie des allergies alimentaires les plus courantes mais sont rarement des intolérances" précise la diététicienne nutritionniste.
Quel test faire pour savoir si on a une intolérance alimentaire ?
Oubliez les tests IgG (immunoglobulines) en laboratoire pour dépister une intolérance alimentaire. Pour Déborah Ohana comme pour le Pr François Mion, ces bilans sanguins apparus dans les années 2000 pour soi-disant déceler les aliments non tolérés par l'organisme, n'ont aucun intérêt clinique : "C'est une technique très couteuse (parfois plus de 500 euros, ndlr) et non fiable parce qu'elle n'a pas été validée par un comité scientifique" argue la diététicienne. "Les tests à partir de dosage IGG sanguin traduisent seulement le fait que votre organisme a été en contact avec ces aliments" poursuit le gastro-entérologue. En France, en 2013, le Conseil de l'ordre des médecins a d'ailleurs suspendu un mois un biologiste qui faisait la promotion des tests IgG anti-aliments. Pour diagnostiquer une intolérance :
► Consulter le médecin généraliste (si on passe directement par le gastro-entérologue (hors parcours de soin), le remboursement de la consultation par l'Assurance maladie est moindre)
► Sur avis du médecin, retirer le ou les aliments qui pourraient être responsables de l'intolérance pendant plusieurs jours (durée à fixer avec le médecin) afin de voir si les symptômes s'améliorent.
► Le médecin pourra prescrire une prise de sang pour rechercher une éventuelle mutation génétique responsable de l'intolérance et un test respiratoire selon l'intolérance envisagée.
En cas d'intolérance au lactose par exemple, "le test respiratoire consiste à administrer au sujet une certaine quantité de lactose par voie orale (25 grammes environ de lactose dilué dans de l'eau) puis à prélever régulièrement les gaz expirés. La détection d'hydrogène ou de méthane traduira la fermentation du lactose qui n'a pas été digéré correctement (au contact bactéries intestinales)" développe le Pr Mion.
"Avec la mode du sans gluten, beaucoup de personnes vont retirer le gluten à tort, l'organisme ne saura plus le reconnaitre et elles peuvent devenir réellement intolérantes"
Quelles sont les causes d'une intolérance alimentaire ?
L'intolérance alimentaire résulte d'un déficit enzymatique, c'est-à-dire la présence insuffisante ou l'absence d'une enzyme qui permet la digestion de certains composés. "Dans le cas de l'intolérance au lactose, le sujet présente un déficit de lactase, enzyme de digestion du lactose, au niveau de la muqueuse intestinale. Lors de la consommation de lactose en quantité un peu excessive, celui-ci n'est pas digéré ni absorbé par l'intestin grêle et atteint le gros intestin, le colon, où il sera fermenté par les bactéries coliques (intestinales) et produit des substances qui provoquent les symptômes digestifs" explique le gastro-entérologue. Ce déficit peut être d'origine génétique avec une mutation du gène codant de la lactase mais peut également survenir plus tard. "Cette enzyme de digestion du lactose est relativement développée chez le nourrisson et elle diminue progressivement avec l'âge, chez certaines personnes plus que d'autres" note le Pr Mion. Outre le terrain génétique, il existe d'autres causes d'intolérance alimentaire :
- diversification alimentaire trop tardive lorsqu'on est enfant
- intoxication alimentaire qui provoque une intolérance
- défaillance de la flore digestive, du microbiote intestinale liée à une prise de médicaments (antibiotiques) ou par un régime trop restrictif
"Les intolérances alimentaires sont très présentes chez les patients souffrant d'hypersensibilité intestinale (comme le syndrome de l'intestin irritable)" précise Déborah Ohana. "Avec la mode du sans gluten, beaucoup de personnes vont retirer le gluten à tort, l'organisme ne saura plus le reconnaitre et elles peuvent devenir réellement intolérantes alors qu'à la base il n'y avait pas d'intolérance" souligne la nutritionniste.
Qui consulter en cas d'intolérance alimentaire ?
Il faut d'abord consulter le médecin généraliste afin d'être orienté ensuite vers un gastro-entérologue, dans le cadre du parcours de soin coordonné. Il est aussi possible en parallèle pour avoir plus de conseils nutrition de consulter un diététicien-nutritionniste spécialisé dans les intolérances alimentaires.
Peut-on guérir d'une intolérance alimentaire ? Que faire ?
On ne peut pas guérir d'une intolérance alimentaire. "Il n'existe pas de traitement autre que l'éviction des aliments pour l'intolérance. On adapte son régime alimentaire avec des alternatives" explique la diététicienne-nutritionniste. "Dans les régimes indiqués pour le confort digestif on préconise le régime pauvre en sucres fermentés ciblés ou régime sans "fodmaps" s'accordent les deux experts. "Ces sucres sont contenus notamment dans les oignons, l'ail, les aliments de la famille des choux, les légumineuses, les dérivés du blé (fructane) ou encore les produits laitiers" précise le gastro-entérologue.
Merci à Déborah Ohana, diététicienne nutritionniste et au Pr François Mion, gastro-entérologue et professeur de physiologie.