Quels cancers peut-on avoir longtemps sans le savoir ?

Le cancer englobe un vaste groupe de plus de 100 maladies. Les cellules cancéreuses peuvent apparaitre sur tous les organes ou tissus du corps et se propager à d'autres organes. Plus de 400 000 nouveaux cas de cancers sont détectés chaque année en France, faisant de la prévention et du dépistage précoce de véritables enjeux de santé publique. "Tout cancer au stade débutant, lorsque les premières cellules deviennent autonomes, est absolument indétectable" nous rappelle d'emblée le Dr Jérôme Viguier, oncologue à l'Institut national du cancer. De plus, il existe un facteur pouvant rendre difficile la détection des cancers, et ce pendant très longtemps. Comme nous l'explique l'oncologue, entre le moment de la lésion pré-cancéreuse et le cancer, il se passe souvent plusieurs années, voire une dizaine d'années : "Selon sa localisation, selon les organes autour et selon la façon dont elle se développe, la tumeur peut être plus ou moins parlante." Par exemple :

► le cancer du pancréas : "S'il se développe dans la partie que l'on appelle "queue du pancréas", la tumeur va grossir assez longtemps avant de donner des symptômes. En revanche, si le cancer se développe dans la tête du pancréas (à côté du tube digestif et des voies biliaires), il va rapidement comprimer les organes, ce qui peut provoquer une jaunisse, des douleurs, des troubles digestifs."

► le cancer de la prostate : le plus souvent, il se développe lentement et à un âge avancé. "Si la tumeur est à proximité des voies urinaires, cela peut donner des symptômes très rapidement. Alors que s'il se développe plus en périphérie de la prostate, il peut se développer pendant longtemps avant de donner des symptômes."

► le cancer du sein : "S'il se développe de façon profonde, à la jonction avec la paroi thoracique, les symptômes vont être plutôt tardifs. Mais si ce cancer se développe juste sous la peau à la surface du sein, cela peut rapidement provoquer une rétraction de la peau, un écoulement par le mamelon ou encore l'apparition d'une boule facilement palpable."

► le cancer colorectal : "Une tumeur qui se développe dans la paroi du côlon, plutôt vers l'extérieur, peut ne pas boucher le tube digestif et donc ne pas entrainer des symptômes importants."

Plus rares, les cancers de primitifs inconnus, qui représentent 3 à 5% des cancers, sont aussi particulièrement difficiles à repérer. "Ce sont des cancers dont on ne peut pas déterminer l'origine. Ils ne présentent pas de signes caractéristiques permettant de déterminer leur zone de naissance" poursuit le Dr Viguier. Ils se révèlent souvent par les métastases c'est-à-dire les cellules cancéreuses qui se sont propagées dans le corps sans que la tumeur primitive soit identifiée. Pour les traiter au mieux, il faut essayer d'identifier leur origine. En cancérologie, les traitements sont généralement ciblés selon l'organe qui est à l'origine des cellules cancéreuses. "Cela nécessite donc de faire des examens pour proposer le traitement qui semble le plus adapté, malheureusement ces cancers sont généralement de mauvais pronostic", informe le spécialiste. 

C'est pour cela que des programmes de dépistage sont menés afin d'obtenir un diagnostic avant tout symptôme et de bénéficier de meilleures chances de guérison, de traitements moins lourds et de moins de séquelles si un cancer est détecté. C'est le cas pour les cancers du sein, du cancer du col de l'utérus et du cancer colorectal pour lesquels il existe un dépistage organisé. "Ainsi, on fait une mammographie et un examen clinique pour détecter une tumeur du sein, un test de recherche de sang dans les selles pour chercher un cancer débutant dans le côlon ou le rectum ou encore on recherche la présence de cellules anormales ou de papillomavirus au niveau du col de l'utérus avant qu'il n'évolue en un cancer du col symptomatique."

Parallèlement au dépistage, il existe des symptômes non spécifiques qui peuvent être des signes d'alerte : une douleur inexpliquée qui dure, des troubles digestifs importants et persistants/des saignements digestifs, un amaigrissement inexpliqué en dehors de tout régime, une fatigue chronique inhabituelle, une perte de l'appétit, des problèmes respiratoires (toux persistante inexpliquée, douleurs thoraciques, essoufflement) ou encore des troubles urinaires qui persistent. "Tous ces symptômes ne signifient pas nécessairement la présence d'un cancer. Mais il faut être vigilant s'ils apparaissent et sont persistants, surtout s'ils sont inexpliqués, et consulter un professionnel de santé."