Opération d'une descente d'organe : risques, convalescence, et après ?
Le prolapsus génital, communément appelé "descente d'organe", affecte principalement les femmes après 45 ans. Pour corriger cet affaissement, des opérations par cœlioscopie ou par voie basse existent. Convalescence, suites, risques de saignements ou d'incontinence... Tour des 10 choses à éviter après une opération et conseils du Dr Adrien Vidart, chirurgien urologue.
Le prolapsus correspond au relâchement et à la fragilisation des muscles et des ligaments du plancher pelvien suite à des grossesses répétées, un accouchement difficile, des antécédents de chirurgie pelvienne, un constipation ou une toux chroniques, le port répété de charges lourdes, l'obésité ou la ménopause... Cette distension peut entraîner la descente d'un organe ou d'une partie d'un organe, voire de plusieurs organes pelviens. Cela peut concerner la vessie (on parle de cystocèle), l'utérus (on parle de hystérocèle), le rectum (on parle de rectocèle).
Opération de descente d'organe chez la femme
"Avant d'avoir recours à une chirurgie du prolapsus, il faut évaluer quelle zone on va opérer et bien déterminer la stratégie chirurgicale. Le médecin urologue va également discuter du retentissement du prolapsus chez la patiente. Le type d'opération va être décidée en fonction du type de prolapsus, de l'âge de la patiente, de ses éventuelles pathologies associées (surpoids, diabète, obésité...), de ses éventuels antécédents d'opération et si elle fume", liste le Dr Adrien Vidart, chirurgien urologue à Suresnes.
Il y a deux grands types de chirurgie :
• La chirurgie par cœlioscopie (par voie haute ou abdominale)
On réalise la plupart du temps une promotofixation qui a lieu sous anesthésie générale : "cette technique consiste à venir réparer les ligaments cassés, étirées et abîmés en utilisant un filet qui va servir de tissu de renfort. Ce n'est pas le filet en lui même qui va corriger le relâchement, mais c'est la cicatrisation qui va entraîner la formation d'une fibrose et permettre de rétablir la situation. Il s'agit d'une chirurgie très codifiée qui est réalisée depuis les années 80 en France. Il y a deux façons de la réaliser : soit on introduit une caméra et les instruments chirurgicaux dans le ventre, soit on utilise un robot qui va optimiser la réparation des ligaments", détaille le chirurgien urologue. Cette deuxième technique a l'avantage de limiter le nombre d'incision au niveau du ventre de la patiente.
• La chirurgie par voie vaginale (par voie basse ou naturelle)
"On réalise cette technique lorsque la patiente a déjà été opérée d'une descente d'organe, lorsqu'elle ne peut pas supporter d'avoir des gaz dans le ventre par exemple. Cette chirurgie est plutôt réservée à une patiente plus âgée avec une faible activité physique car les résultats sont moins solides sur le long terme, contrairement à la technique par cœlioscopie", indique notre interlocuteur. L'intervention a lieu sous anesthésie générale ou sous rachianesthésie. Cette chirurgie consiste à renforcer le plancher pelvien et à fixer le fond du vagin sur les ligaments pelviens. "On ne peut désormais plus utiliser de prothèses par les voies naturelles en France. Pour corriger le prolapsus, on doit alors utiliser les ligaments naturels de la patiente en réduisant leur taille car ces ligaments ont été étirés. L'intérêt de cette technique est qu'on ne fait pas d'incision au niveau du ventre de la patiente", explique le chirurgien urologue.
Peu importe l'opération choisie, une consultation médicale est prévue entre 4 à 6 semaines après l'acte chirurgical. Elle sert à évaluer le résultat de l'intervention et à planifier le suivi de la patiente. Ce suivi est primordial pour surveiller l'absence de récidive du prolapsus, évaluer les fonctions urinaire et sexuelle de la patiente et prendre en charge rapidement d'éventuels effets secondaires (constipation, incontinence...).
Sexualité, sport, toilette... 10 choses à pas faire après une opération de prolapsus
La durée de la convalescence et la date de reprise du travail ou d'une activité physique normale dépendent du type d'opération effectué et de l'état physique de la patiente. Une discussion avec le médecin urologue est nécessaire avant de reprendre sa vie normale. Par ailleurs, après une opération du prolapsus, il est recommandé de :
- Ne pas fumer pendant au moins un mois après l'opération : "le tabac et notamment l'apport en nicotine, altère la vascularisation des tissus et donc la cicatrisation. Le vapotage est à bannir également car le e-liquides contiennent aussi de la nicotine. De plus, le fait de fumer peut provoquer une toux chronique qui appuie encore plus sur les sutures et qui peut retarder la cicatrisation", prévient le Dr Adrien Vidart.
- Ne pas pratiquer d'activité sportive entre 1 à 3 mois après l'opération. Cette durée varie en fonction de la patiente et de sa cicatrisation. "Les chirurgies du prolapsus étant peu douloureuses et rapidement efficaces, la patiente a tendance à vouloir rapidement retrouver une activité physique. Or, il faut tout de même éviter de faire d'importants efforts comme des grandes marches , les sports à impact comme la course à pied ou la danse ou de porter des charges lourdes (+ de 5 kg)", précise le spécialiste. De même, on évite de faire de vélo ou de moto pendant un mois : les impacts risquent d'appuyer sur les points de suture et d'empêcher la cicatrisation.
- Ne pas être sédentaire : "il faut continuer ses activités du quotidien pour favoriser la cicatrisation", recommande l'expert. De plus, la sédentarité ou l'alitement augmente le risque de phlébite. Il est donc conseillé de : contracter fréquemment ses mollets, faire régulièrement des mouvements de pied, surélever ses jambes la nuit ou porter des bas de contention s'il y a eu une prescription médicale.
- Négliger les éventuels problèmes de constipation. "Tous les efforts de poussée pour aller à la selle augmentent la pression sur le périnée et peuvent tirer sur les sutures : il y a donc un risque de récidive. Le médecin peut alors prescrire un traitement facilitateur du transit, à prendre pendant plusieurs semaines après l'opération", indique-t-il
- Ne pas avoir une alimentation pauvre en fibres : les fibres alimentaires stimulent le transit et augmentent le volume des selles. On les trouve principalement dans les légumes (courgettes, poireaux, épinard...), les fruits secs (pruneaux, noix, figues séchées, abricots secs...), les céréales complètes, les légumes secs (haricots blancs ou rouges, pois chiches...), les agrumes...
- Ne pas prendre de bain pendant au moins 15 jours après l'opération pour éviter "la macération" d'eau savonneuse au niveau de la cicatrice. Au contraire, on va demander à la patiente de privilégier les douches.
- Ne pas avoir de rapports sexuels avec pénétration pendant au moins un mois afin d'éviter de solliciter les cicatrices du vagin.
- Ne pas utiliser de tampons pendant les règles pendant au moins 6 semaines : pour éviter la stagnation du sang dans le vagin qui risquerait d'altérer la cicatrisation, il vaut mieux préférer les serviettes hygiéniques.
- Ne pas faire de toilettes vaginales excessives qui peuvent perturber la flore vaginale et favoriser les infections. Il est conseillé de laver la vulve (petites et grandes lèvres) et l'entrée du vagin une fois par jour avec un savon doux au pH neutre et non parfumé. On conseille de sécher les incisions cutanées en tamponnant délicatement une serviette propre afin d'éviter toute macération. il est déconseillé de savonner l'intérieur du vagin et de prendre des douches vaginales qui détruisent la flore et favorisent la survenue de mycoses vaginales.
- Eviter de voyager pendant le premier mois après l'opération : "on conseille à la patiente de rester à proximité du chirurgien urologue en cas de complication éventuelles", indique le chirurgien. Sauf avis contraire du médecin, les voyages sont possibles à partir du deuxième mois post opératoire.
Risques post-opératoires : phlébite, saignements, incontinence...
Même si elles sont faibles, les complications post-opératoires sont les mêmes que pour tout type de chirurgie du périnée. Il s'agit principalement d'un risque de phlébite ou de saignement après l'opération. "Une patiente opérée qui ressent des douleurs dans le mollet, des douleurs thoraciques, des sueurs, des palpitations ou des essoufflements doit consulter son médecin en urgence", insiste le Dr Vidart. Le médecin urologue peut envisager l'administration d'un traitement anticoagulant ou le port de bas de contention. La patiente opérée (à qui on a pu mettre une sonde urinaire pendant l'opération) peut avoir des petites fuites les 24 à 48 heures qui suivent l'opération. En revanche, elle n'a normalement pas de difficultés à uriner. Une patiente qui a toujours des fuites après 48 heures et qui éprouve des difficultés à uriner (brûlures) doit consulter son urologue.
Cicatrisation : au bout de combien de temps ?
- Lors d'une opération par voie cœlioscopique, la cicatrisation sur la peau (cicatrisation externe) se fait au bout d'une dizaine de jours.
- Lors d'une opération par voie vaginale, la cicatrisation au niveau de la muqueuse du vagin se fait au bout de 3 semaines.
- Quelque soit le type d'opération, il faut environ deux mois pour que la cicatrisation interne soit complète.
Enfin, si la cicatrice devient douloureuse ou s'il se produit un écoulement anormal, il est important de montrer cette cicatrice au chirurgien urologue car il peut s'agir d'un hématome ou d'un abcès.
Des risques de récidive ?
Globalement, les résultats avec la chirurgie de prolapsus sont satisfaisants. En France, dans 85% des cas, le prolapsus est correctement corrigé lors d'une promotofixation. En revanche, les taux de récidive dans les deux à trois ans qui suivent sont légèrement plus importants pour la chirurgie par voie vaginale. "Comme pour toute chirurgie, il y a des risques de récidive : soit l'organe qui a été opéré rechute au bout d'un certain temps, soit la descente d'un autre organe peut survenir. La prévention n'est pas recommandée : autrement dit, il ne sert à rien de remonter les trois organes à titre préventif s'il n'y a qu'un seul organe qui chute. On traite au coup par coup les problèmes et on n'anticipe pas une éventuelle future descente d'organe", conclut l'expert.
Merci au Dr Adrien Vidart, chirurgien urologue à Suresnes.