Chirurgie ambulatoire : organisation, durée, quels avantages ?
En France, plus de 5 opérations sur 10 sont réalisées en ambulatoire. Lesquelles ? Comment ça se passe ? Quelle durée maximum à l'hôpital ? Quel remboursement ? Le point avec nos experts.
L'ambulatoire est un mode de prise en charge chirurgicale, qui permet au patient de séjourner à l'hôpital pour une intervention pendant une durée de moins de 12 heures, sans hébergement de nuit. Ce mode de prise en charge permet aux patients de rester à l'hôpital le minimum de temps nécessaire, un bénéfice pour les patients qui sont à leur domicile plus tôt et qui sont moins exposés aux risques infectieux et thromboemboliques. Aujourd'hui, en France, plus de 5 opérations sur 10 sont réalisées en ambulatoire.
Définition : c'est quoi la chirurgie en ambulatoire ?
La chirurgie ambulatoire désigne le fait de réduire le temps d'hospitalisation suite à une intervention chirurgicale à une seule journée, moins de 12 heures donc. Il n'y a pas d'hébergement la nuit. "Le patient entre le matin pour être opérer le jour même et ressortir le même jour sans passer la nuit à l'hôpital. La durée de séjour à l'hôpital est réduite de quelques heures", explique le Pr Corinne Vons, chirurgien à l'hôpital Avicenne (Bobigny) et présidente de l'Association française de chirurgie ambulatoire. La chirurgie ambulatoire est donc une chirurgie programmée et réalisée dans les conditions techniques nécessitant impérativement la sécurité d'un bloc opératoire, sous une anesthésie de mode variable, suivie d'une surveillance postopératoire permettant, sans risque majoré, la sortie du patient le jour même de son intervention.
Qu'est-ce que l'ambulatoire long ?
Selon la spécificité des opérations ambulatoires, les unités de chirurgie ambulatoire sont organisées en fonction de l'intervention et de la récupération du patient : "On individualise la prise en charge des patients : l'intervention d'une cataracte dure 10 minutes, alors que pour une vésicule ou une hernie inguinale cela durera 1 à 2 heures. On évaluera la sortie des patients en fonction du score de Chung (qui doit être > 9/10)", souligne le Pr Vons.
Quels sont les avantages de l'opération en ambulatoire ?
L'ambulatoire permet de réaliser des bénéfices tant pour les patients que pour les équipes hospitalières. En effet, pour les patients, la chirurgie ambulatoire permet une prise en charge rapide (on peut dormir dans son lit le soir), elle réduit les risques d'infections liés aux soins (infections nosocomiales par exemple), et la perte de repères pour les personnes âgées notamment. Une continuité des soins systématique du patient est réalisée par l'unité de chirurgie ambulatoire après le retour à domicile. Ainsi, les équipes hospitalières optimisent les temps d'utilisation des infrastructures et des blocs, et développent de nouvelles pratiques de prise en charge. "On a suffisamment progresser en qualité et en sécurité pour pouvoir réaliser une grande majorité de la chirurgie en ambulatoire", précise le Pr Vons. L'ambulatoire est aussi un bon moyen de dédramatiser l'intervention : l'idée d'être de retour le soir même parmi ses proches est rassurante.
Quelle est la durée d'hospitalisation en ambulatoire ?
Par définition, l'hospitalisation ambulatoire est une hospitalisation de moins de 12h, donc sans nuit sur place. "Le patient rentre le matin dans le service et ressort après un temps variable de surveillance selon l'acte chirurgical et l'anesthésie associée, après accord du chirurgien et de l'anesthésiste. La chirurgie ambulatoire se doit de proposer une prise en charge avec le même degré de sécurité que la chirurgie conventionnelle en permettant une reprise de l'autonomie et un retour à domicile plus rapide (diminution certes du coût pour la société mais surtout amélioration du service rendu au patient : retour dans son lit le soir/calme/moins de risque de complications d'hospitalisation : nosocomialité, perte d'autonomie chez le sujet âgé…)" explique le Dr Sylvie Leblé, chef du service ORL et chirurgie ambulatoire au Centre Hospitalier de Saint-Brieuc.
Quelles sont les opérations réalisées en ambulatoire ?
De nombreuses interventions chirurgicales peuvent être effectuées en ambulatoire, même les plus lourdes, les plus complexes, comme la pose de prothèse totale de hanche, de genou et d'épaule par exemple. "De plus en plus d'opérations sont proposées en ambulatoire grâce à l'évolution des pratiques : 5 millions d'interventions par an. De nouvelles interventions sont éligibles à l'ambulatoire comme la chirurgie de l'obésité, les thyroïdectomies" commente le Dr Vons.
La décision dépend de nombreux facteurs parmi lesquels rentrent en compte le type de l'intervention, les antécédents médicaux du patient et son statut social. Par exemple :
- Chirurgie ophtalmique (cataracte…)
- Chirurgie orale (extractions dentaires multiples, dents de sagesse…)
- Chirurgie orthopédique et traumatologique (ostéosynthèse puis ablation de matériel à distance, canal carpien, arthroscopie genou/épaule…)
- Chirurgie vasculaire (varices, dilatation artérielles…)
- Chirurgie ORL (végétations, pose de drain, certaines amygdalectomies, chirurgie de l'oreille moyenne/sinus, endoscopie…)
- Chirurgie viscérale (hernies, cholécystectomie, colon sous cœlioscopie…)
- Chirurgie urologique
- Chirurgie pédiatrique viscérale et orthopédique
- Chirurgie gynécologique (endoscopie, exérèse sous cœlioscopie, curetage, IVG, prolapsus…) et sénologique (mastectomie)
- Actes anesthésiques et traitement de la douleur (pose de chambre implantable…)
Que faut-il emmener pour une hospitalisation ambulatoire ?
Pour préparer au mieux votre intervention, l'Association française de chirurgie ambulatoire recommande :
- d'amener le jour des consultations de chirurgie ou d'anesthésie un dossier médical complet avec une ordonnance récente de traitement ;
- de bien lire au préalable les consignes données ;
- de passer à la pharmacie chercher les médicaments qui vous ont été prescrits pour le retour à domicile ;
- de préparer des glaçons au congélateur si un refroidissement de la zone opératoire est conseillé ;
- de prévoir à l'avance repas légers et provisions pour les premiers jours suivant l'intervention.
Le jour de l'intervention, un vestiaire personnel est mis à disposition afin d'y laisser lunettes, dentier ou appareils auditifs. Les objets de valeur sont à éviter. "Il faut anticiper l'accompagnant à domicile et le mode de transport car il est interdit de conduire à la sortie (un transport VSL est autorisé si besoin), consigné dans le dossier", note le Dr Leblé.
Comment se passe une opération en ambulatoire ?
La prise en charge le Jour J ne diffère pas de la chirurgie conventionnelle en dehors d'un lieu d'accueil dédié avec des professionnels habitués à l'ambulatoire. "Les traitements médicamenteux (anesthésie, traitement post-opératoires…) sont par contre adaptés pour une récupération de l'autonomie la plus rapide possible (sortie possible après obtention de critères spécifiques : capacité de marche/alimentation orale et reprise diurèse)" ajoute la spécialiste. La prise en charge se fait en 4 phases :
► l'évaluation préopératoire, au cours de laquelle la décision de réaliser la chirurgie en ambulatoire est prise sur la base du triptyque patient-acte-structure. Il s'agit d'évaluer le rapport bénéfice/risque, d'anticiper les effets secondaires prévisibles et de préparer la sortie du patient ;
► la phase opératoire en elle-même ne présente pas de spécificité ;
► la phase d'autorisation de sortie repose sur une évaluation médicale (score de sortie) à l'issue de laquelle un bulletin de sortie est remis, ainsi qu'une fiche de liaison. Celle-ci précise les conduites à tenir en matière de surveillance postopératoire, les coordonnées de l'unité de l'établissement de santé assurant la permanence et la continuité des soins, et son numéro à joindre en cas de problème. "Le patient est préparé, interrogé et informé sur le geste opératoire, les risques, les suites habituelles qui pourraient sembler alarmantes et la gestion de la douleur. Les signes d'alerte sont expliqués et la conduite à tenir au cas où ils surviendraient à suivre. Selon les établissements, des documents papier et vidéo peuvent être fournis au patient. Une consultation préopératoire (4e étape, ndlr) est souvent réalisée pour des interventions complexes par une infirmière, qui pourra également se rendre disponible par téléphone en cas de doutes après le retour au domicile" détaille le Dr Vons.
Comment faire si on n'a pas d'accompagnant ?
Le pourcentage de personnes vivant seules en France était de 14% en 2014. Le recours à la famille ou à des amis pour s'organiser pour la première nuit post-opératoire n'est pas encore vraiment rentrée dans les mœurs pour les interventions non urgentes. Pour le moment, les recommandations des sociétés savantes françaises restent assez vagues sur la possibilité de rester seul à domicile à J0 après une chirurgie ambulatoire. Les conditions de prise en charge socio-sanitaires mais aussi les problématiques géographiques d'accès aux soins sont également différentes. "Dans de nombreux pays, cette problématique de l'isolement (social et/ou géographique) a été résolu par l'installation d'hôtels médicaux pour assurer l'entourage à J0 mais parfois pour plus longtemps en cas d'isolement géographique associé et s'il y a des RDV postopératoires afin d'éviter des transports itératifs longs. Le coût hôtelier et présentiel d'un personnel non médical étant forcément moindre pour le patient et la société, avec souvent malgré tout une prise en charge par les structures sanitaires ou les mutuelles" commente le Dr Sylvie Leblé. Et de préciser : "Une autre possibilité pourrait être d'assouplir cette règle de présence à J0 au domicile dans la limite de patients parfaitement autonomes physiquement et psychologiquement, et bien sûr pour des chirurgies n'amputant pas leur capacité d'auto-surveillance et d'alerte en cas de problème lors de la première nuit post-opératoire."
Quel remboursement en ambulatoire ?
Les interventions en ambulatoire sont remboursées comme de l'hospitalisation avec nuitée (à 80 % par l'Assurance maladie, sauf si le patient est pris en charge à 100 % par exemple du fait d'une affection de longue durée (ALD).
Merci au Pr Corinne VONS, chirurgienne au service de chirurgie générale, digestive et cancérologique, bariatrique et métabolique, de l'hôpital Avicenne (AP-HP) de Bobigny et présidente de l'Association Française de Chirurgie Ambulatoire (AFCA) et au Dr Sylvie Leblé, chef du service ORL et chirurgie ambulatoire au Centre Hospitalier de Saint-Brieuc.