Abcès fessier (anal) : symptômes, cause, opération

Les abcès de la marge anale sont une pathologie proctologique fréquente. Ils surviennent généralement en cas d'infection d'une glande à l'intérieur du canal anal. Découverte avec les Dr Isabelle Etienney, proctologue et Alexandre Mensier, chirurgien digestif et viscéral.

Abcès fessier (anal) : symptômes, cause, opération
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Définition : c'est quoi un abcès fessier ? 

"Le terme approprié est abcès anal, qui est une pathologie de la marge anale, précise le Dr Isabelle Etienney, proctologue. Il s'agit d'une cavité remplie de pus, située à proximité de l'anus ou du rectum. Dans la plupart des cas (8 sur 10), elle est la conséquence de l'infection d'une glande normalement présente à l'intérieur de l'anus. Cette infection crée un trajet appelé "fistule anale" progressant à travers le sphincter entre cette glande et la peau située autour de l'anus ou de la fesse. Cette communication entre ces deux points ne devrait pas exister". Les causes des abcès anaux demeurent incertaines et ceux-ci peuvent avoir lieu chez l'homme comme chez la femme. En l'absence de traitement, le patient risque une aggravation majeure, des récidives voire une gangrène périnéale (gangrène de Fournier). "Il faut bien distinguer l'abcès ou la fistule anale des autres abcès du périnée ("maladie de Verneuil" et "sinus pilonidal"), dont le traitement chirurgical peut être différent. De même, l'évolution d'un abcès anal survenant dans un contexte de maladie de Crohn périnéale est souvent plus complexe".

Quels sont les symptômes d'un abcès fessier ? 

"Les symptômes d'un abcès anal sont une douleur intense souvent continue dans la région anale, associée à d'un gonflement inflammatoire volontiers rouge autour de l'anus, très douloureux, parfois accompagnés de fièvre, détaille le médecin. La douleur peut être insomniante et invalidante. Le patient peut également ressentir des démangeaisons et des frissons". Les abcès sont une forme aiguë de la fistule anale. "Les fistules anales chroniques correspondent à un écoulement dans la région anale, souvent purulent, poursuit le Dr Alexandre Mensier, chirurgien digestif et viscéral. Habituellement les fistules ne sont pas douloureuses, et la douleur annonce la formation d'un abcès, qui peut soit s'évacuer spontanément (avec disparition de la douleur mais persistance de l'écoulement), soit nécessiter une prise en charge chirurgicale". Le diagnostic est souvent clinique, parfois un simple bouton qui suppure au long cours et situé au bord de la marge anale. "Une IRM ano-périnéale peut être proposée afin de caractériser au mieux la fistule et son trajet".

Quelles sont les causes d'un abcès fessier ? 

"Les abcès de la marge anale résultent dans la grande majorité des cas de l'infection d'une glande à l'intérieur du canal anal entrainant un abcès au contact qui s'extériorise donc au niveau de la fesse, répond le Dr Mensier. Il s'agit de la manifestation aiguë de la fistule anale". On parle alors de fistule glandulo-cryptique. "Les fistules anales chroniques correspondent à la communication du tube digestif (canal anal ou bas rectum) avec la fesse, le plus souvent au travers des muscles qui assurent la continence anale (le sphincter anal)".

L'abcès anal n'est jamais un signe de cancer.

Est-ce un signe de cancer ? 

"L'abcès anal n'est jamais un signe de cancer, mais il nécessite dès les premiers symptômes une consultation rapide chez un spécialiste", assure notre interlocutrice.

Qui consulter pour un abcès fessier ? 

"Il est nécessaire de consulter son médecin traitant en cas de douleur anale ou d'écoulement persistant afin d'obtenir un traitement adéquat, répond le Dr Etienney. Le généraliste pourra ensuite orienter son patient vers un spécialiste : un proctologue, un gastro-entérologue ou un chirurgien digestif".

Quel traitement pour soigner un abcès fessier ? 

Ces abcès peuvent parfois s'évacuer spontanément, ce qui diminue les douleurs ressenties par le patient. Cependant, au vu de la probabilité importante de récidives, l'intervention chirurgicale est recommandée. "En effet, la prise d'antibiotiques seuls ne pourra guérir ce type de pathologie", poursuit la proctologue. "Ils sont parfois utilisés pour encadrer le geste chirurgical, afin de prévenir une dissémination de l'infection, en particulier chez des patients diabétiques ou immunodéprimés". Le recours aux anti-inflammatoires non stéroïdiens est dangereux car ils risquent de favoriser la dissémination de la suppuration avec un effet anti-douleur faussement rassurant. Les abcès requièrent un traitement urgent, afin de soulager le patient et d'éviter une propagation de l'infection. "Ce traitement ne peut être que chirurgical, soit au cabinet sous anesthésie locale (et on réalisera alors une simple incision de l'abcès afin d'évacuer le pus sous tension, responsable de la douleur), soit le plus souvent sous anesthésie générale pour rechercher le trajet fistuleux", reconnait le chirurgien.

Quand opérer un abcès fessier ? 

"Dans plus de 70% des cas, les abcès anaux ont une fistule sous-jacente qui nécessitera une intervention afin d'éviter une récidive, complète le Dr Etienney. Souvent une IRM de la région anopérinéale ou une écho endo-annale est demandée par le chirurgien avant l'opération pour visualiser le trajet de la fistule et ses rapports avec le sphincter anal". "Lors de cette intervention, qui se déroule cette fois-ci sous anesthésie générale, en plus d'évacuer l'abcès, on recherchera minutieusement une communication avec le tube digestif (canal anal ou bas rectum), qui correspond donc au trajet fistuleux, reprend le chirurgien. Si celle-ci est mise en évidence, suivant la localisation exacte, on réalisera soit une incision simple du trajet, soit, le plus souvent, on mettra en place un élastique (aussi appelé séton), ayant pour but de drainer correctement la fistule et de laisser le trajet s'organiser afin de permettre un second traitement à froid)". Dans le cas des fistules chroniques, le traitement est toujours chirurgical. "Le premier temps chirurgical consiste à repérer le trajet de cette fistule : fistule simple (trajet direct) ou complexe (trajet ramifié), et sa localisation par rapport au sphincter. Le traitement dépendra alors de ces constatations".

Une reprise de l'activité professionnelle et sportive est possible dans les jours suivant la chirurgie

Les fistules simples, de localisation basse sont traitées par une incision simple du trajet fistuleux, puis on laisse cicatriser la plaie. Il s'agit alors de la technique de mise à plat. "Les fistules complexes seront traitées en deux temps opératoires séparés : dans un premier temps on repère le trajet et on met en place un élastique (ou séton) sans tension afin de drainer, d'organiser et de simplifier le trajet". Cet élastique est laissé en place le temps que les tissus cicatrisent autour, soit en général 2 à 3 mois. Le deuxième temps : soit une section simple (technique de mise à plat) grâce à l'abaissement de la fistule à l'aide de l'élastique. "C'est la technique la plus simple mais elle expose à un risque de troubles de la continence et ne doit être réalisée qu'après une réévaluation stricte. L'autre option est constituée des techniques d'épargne sphinctérienne, soit avec mise en place de colle biologique dans l'orifice fistuleux, soit par la réalisation de techniques plus complexes qui vous seront détaillées par votre chirurgien. L'avantage de ces techniques est qu'elles exposent à peu de risques de troubles de la continence. En revanche, elles sont moins efficaces que la mise à plat simple, et exposent donc à un risque de récidive". En cas de mise en place d'un séton (élastique), aucun soin particulier n'est nécessaire et une reprise de l'activité professionnelle et sportive est possible dans les jours suivant la chirurgie. "En cas d'évacuation d'un abcès de la marge anale, la mise en place de mèches (l'équivalent de compresses) peut parfois être nécessaire et nécessite alors des soins infirmiers jusqu'à cicatrisation". Les traitements ne requièrent en général qu'une hospitalisation en chirurgie ambulatoire (entrée et sortie le même jour). "En revanche, en cas de prise en charge chirurgicale urgente d'un abcès de la marge anale, une hospitalisation d'une nuit peut être nécessaire en fonction de l'heure à laquelle a été réalisée l'intervention".

Merci au Dr Isabelle Etienney, Cheffe de service de proctologie du groupe hospitalier Diaconesses Croix Saint Simon à Paris et au Dr Alexandre Mensier, chirurgien digestif et viscéral à la clinique Anne d'Artois (Vivalto Santé) de Béthune (62).

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