Récidive du cancer du sein : l'éviter, combien de temps après ?

60 000 femmes sont touchées par le cancer du sein chaque année en France. 15 à 20% de ces cancers récidiveront 10 ans après le premier diagnostic. Peut-on prévenir la rechute ? Comment ? Quels cancers du sein récidivent le plus ?

Récidive du cancer du sein : l'éviter, combien de temps après ?
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Le cancer du sein touche près de 60 000 femmes chaque année en France. Comme tous cancers, il peut récidiver. "On estime le risque de rechute de 0,5 à 1% par an, toute la vie" indique le Dr Paul Cottu, chef adjoint du département d'oncologie médicale de l'Institut Curie. Qu'appelle-t-on une "rechute" ? Certains cancers du sein rechutent-ils davantage ? Peut-on prévenir ces rechutes ? Comment ? Conseils d'experts.

Qu'appelle-t-on rechute ou récidive d'un cancer ?

La récidive ou rechute d'un cancer est définie par la réapparition de cellules cancéreuses, au même endroit ou dans une autre région du corps (organe ou tissu). Quand le cancer récidive au niveau du sein lui-même (dans le cas du cancer du sein) on parle de récidive "locale" ou "localisée". Quand il récidive à distance, on parle de cancer "métastatique""Une récidive peut survenir très tôt après la fin des traitements, mais aussi après une longue période de rémission" rappelle l'Institut national du cancer (Inca). Le risque de rechute et la sévérité de celle-ci dépend notamment de la taille de la tumeur initiale, de l'atteinte des ganglions et des traitements.

Combien de cancers du sein rechutent ?

Il n'existe pas de registre en France recensant les rechutes des cancers du sein. Les chiffres sont donc estimatifs : "15 à 20% des cancers du sein récidivent 10 ans après le premier diagnostic" indique le Dr Cottu.

"Pourquoi la cellule s'endort, pourquoi elle se réveille et comment, reste encore mystérieux"

Combien de temps après le premier diagnostic ?

"Le risque de rechute est linéaire au cours de la vie, de 0,5% à 1% par an" répond d'emblée l'oncologue. Néanmoins "il y a un risque plus fréquent de récidives les deux à trois premières années".  

Quels cancers du sein récidivent le plus ?

Ce sont les cancers du sein triple négatifs qui sont les plus à risque de récidive, avec approximativement 20 à 30% de rechute. Le cancer du sein triple négatif est caractérisé par l'absence d'expression des récepteurs hormonaux aux œstrogènes et à la progestérone et l'absence de surexpression du facteur de croissance HER2. Ce n'est donc pas un cancer hormonodépendant comme 70% des cancers du sein ni un cancer avec une surexpression du gène HER2.

Peut-on guérir d'une récidive du cancer du sein ?

"Une rechute ça se soigne toujours mais ça se guérit rarement" estime le Dr Cottu. Du moins "pas encore" ajoute le Pr Alain Puisieux, directeur du Centre de recherche de l'Institut Curie. "Il y a 10 ans, pour certains cancers, on n'avait pas de traitements efficaces en terme de guérison alors que maintenant on les prend en charge de façon bien plus efficace. On fait de la recherche pour mieux faire aujourd'hui." Il faut par ailleurs avoir en tête que "métastases ne veut pas dire mort dans l'après-midi, souligne à juste titre le Dr Cottu. Des patientes peuvent vivre 20 ans avec leur métastases et décédées d'autres causes que leurs cancers".

"La partie se gagne au début. Faites les traitements."

Comment prévenir une récidive du cancer du sein ?

"La partie se gagne au début, répond d'emblée le Dr Cottu. C'est-à-dire par le dépistage précoce et les traitements. Faites ces traitements, c'est très important. On ne prescrit jamais, jamais à la légère et leurs bénéfices sont avérés." Une bonne hygiène de vie est aussi (comme toujours en santé) fortement recommandée. Avoir une alimentation saine et équilibrée, préserver son sommeil et bouger. "L'activité physique a effectivement montré un petit effet sur la réduction du risque de rechute du cancer du sein" confirme le médecin. Et si la rechute survient malgré cela "vous serez en meilleure santé pour l'affronter" argue-t-il.

Les femmes de 50 à 74 ans sont invitées tous les 2 ans au dépistage organisé du cancer du sein, même sans symptômes et facteurs de risque. Ce dépistage comprend la réalisation d'une mammographie et est entièrement pris en charge par l'Assurance maladie.

Du côté de la recherche, les scientifiques planchent sur l'étude des cellules quiescentes dites aussi "en dormance". Leur détection est un enjeu important dans la lutte contre les récidives. "Ce sont par exemple des cellules qui se réveillent 20 ans plus tard sans que l'on sache pourquoi, explique le Dr Cottu. La dormance va de pair avec la dissémination de la cellule. Il faudrait pouvoir évaluer au moment du diagnostic s'il y a déjà des cellules disséminées en dormance mais on ne sait pas encore les déceler" poursuit-il. "On ne comprend pas bien ce phénomène de dormance. Pourquoi la cellule s'endort, pourquoi elle se réveille et comment, reste mystérieux" témoigne le Pr Puisieux. Les chercheurs travaillent ainsi à une meilleure connaissance de ces cellules et à leur détection avant qu'elles ne se réveillent. "Nous espérons parvenir à mieux voir ces cellules avec de nouveaux outils (intelligence artificielle par exemple) pour mieux définir le pronostic de la maladie" conclut le Dr Anne Vincent-Salomon, pathologiste à l'Institut Curie.

Source : Conférence de presse de l'Institut Curie "20 000 femmes rechutent encore chaque année d'un cancer du sein", 22 septembre 2022.