Saignement hors règles : abondant, causes, que faire ?
Les métrorragies ou saignements en dehors des règles peuvent être liés à différentes pathologies et différer selon l'âge de la femme, si elle est enceinte ou non. Ménopause, stress, fibrome... Tout savoir avec le Pr Hervé Fernandez, chef du service de gynécologie-obstétrique au CHU Bicêtre.
Définition : qu'est-ce qu'une métrorragie ?
"Une métrorragie se définit comme des saignements, de faible à forte abondance, en dehors des règles pour une femme avant la ménopause ou chez une femme ménopausée qui normalement n'a plus de saignements d'origine utérine", indique le Pr Hervé Fernandez, chef du service de gynécologie-obstétrique au CHU Bicêtre. "De plus en plus souvent, on ne fait pas la différence entre les femmes ménopausées prenant un traitement hormonal substitutif (THS) et les autres. Si le THS est pris en continu, les femmes ne présentent pas de saignements normalement" souligne-t-il. "Lorsque des saignements surviennent pendant la grossesse, on parle de métrorragies de grossesse", précise le gynécologue-obstétricien.
Quels sont les symptômes ?
"Le sang des métrorragies peut se présenter sous diverses apparences : rouge vif, marron, noir... Cela peut s'apparenter à du spotting (saignements peu abondants) ou à des règles", décrit le Pr Fernandez. Par ailleurs, le saignement peut survenir sur plusieurs jours. "Il y a une grande hétérogénéité des métrorragies. Leur point commun est le côté anormal : cela saigne à un moment où il ne devrait pas y avoir de saignement", souligne le gynécologue-obstétricien.
Quelles sont les causes des saignements hors règles ?
Métrorragies avant la ménopause
Les métrorragies peuvent être dues à des causes organiques : fibromes, polypes, adénomyose (muqueuse de l'endomètre qui pénètre dans la paroi utérine), cancer du col de l'utérus et cancer du corps utérin. Des pathologies fonctionnelles peuvent être à l'origine des métrorragies : pathologies de l'endomètre (endomètre trop épais ou au contraire pas assez épais), syndrome des ovaires polykystiques (les femmes ayant trop d'œstrogènes, la muqueuse de l'endomètre est épaisse et cela entraîne des saignements un peu n'importe quand), pathologies iatrogènes (Lorsque les femmes prennent des médicaments comme des anticoagulants ou des progestatifs de manière excessive). A cette liste s'ajoutent les métrorragies sans cause. "Les causes organiques représentent 50% des cas et les causes fonctionnelles 50% des cas", précise le Pr Fernandez. Il existe en revanche des idées fausses sur les causes des métrorragies : "le saignement ovulatoire n'existe pas", prévient le Pr Fernandez. Le stress ne peut pas non plus être à l'origine de métrorragies.
Métrorragies après la ménopause
"Lorsque les métrorragies surviennent après la ménopause, 1 fois sur 10 elles sont dues à un cancer, 1 fois sur 10 à un polype et 1 fois sur 10 à un fibrome. Le reste est représenté par des pathologies de l'endomètre (surtout par atrophie)", informe le Pr Hervé Fernandez.
Métrorragies pendant la grossesse
Lorsque les métrorragies surviennent au premier trimestre de la grossesse, "le cas le plus fréquent est celui d'une grossesse normalement évolutive avec des petits décollements de membranes qui expliquent les saignements", indique le gynécologue-obstétricien. Qui rappelle qu'1/3 des grossesses occasionnent des saignements lors du premier trimestre. Si les métrorragies ont lieu au début du premier trimestre de grossesse, il faut cependant s'assurer qu'il ne s'agit pas d'une grossesse extra-utérine. Celle-ci concerne 2% des grossesses. "Jusqu'à 7 semaines d'aménorrhée, ces métrorragies peuvent aussi être le signe de fausse couche précoce et sinon les fausses couches peuvent survenir jusqu'à 12 semaines d'aménorrhée", explique le médecin.Les métrorragies des deuxièmes et troisièmes trimestres sont une situation plus rare. Celles survenant au cours du second trimestre sont surtout liées à un placenta praevia (placenta situé devant le col de l'utérus), celles au cours du troisième trimestre, outre le diagnostic du placenta praevia, peuvent être dues à un décollement marginal des membranes (membranes utérines qui se décollent un petit peu), à un hématome rétro-placentaire en cas d'hypertension artérielle ou de traumatisme. Dans ce dernier cas, le placenta se décolle complètement. "Les métrorragies s'accompagnent de douleur, de ventre dur en plus des saignements", précise le Pr Hervé Fernandez.
Traitements : comment stopper les métrorragies ?
Le traitement des métrorragies dépend de la cause. "Il dépend également de la volonté de conserver ou pas la possibilité d'une grossesse", souligne le spécialiste. En ce qui concerne les métrorragies pendant la grossesse, "la grossesse extra-utérine est traitée avec du métothrexate une fois sur 2 ou opérée par coelioscopie pour un retrait ou non de la trompe", indique le gynécologue-obstétricien. "Qu'une trompe soit retirée ou pas, la fertilité reste la même", rassure-t-il. La fausse couche donne lieu à un traitement médical ou à une aspiration. S'il y a un placenta praevia, des médicaments sont donnés pour stopper les contractions et le repos fait partie du traitement. Si le placenta reste devant le col au moment de l'accouchement, il faudra pratiquer, parfois en urgence quand le saignement est abondant, une césarienne. Le repos est également le traitement des décollements marginaux. En cas d'hématome rétro-placentaire, une césarienne est réalisée en urgence. Si les saignements sont dus à des petits décollements de membrane, aucun traitement n'est requis. "Et le repos n'intervient pas comme modalité de traitement même si ceci est souvent proposé", précise le Pr Fernandez.
Traiter les fibromes et polypes
"Pour traiter les fibromes et les polypes, des antifibrinolytiques ou des anti-Inflammatoires non stéroïdiens (AINS) peuvent être prescrits uniquement pour limiter le saignement mais pas pour traiter la cause. Une hystéroscopie doit être réalisée pour retirer le fibrome ou le polype. Si la femme n'a plus de désir de grossesse, l'endomètre est retiré également pour éviter les récidives", explique-t-il. L'adénomyose est traitée avec des médicaments anti-hémorragiques et la mise en place d'un dispositif intra-utérin (stérilet) avec de la progestérone si la femme veut conserver la possibilité d'une grossesse. Si ce n'est plus le cas, le traitement consiste en la destruction de l'endomètre, voire le retrait de l'utérus. Lorsque les métrorragies sont dues à un endomètre trop fin ou trop épais et qu'il y a un désir de conserver la possibilité de grossesse, la femme peut se voir prescrire des œstrogènes ou la pilule. Lorsqu'il n'y a plus de désir de grossesse, l'endomètre peut être détruit.
Merci au Pr Hervé Fernandez, chef du service de gynécologie-obstétrique au CHU Bicêtre