Rupture d'anévrisme : âge, signes, quelle chance de survie ?
La rupture d'anévrisme est la troisième cause de mortalité cardiovasculaire après l'infarctus du myocarde et l'AVC. C'est une urgence vitale.
La rupture d'anévrisme fait peur. Elle survient brutalement et entraîne une hémorragie dans le corps avec des symptômes violents. C'est une urgence puisque le pronostic vital est en jeu. Un tiers des patients décède avant d'arriver à l'hôpital. Un autre tiers s'en sort avec une fatigue passagère mais aucun signe qui perdure. Un autre tiers survit, avec des séquelles diverses.
C'est quoi une rupture d'anévrisme ?
"L'anévrisme correspond à la dilatation anormale d'une portion d'une artère. Les artères (aorte, artère carotide, artère fémorale, artère abdominale, artère cérébrale...) sont des vaisseaux dont la paroi est formée de trois couches. Lorsque la couche du milieu, la média, faiblit, le vaisseau se dilate et, à partir d'une certaine taille, menace de se rompre : c'est ce qu'on appelle la rupture d'anévrisme, nous explique le Pr Paul Menu, chirurgien cardiaque et porte-parole de la Fédération française de Cardiologie (FFC). Les artères étant partout dans le corps, les risques et conséquences sont très différents en fonction de la localisation de l'anévrisme". Il existe 3 localisations préférentielles de l'anévrisme chez l'homme
- L'anévrisme cérébral : dilatation de la paroi d'une artère du cerveau. Les anévrismes cérébraux sont les anévrismes les plus fréquents (ils représentent environ 20% de tous les anévrismes). Généralement localisés à la base du cerveau, ils provoquent une hémorragie intracrânienne lors d'une rupture. Les anévrismes rompus constituent une urgence vitale du fait du risque élevé de décès.
- L'anévrisme thoracique : dilatation de l'aorte thoracique. L'aorte est l'artère principale de l'organisme, elle amène le sang depuis le cœur vers tous les territoires du corps en passant par le thorax. L'anévrisme de l'aorte thoracique est le deuxième type d'anévrisme le plus fréquent.
- L'anévrisme abdominal : dilatation de la partie de l'aorte qui traverse l'abdomen. On parle de rupture d'anévrisme de l'aorte quand la paroi de l'aorte abdominale s'est tellement dilatée qu'elle fissure, ce qui déclenche une hémorragie interne importante.
Quelles sont les causes ?
- L'hypertension artérielle, particulièrement les poussées hypertensives (élévation importante et abrupte de la pression artérielle) "L'hypertension multiplie le risque d'anévrisme par 7", précise notre interlocuteur.
- Le diabète qui peut fragiliser la paroi des artères
- La consommation de tabac (les produits contenus dans le tabac qui sont inhalés peuvent provoquer une oxydation des parois des artères, ce qui peut les fragiliser)
- Le surpoids ou l'obésité
- Le cholestérol
- Le stress
Quels sont les symptômes d'une rupture d'anévrisme ?
L'anévrisme est généralement asymptomatique. En revanche, la rupture d'anévrisme est un événement caractéristique, soudain et grave, avec :
- Un mal de tête intense et violent, qui apparaît de façon brutale
- Une raideur dans la nuque
- Des troubles soudains de la vision
- Souvent, des nausées et des vomissements
- Une sensibilité accrue à la lumière et au bruit
- Une confusion ou une désorientation, parfois accompagnée de troubles de l'équilibre ou de l'élocution
- Parfois, une perte de connaissance (dans les cas les plus graves : le patient sombre dans un coma)
- Des douleurs au niveau de l'estomac ou du dos en cas de rupture d'anévrisme abdominale
Quel est l'âge moyen d'une rupture d'anévrisme ?
La prévalence de la rupture d'anévrisme augmente avec l'âge mais il est impossible de donner un chiffre précis car la plupart des patients ne s'aperçoivent de leur maladie qu'au moment de la rupture. Le pic de ruptures d'anévrisme serait observé autour de 45 ans.
Quelles sont les conséquences d'une rupture d'anévrisme ?
La rupture d'anévrisme est dangereuse et peut être mortelle. La rupture d'anévrisme "entraîne des conséquences sur le territoire vascularisé par l'artère rompue. Là encore, la gravité de la rupture d'anévrisme dépend du siège", précise notre expert. Souvent, l'hémorragie a provoqué une sorte de caillot qui empêche le liquide de s'écouler. Comme il est produit en permanence, il peut y avoir une accumulation de ce liquide autour du cerveau, qui se trouve ainsi comprimé. "Si aucune intervention n'est pratiquée et que le cerveau se retrouve vraiment comprimé, la mort intervient en quelques minutes", précise le Pr Emmanuel Houdart, neuroradiologue à l'hôpital Lariboisière à Paris. Les conséquences de la rupture d'anévrisme sont extrêmement variables d'un individu à l'autre.
► Un tiers des patients décède avant d'arriver à l'hôpital.
► Un autre tiers s'en sort avec une fatigue passagère mais aucun signe qui perdure.
► Un autre tiers survit, avec des séquelles diverses. "Cela peut aller de troubles de la mémoire à un état végétatif, en passant par l'hémiplégie, explique le Pr Emmanuel Houdart. Ces séquelles sont souvent liées aux vasospasmes (contraction des artères) et à l'infarctus hémorragique qu'ils peuvent induire. L'importance de l'hémorragie entre également en ligne de compte." Et même pour ceux qui s'en tirent à bon compte, un long repos sera nécessaire avant de pouvoir reprendre le travail (3 à 6 mois voire un mi-temps thérapeutique pendant un an).
Traitement : combien de temps pour agir ?
La rupture d'un anévrisme est considérée comme une urgence médicale absolue, en raison de son risque de décès rapide et des séquelles qu'elle peut entraîner. Il faut appeler le Samu (15) pour que la personne soit le plus rapidement prise en charge médicalement. Lors de l'appel, il convient d'insister sur la violence et l'intensité des symptômes. "Après quoi, notre travail consiste à éviter que l'anévrisme ne ressaigne. Dans le même temps, on va traiter les conséquences de l'hémorragie sur le cerveau. Cela passe généralement par la prise d'anti-œdémateux cérébraux pour réduire le gonflement du cerveau et parfois par la réalisation d'un drainage du liquide céphalo-rachidien", explique Emmanuel Houdart. Pour éviter que l'anévrisme ne ressaigne :
► Dans environ 70% des cas la technique employée est celle de l'embolisation, beaucoup moins lourde qu'une chirurgie classique. "Il s'agit de passer par l'intérieur des artères et non l'extérieur, pour boucher l'anévrisme avec des petites spirales de platine. Ces petits fils sont introduits par un petit cathéter que l'on fait glisser dans les artères. Il est introduit au niveau de l'artère fémorale (dans la cuisse)." L'opération est réalisée par un neuroradiologue. Elle ne laisse aucune cicatrice et on s'en remet beaucoup plus facilement que d'une chirurgie. Après l'embolisation, le patient sera suivi régulièrement les premières années, pour vérifier que les fils de platine ne se "tassent" pas. Cela arrive très rarement, mais si c'est le cas, il faut réitérer pour écarter tout risque de nouveau saignement.
► Dans environ 30% des cas, l'embolisation n'est pas possible ou n'est pas souhaitable pour diverses raisons et les médecins ont alors recours à la chirurgie classique. La technique consiste alors à clipper l'anévrisme : il est ainsi séparé du reste de la circulation et donc asséché en sang. La chirurgie oblige à ouvrir la boîte crânienne, ce qui comporte toujours des risques et crée un traumatisme supplémentaire pour le cerveau.
Que faire après l'opération ?
Les suites de la rupture d'anévrisme sont reconnues comme une Affection longue durée (ALD). "Il peut même s'agir d'un accident du travail si la rupture a eu lieu pendant les heures de travail", souligne le Pr Houdart. Un suivi de contrôle doit être assuré, avec un scanner à trois mois et une artériographie de contrôle au bout d'un an. "Il n'y a pas de risque de récidive à proprement parler. Une fois qu'on est soigné, c'est définitif et l'espérance de vie n'est pas diminuée. Mais dans quelques rares cas, les spirales posées dans l'anévrisme peuvent se tasser. On peut alors être amené à ré-intervenir." Si au bout d'un an, rien n'a bougé, une nouvelle IRM est prescrite au bout de trois ans. Un suivi peut être proposé par la suite, selon les patients.
Quelles sont les chances de survie en cas de rupture d'anévrisme ?
"Sans action, la dégradation de la paroi (anévrisme) mène à la rupture artérielle et au décès dans 80% des cas", précise l'Inserm. Les chances de survie sont alors de seulement 20%.
Merci au Pr Paul Menu, chirurgien cardiaque et porte-parole de la Fédération Française de Cardiologie (FFC) et au Professeur Emmanuel Houdart, neuroradiologue à l'hôpital Lariboisière à Paris.