Règles hémorragiques : causes, symptôme, caillot, traitement

Règles hémorragiques : causes, symptôme, caillot, traitement

Vous avez l'impression de perdre beaucoup de sang pendant vos règles ? Des caillots ? Il s'agit peut-être de règles hémorragiques dont les causes sont variables. Stérilet, fibrome, polype, endométriose, fausse couche... A quoi est-ce dû ? Quels sont les symptômes ? Les traitements ? Expertise du Dr Philippe Tribondeau, gynécologue.

Vous avez l'impression de perdre beaucoup de sang pendant vos règles ? Des caillots importants pendant les écoulements ? Les règles hémorragiques se traduisent par des saignements très abondants et des difficultés à maîtriser son flux avec des serviettes ou des tampons classiques. Les causes sont multiples : stérilet au cuivre, fibrome, polype, adénomyose (endométriose interne), fausse couche... D'où l'importance de consulter rapidement son médecin ou son gynécologue en cas de symptômes évocateurs. Quand s'inquiéter ? Quels sont les traitements médicaux ? Quand changer de contraception ? Quand envisager la chirurgie ? Expertise du Dr Philippe Tribondeau, gynécologue à l'hôpital privé Saint Martin à Pessac. 

Définition : quand parle-t-on de règles hémorragiques ?

"Il n'y a pas de définition exacte à ma connaissance. Toute simplement parce que le volume des règles est très subjectif, c'est donc très compliqué de définir les règles hémorragiques", pose d'emblée le Dr Philippe Tribondeau, gynécologue. En théorie, on parle de règles hémorragiques quand on perd plus de 90 ml par cycle et si elles durent plus de 7 jours. Mais difficile de jauger le volume des écoulements sanguins. En pratique, on peut parler de règles hémorragiques : 

  • Quand le volume de sang perdu devient gênant.
  • Quand la femme constate des caillots de sang importants pendant les écoulements.
  • Quand la femme doit se lever la nuit pour changer sa protection hygiénique.
  • Quand la femme doit changer de protection très souvent dans la journée (toutes les heures pendant plusieurs heures consécutives).
  • Quand la femme présente des signes d'anémie pendant ses règles : fatigue, vertiges, teint pâle, maux de tête, essoufflements...
Des règles dites "normales" durent en moyenne entre 3 et 5 jours et le volume de sang perdu est en général entre 35 et 50 ml, soit l'équivalent de 3 à 4 cuillères à soupe. Des règles sont considérées comme abondantes quand la perte est supérieure à 50 ml. Au-delà de 90 ml, on parle de règles hémorragiques.

Quelles sont les causes des règles hémorragiques ?

Les causes dépendent de l'âge de la femme. 

Chez la femme de 20 à 40 ans : 

  • Une fausse-couche précoce, chez une femme en âge de procréer, peut être la cause de l'hémorragie. Pour éliminer le diagnostic, il faut réaliser un test de grossesse. 
  • Le stérilet au cuivre (DIU) peut provoquer des règles hémorragiques, particulièrement dans les premiers mois qui suivent la pose. 
  • La présence d'un polype (petite excroissance de chair à l'intérieur de l'utérus). Les polypes peuvent être détectés à l'aide d'une échographie. Un polype entraîne des saignements importants, particulièrement pendant les rapports. Le choix du traitement (de le retirer) dépendra de sa taille et de sa localisation. 
  • La présence d'un fibrome. Les fibromes qui font saigner sont dits "sous-muqueux", autrement dit dans la cavité utérine. 

Chez la femme de 40 à 50 ans : 

Chez la femme ménopausée, "Ce n'est absolument pas normal de saigner. Une femme qui saigne après la ménopause et qui n'a pas de traitement hormonal de substitution (THS) doit avoir une hystéroscopie (exploration de la cavité utérine) pour éliminer un cancer de l'endomètre. Le cancer de l'endomètre est quasiment inexistant chez la femme non ménopausée, insiste le spécialiste. Une femme qui a un traitement de substitution et qui a des saignements anormaux entre les règles doit consulter afin de faire une vérification de sa cavité utérine, car le risque de ce traitement est de masquer un potentiel cancer de l'endomètre". 

Quels sont les symptômes et quand s'inquiéter ?

Les règles hémorragiques se caractérisent par :

  • la perte abondante de sang, voire de caillots dans les écoulements
  • des difficultés à maîtriser le flux avec des protections hygiéniques classiques (serviettes, tampons...)
  • des règles qui durent plus de 7 jours. 

Si vous êtes dans l'un de ces cas de figure, parlez-en à votre médecin, un gynécologue ou une sage-femme. Le professionnel de santé procèdera aux examens nécessaires pour connaître la cause. 

Quel est le diagnostic ?

Une femme qui se plaint de saignements importants doit être examiné. "On va commencer par examiner le col de l'utérus pour vérifier qu'il n'y a pas de polype", explique notre interlocuteur. Une échographie est également réalisée afin de voir si l'épaisseur de l'endomètre est normale ou s'il n'y a pas de modification des flux. Une hystéroscopie, un examen qui permet d'explorer l'intérieur de l'utérus en cas de saignement important, peut être réalisée. 

Quels sont les traitements des règles hémorragiques ?

Le traitement dépend de la cause des règles hémorragiques. Plusieurs solutions peuvent être envisagées. 

Les traitements médicaux :

  • Si le stérilet en cuivre est en cause, on l'enlève au profit d'un stérilet à la progestérone (DIU hormonal), ce qui va limiter la prolifération de la muqueuse utérine et va ainsi réduire les saignements.

- Chez la femme qui n'a pas accouché : on favorise le stérilet Kyleena®

- Chez la femme qui a accouché : on favorise le stérilet Mirena®

  • En cas de "petites" règles hémorragiques, on peut envisager un traitement progestatif pur comme une contraception orale (Optimizette®) qui agit en bloquant l'ovulation et qui modifie la glaire cervicale ou un implant contraceptif
  • En cas de règles très abondantes ou d'un fibrome qui ne peut pas être opéré, on peut envisager un traitement à base de progestérone en comprimés (progestatifs Lutényl/Lutéran® et génériques) que l'on peut prendre 10, 15 ou 20 jours par mois pour réguler la croissance de l'endomètre. "Le problème, c'est qu'il peut stopper les règles ou entraîner des saignements entre les règles. De plus, deux des composants (acétate de nomégestrol (pour Lutényl® et ses génériques) et l'acétate de chlormadinone (Lutéran® et ses génériques) ont été suspectés de provoquer des méningiomes (tumeurs cérébrales bénignes), favorisées par un temps d'exposition et une dose élevés", prévient notre interlocuteur. Une femme qui prend l'un de ces traitements pendant plus de six mois a environ 3,3 fois plus de risque de développer un méningiome* par rapport au risque de base. De plus, le risque augmente avec la durée du traitement, et également avec la dose utilisée et l'âge de la patiente : sous Lutényl le risque est multiplié par 12,5 à partir de cinq ans de traitement et sous Lutéran, il est multiplié par 7 pour 3,5 ans de traitement, selon les données publiées par l'Agence nationale du médicament (ANSM). "Lorsqu'on envisage ce traitement, il faut bien évaluer le rapport bénéfices/risques et limiter la durée d'utilisation et la posologie, bien surveiller la patiente particulièrement si elle se plaint de maux de tête et prescrire une IRM si la patiente a plus de 35 ans et en cas de traitement potentiellement prolongé", poursuit le Dr Tribondeau. 
  • En cas de saignement abondant et dans l'attente d'une chirurgie, on peut envisager l'administration d'analogues de la GnRH qui vont entraîner une ménopause chimique. "On peut y associer des œstrogènes à faibles doses pour atténuer les effets secondaires", indique le Dr Tribondeau. 

Les traitements chirurgicaux :

Le fibrome et l'adénomyose ne dégénèrent pas en cancer.

  • L'hystéroscopie avec résection : on fait entrer un hystéroscope dans l'utérus et raboter la cavité pour enlever le polype ou le fibrome s'il est sous-muqueux. Les fibromes interstitiels (à l'intérieur de la paroi de l'utérus) ne sont pas accessibles au traitement par hystéroscopie. L'hystéroscopie permet également de traiter la partie superficielle de l'adénomyose. "On n'opère pas tous les fibromes : un fibrome s'opère que lorsqu'il devient gênant et saigne. De même, on ne va pas toujours enlever l'adénomyose si elle n'est pas impactante. Le fibrome et l'adénomyose ne dégénèrent pas en cancer. En revanche, un fibrome qui grossit chez une femme ménopausée peut être un sarcome, autrement dit un cancer, mais cela reste exceptionnel", insiste notre spécialiste. 
  • L'embolisation des artères utérines qui consiste à bloquer les artères de l'utérus qui amènent du sang. "On va entrer dans l'artère utérine par voie fémorale pour boucher l'arrivée de sang. L'utérus va s'atrophier et arrêter de saigner. Cette technique peut être utilisée en urgence ou en traitement du fibrome ou de l'adénomyose, mais elle entraîne plus d'effets secondaires (risque de nécrose utérine...) et a un plus grand risque d'échec que la chirurgie radicale. C'est réservé aux patientes qui refusent l'hystérectomie et qui veulent garder leur utérus", indique le gynécologue.  
  • Le recours aux ultrasons qui vont permettre de réduire la taille du fibrome, à condition qu'il soit bien placé pour recevoir l'énergie des ondes et être nécrosé. 
  • L'hystérectomie qui consiste à enlever l'utérus et qui peut être envisagée en cas d'échec des traitements médicaux ou si le fibrome est trop volumineux. Certaines femmes peuvent directement passer à l'étape de l'hystérectomie, sans passer par la case des traitements médicaux ou de la chirurgie légère. "L'hystérectomie se fait par voie vaginale chez la patiente qui a déjà accouché ou par voie coelioscopique chez la patiente qui n'a pas accouché. On enlève les ovaires seulement chez une patiente qui approche de la ménopause", prévient l'expert. 

Quelles protections ?

En cas de règles abondantes, il est conseillé de changer régulièrement sa protection périodique (au moins 6 ou 7 fois par jour). Il existe des serviettes ou tampons pour flux très abondant (super plus). Pensez aux culottes menstruelles lavables : certaines sont très absorbantes et peuvent contenir l'équivalent de 3 à 4 tampons classiques. Il est aussi possible de coupler deux modes de protection : tampon + culotte menstruelle, cup + serviette hygiénique... 

Merci au Dr Philippe Tribondeau, gynécologue à l'hôpital privé Saint Martin à Pessac, établissements Elsan. 

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