Don d'organes de son vivant : foie, rein, qui, comment ?

Le don d'organe peut se faire avant ou après la mort mais il est différent. Avant la mort, ce don ne peut se faire que pour des organes, qui, une fois prélevés, ne mettent pas en jeu le pronostic vital : essentiellement le rein mais aussi le foie. Conditions.

Don d'organes de son vivant : foie, rein, qui, comment ?
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Le don d'organe peut se faire avant ou après la mort mais il est différent. Avant la mortce don ne peut se faire que pour des organes, qui, une fois prélevés, ne mettent pas en jeu le pronostic vital : essentiellement le rein mais aussi le foie. "L'un des buts de l'Agence de Biomédecine (établissement public qui gère les greffes en France, ndlr) est de développer les greffes à partir de don d'organes du vivant" nous a expliqué Emmanuelle Cortot Boucher, directrice générale de l'Agence de Biomédecine en 2021. Comment se déroule le don d'organes du vivant ? Quels organes sont concernés ? Qui peut donner et qui peut recevoir ?

Quels sont les organes qui peuvent être donnés de son vivant ? 

"Le don d'organes du vivant concerne essentiellement le rein, car on peut tout à fait vivre avec un seul rein. Dans une moindre mesure, il concerne aussi le lobe de foie qui peut être prélevé sur une personne vivante, notamment aux fins de la réalisation de greffes pédiatriques" explique Emmanuelle Cortot Boucher. "Les 15 greffes hépatiques réalisées en 2020 à partir de donneur vivant sont toutes des greffes de parents à destination de leurs jeunes enfants. Le programme est restreint car les risques, pour le donneur de lobe de foie, ne sont pas négligeables." En théorie d'autres organes pourraient être donnés du vivant mais "en France, la pratique de don d'organes du vivant ne concerne que le rein et le lobe du foie" précise notre interlocutrice. "En 2020, 15 greffes hépatiques et 385 greffes rénales ont eu lieu à partir de donneurs vivants." Qu'en est-il des autres organes ? "Le don de cœur, de poumon et de pancréas sont des dons d'organes qui se font à partir d'une personne décédée. La greffe de lobe du poumon à partir de donneurs vivants n'est plus pratiquée en France car dans la très grande majorité des cas ce sont des greffes bi-pulmonaires que l'on effectue". 

Qui peut donner son rein de son vivant ?

Pour donner son rein de son vivant, il faut remplir certaines conditions : 

  • Être majeur(e)
  • Être volontair(e)
  • Être en bonne santé
  • Avoir un lien particulier avec le receveur. C'est exigé par la Loi. Il peut s'agir :
  • D'un lien de parenté au sens large du terme "de père en fils, de petits-enfants à grands-parents, de frère à sœur, de conjointe à conjoint…" explique l'experte. 
  • D'une personne avec qui le donneur partage sa vie depuis au moins deux ans. 
  • D'un lien affectif, "étroit" et "stable" depuis au moins deux ans. "Cela peut par exemple être une relation d'amitié objectivement établie." 

Qui peut donner une partie de son foie de son vivant ?

"En pratique, la greffe de foie à partir de donneur vivant n'est réalisée que dans des cas très restreints. Les 15 greffes hépatiques réalisées à partir de donneur vivant en 2020 sont toutes des greffes de parents à destination de leurs jeunes enfants. Le programme est restreint car les risques, pour le donneur de lobe de foie, ne sont pas négligeables, informe Emmanuelle Cortot-Boucher.  Même si les conditions légales sont les mêmes que pour les autres greffes à partir de donneur vivant."  C'est-à-dire : 

  • Être majeur(e)
  • Être volontair(e)
  • Être en bonne santé
  • Avoir un lien particulier avec le receveur. 

En effet, "la loi exige qu'il existe un lien particulier entre le donneur et le receveur." Il peut être de nature différente, il peut s'agir:

  • D'un lien de parenté au sens large du terme : "de père en fils, de petits-enfants à grands-parents, de frère à sœur, de conjointe à conjoint…" explique l'experte. 
  • D'une personne avec qui le donneur partage sa vie depuis au moins deux ans. 
  • D'un lien affectif, "étroit" et "stable" depuis au moins deux ans. "Cela peut par exemple être une relation d'amitié objectivement établie." 

Qui peut donner une partie de son poumon de son vivant ? 

"Le don de poumon de son vivant en France n'est plus pratiqué" informe la directrice générale de l'Agence de la biomédecine.

Comment sont choisis les receveurs ? 

Pour être receveur, il faut :

  • "Que la greffe soit indiquée, c'est-à-dire qu'un médecin indique que la greffe est une thérapie adaptée" .
  •  Pour la greffe rénale, les personnes concernées souffrent d'insuffisance rénale chronique terminale. "Elle concerne une population importante puisque l'on considère qu'en France, il y a à peu près entre 7 et 10% de la population qui entrent dans le champ des maladies rénales. Les formes sévères concernent environ 90 000 personnes." 
  • Une fois que le médecin a indiqué la greffe, il doit inscrire le patient sur la liste nationale d'attente tenue par l'Agence de la Biomédecine.

Comment sont choisis les donneurs ? 

En ce qui concerne le choix du donneur, il faut qu'un donneur dans l'entourage du patient en attente de greffe se propose. "Puis on va vérifier que ce donneur est en très bonne santé et on va vérifier la compatibilité entre le donneur et le receveur, c'est fondamental." Les critères de compatibilité sont "essentiels dans le choix du donneur, entre plusieurs donneurs possibles on choisira de préférence celui avec la plus grande compatibilité", rappelle notre interlocutrice. "Même si cette contrainte est moins forte qu'elle ne l'a été par le passé, car il existe des traitements qui permettent de minimiser les conséquences d'une incompatibilité éventuelle et de contrôler les réactions de rejet que pourra faire le receveur si le greffon n'est pas totalement compatible." Que faire si l'incompatibilité est trop forte ? "On peut organiser un don croisé, c'est-à-dire que l'on va appareiller deux paires de donneurs/receveurs qui ne sont pas compatibles entre eux." Ainsi, le donneur fils A pourra donner au receveur père B et le donneur fils B pourra donner au receveur père A, par exemple. 

"En France, le don altruiste du vivant n'existe pas."

Quelles sont les conditions pour donner un organe de son vivant ? 

Pour donner son rein ou un lobe de foie de son vivant, il faut remplir certaines conditions : 

  • Être majeur(e)
  • Être volontair(e)
  • Être en bonne santé
  • Avoir un lien particulier avec le receveur (lien de parenté au sens large du terme de père en fils, de petits-enfants à grands-parents, de frère à sœur, de conjointe à conjoint, personne avec qui le donneur partage sa vie depuis au moins deux ans, lien affectif depuis au moins deux ans (amis)...).

"En France, le don altruiste du vivant n'existe pas, ce qui signifie qu'une personne qui voudrait donner un lobe de foie ou un rein ne peut pas le faire de façon désintéressée sans désigner le destinataire, commente Emmanuelle Cortot Boucher, directrice générale de l'Agence de la biomédecine. En France, on tient énormément à un principe, celui de la gratuité du don. Cela veut dire que si on donne un organe, on ne peut pas recevoir de rémunération en contrepartie." 

Faut-il avoir une carte de donneur ? 

"En France, il n'existe pas de carte de donneur pour les organes prélevés sur une personne vivante (ni d'ailleurs pour les organes prélevés sur une personne décédée), ce qui compte, c'est de donner son consentement. Il doit être exprimé de manière claire par le donneur d'organes pour un prélèvement de son vivant et il existe une procédure complète et précise pour s'assurer que c'est bien le cas" explique Emmanuelle Cortot-Boucher. La loi garantit à la personne qui souhaite donner un organe à un proche que son don soit fait "sans recevoir de pressions psychologiques ou financières, et de façon éclairée". En quoi consiste cette procédure ? 

► Un passage devant le Comité donneur vivant. "Il s'agit d'un comité d'experts qui va recevoir la personne candidate au don pour lui expliquer ce que signifie donner un organe, quelles en sont les conséquences pour elle. Le comité s'assure également que la personne ne subit pas de pression financière ou psychologique."
► La personne doit ensuite donner son consentement à un magistrat judiciaire. "La loi prévoit que le consentement doit être recueilli par le président du tribunal judiciaire ou un magistrat désigné par le Président" précise l'experte. 
► Une fois que le consentement a été donné, le comité reprend le dossier et autorise ou au contraire, interdit la greffe. 

Une personne mineure peut-elle donner ses organes ?

"Une personne doit être majeure pour pouvoir donner un organe de son vivant" informe Emmanuelle Cortot Boucher.

Don d'organes entre membres d'une même famille : quels organes, dans quels cas ?

Le don d'organe du vivant concerne principalement le rein et le lobe du foie."En ce qui concerne le don de rein, il peut être nécessaire lorsqu'une personne souffre d'une insuffisance rénale chronique terminale" informe Emmanuelle Cortot Boucher. Il doit être réalisé entre deux personnes qui ont un lien de parenté ou un lien affectif particulier. Il peut donc s'agir d'un don entre frère et sœur, entre fils/fille et parent ou petit-fils/petite-fille et grands-parents…

Comment se déroule une greffe de son vivant ? 

"Quand on a un prélèvement sur donneur vivant, le prélèvement et la greffe se déroulent presque au même moment. C'est une greffe organisée, et c'est d'ailleurs le point fort de la greffe à partir de donneur vivant, commence la directrice générale de l'Agence de la biomédecine. Dès que l'organe est prélevé il va être transplanté sur le receveur." L'avantage ? "Le délai d'ischémie, c'est-à-dire le moment pendant lequel l'organe n'est plus irrigué par le sang, est presque égal à zéro." C'est grâce à cela que les résultats de greffe sont excellents. "On a une très bonne reprise de fonction de l'organe dans le corps du receveur, bien meilleure que lorsqu'il s'agit d'un don d'organe après la mort. Dans ce dernier cas, le temps d'acheminement de l'organe peut être long, le délai d'ischémie est donc plus étendu et la reprise de l'organe dans le corps du receveur est, de manière générale, moins bonne."

Risques de complications, réussite : comment ça se passe après ?

"Les complications après la greffe d'organe du vivant sont très peu nombreuses. La survie du greffon (organe greffé) dans l'organisme du receveur est un bon indicateur de la qualité de la greffe du vivant." Selon Emmanuelle Cortot Boucher "dix ans après la greffe, trois-quarts des greffons qui ont été prélevés sur un donneur vivant sont encore fonctionnels. Or, lorsqu'il s'agit d'un greffon prélevé sur une personne décédée, seul deux tiers restent fonctionnels après 10 ans." Le greffon provenant d'un vivant rend la seconde greffe moins souvent nécessaire que le greffon issu d'une personne décédée : "Il arrive qu'un phénomène de rejet se produise au bout d'un certain temps, rendant nécessaire une nouvelle greffe" informe la directrice.

Merci à Emmanuelle Cortot Boucher, directrice générale de l'Agence de la biomédecine