Dosage de la vitamine D : technique, indication, intérêt

Le dosage de la vitamine D est rarement prescrit, à part dans 6 situations cliniques de maladies osseuses ou de chirurgie. Pourtant, la carence en vitamine D est fréquente et un dosage sanguin devrait être entrepris avant de prendre de la vitamine D, et à quelle dose. Explications.

Dosage de la vitamine D : technique, indication, intérêt
© Ivan Trifonenko-123RF

Définition : qu'est-ce que le dosage de la vitamine D ?

La vitamine D existe sous deux formes : la vitamine D2 (ergocalciférol) d'origine végétale, et la vitamine D3 (colécalciférol) naturellement produite par la peau humaine sous l'effet des ultraviolets, et présente dans des aliments d'origine animale. Pour évaluer le statut vitaminique D, soit le "stock" de vitamine D dans l'organisme, il faut doser les deux formes de vitamine D, la 25(OH)D : Hydroxycalciférol ou calcidiol, et la 1,25(OH)2D : Dihydroxycalciferol ou calcitriol. "Les valeurs de référence ont beaucoup évolué ces dernières années. Les déterminations de l'insuffisance en vitamine D varient selon les institutions et sociétés savantes, note la Haute Autorité de santé (HAS) en 2013 dans son évaluation sur l'utilité clinique du dosage de la vitamine D. La définition des valeurs de référence n'est pas parfaitement consensuelle même si la tendance actuelle est de fixer le taux optimum de 25-OH-D à 75 nmol/L (nano-mole par litre), ou entre 30 et 45 ng/ml (nano gramme par millilitre) de sang. De même, les valeurs définissant la toxicité varient selon les institutions et certaines restent prudentes en raison de l'incertitude sur les conséquences éventuelles d'une supplémentation au long cours et la maintenance d'un taux sérique à 75 nmol/L", souligne la HAS. A ce jour, "le centre de référence français recommande des taux de vitamine D sanguine supérieurs à 50-75 nmol/L, sans dépasser 150 nmol/L", indique le Pr Justine Bacchetta, professeur en pédiatrie au Centre de Référence des Maladies Rénales Rares, des Maladies Rares du Calcium et du Phosphate, à l'Hôpital Femme Mère Enfant de Lyon.

Quelles sont les indications du dosage ?

Le dosage sanguin de la vitamine D, reconnu utile par les autorités sanitaires françaises, concerne les patients à haut risque de déficit en vitamine D, dans les 6 situations cliniques suivantes :

  • lors d'une démarche diagnostique visant à confirmer ou infirmer un rachitisme (suspicion de rachitisme chez l'enfant).
  • lors d'une démarche diagnostique visant à confirmer ou infirmer une ostéomalacie (suspicion d'ostéomalacie chez l'adulte ou la personne âgée).
  • au cours d'un suivi ambulatoire de l'adulte transplanté rénal au-delà de trois mois après transplantation. • avant et après une chirurgie bariatrique (anneau gastrique, bypass gastrique, sleeve gastrectomie).
  • lors de l'évaluation et de la prise en charge des personnes âgées sujettes aux chutes répétées (suspicion d'ostéoporose).
  • en fonction des traitements médicamenteux qui préconisent la réalisation du dosage de vitamine D.

En dehors de ces 6 situations, la Haute Autorité de Santé (HAS) confirme qu'il n'y a pas d'utilité prouvée à doser la vitamine D. Toutefois, "une supplémentation en vitamine D peut être instaurée et suivie sans dosage de la vitamine D" indique l'instance.

Après 65 ans, le dosage de la vitamine D n'est pas justifié.

Pourquoi doser son taux de vitamine D ?

Le dosage de la vitamine D a pour intérêt le dépistage d'une insuffisance en vitamine D, ou pour suivre une supplémentation en vitamine D. Il est indiqué :

  • En préventif : devant une pathologie ou un traitement exposant à une carence en vitamine D (malabsorption, insuffisance hépatique, maladie de Paget, prise d'anticonvulsivants).
  • En curatif : en cas d'ostéoporoses avérées, avant un traitement par biphosphonates, d'ostéomalacie ou de rachitisme, d'insuffisance rénale chronique, de chutes idiopathiques de la personne âgée.
  • En diagnostique : des anomalies du métabolisme phosphocalcique, d'une hyperthyroïdie primitive sévère, de granulomatoses ou d'une suspicion d'intoxication à la vitamine D. Il peut également avoir un intérêt chez les femmes enceintes et allaitantes, les populations hispanique et afro-américaine, une obésité avec une IMC > 30 

Le GRIO (Groupement de Recherche et d'Interventions sur les Ostéoporoses) signale qu'il est nécessaire de connaître la valeur initiale du stock de vitamine D dans l'organisme, "dans toutes les situations au cours desquelles l'objectif thérapeutique est d'obtenir un taux optimal de 25(OH)D pour adapter les schémas d'attaque et d'entretien de la supplémentation". Parmi ces situations le GRIO inclut tous les sujets ayant : "une exposition solaire nulle ou quasi nulle ;  des chutes à répétition quel que soit l'âge ; une ostéoporose avérée ; une maladie favorisant l'ostéoporose ; des médicaments inducteurs d'ostéoporose ; une pathologie chronique sévère favorisant l'insuffisance ou la carence". Toutefois, en raison des rôles physiologiques de la vitamine D, de ses effets osseux et non osseux, l'insuffisance en vitamine D, est très répandue en France. La carence en vitamine D est définie par un taux sanguin de vitamine D (25OH) inférieur à 50 mnol/L de sang. Le manque en vitamine D est potentiellement impliqué dans l'étude des troubles qui surviennent dans un grand nombre de pathologies osseuses et extra-osseuses. Cette constatation pose de ce fait, la question de l'utilité clinique de son dosage sérique pour prévenir l'apparition ou le développement de pathologies susceptibles d'être associées à une carence en vitamine D (hypovitaminose D).

Quelle est la technique d'un dosage de la vitamine D ?

La technique de dosage de la vitamine D est réalisée par prise de sang (à jeun).

Quelles sont les contre-indications ?

Le dosage de la vitamine D n'a pas de contre-indications. Toutefois, la Haute Autorité de santé (HAS) déclare l'absence d'utilité de ce dosage en cas de "chute, performance fonctionnelle, cancer colorectal, cancer du sein, cancer de la prostate, hypertension artérielle, maladies cardiovasculaires, allergie, maladies auto-immunes, diabète de type II, maladie rénale chronique, grossesse, maladies infectieuses, performances cognitives, profil lipidique, mucoviscidose, mortalité". Par ailleurs, "après 65 ans, le dosage de la vitamine D n'est pas justifié et la supplémentation est conseillée, car la prévalence des carences est très élevée et le traitement sans danger".

Que faire quand le taux de vitamine D est trop bas ?

Le dosage de la vitamine D (D2+D3) montre une insuffisance lorsque son taux est inférieur à 50 nmol/L, précise Justine Bacchetta Professeur en pédiatrie. "La détermination des valeurs de référence pour la concentration en vitamine D reste un sujet de débat et la définition d'une carence, d'une insuffisance et du taux optimal à atteindre ne semble pas encore complètement consensuelle", soulignait la HAS dans son évaluation sur le dosage de la vitamine D, en janvier 2013. Néanmoins, un taux faible (< 50 nmol/L) indique une carence qui expose au rachitisme ou à l'ostéomalacie. La constatation d'un taux trop bas implique la prescription d'une supplémentation adaptée à la carence décelée. Il faut donc consulter le médecin traitant. Le médecin prescrit généralement la vitamine D "sous forme de médicament en goutte à 300 UI, et non sous forme de compléments alimentaires (lesquels sont soit sous dosés ou sur-dosés), précise la Professeur. Puis par la prise d'une ampoule à l'entrée et à la sortie de l'hiver chez les adolescents". De manière générale, "la vitamine D devrait être prescrite à tous les enfants, pour la prévention des problèmes osseux à l'âge adulte" (déminéralisation et ostéoporose), estime la Professeur.

Que faire quand le taux de vitamine D est trop haut ?

La toxicité de la vitamine D est à suspecter à partir d'un taux dans le sang supérieur à 250 nmol/L, selon l'Académie nationale de médecine, et à 375 nmol/L selon le GRIO (Groupement de Recherche et d'Interventions sur les Ostéoporoses). Ce taux élevé peut "entrainer une hypercalcémie par diminution de l'élimination du calcium, qui peut se caractériser notamment par une anorexie, des nausées, une polyurie, une constipation, de la fatigue, une perte de poids, des céphalées, une dépression, des calcifications rénales et vasculaires, de l'hypertension et une anémie. Lors d'intoxications sévères, l'hypercalcémie peut conduire à une insuffisance rénale irréversible et à une insuffisance cardiaque pouvant entraîner le coma et le décès. L'intoxication à la vitamine D est rare, mais peut être provoquée par une supplémentation quotidienne à des doses très élevées" décrit la HAS, supérieures à 10 000 UI (Unité Internationale) par jour. En cas d'excès, vérifié par une analyse de sang, il faut stopper la supplémentation. La vitamine D s'élimine naturellement en quelques semaines après l'arrêt des prises.

Quel coût et est-ce remboursé ?

Le dosage de la vitamine D est soumis à une prescription médicale. Il est pris en charge par l'Assurance maladie dans le cadre strict des 6 situations définies par la Haute Autorité de Santé (HAS) et précisées plus haut dans les indications. En dehors de ces cas particuliers, le dosage de la vitamine D est non remboursable.

Mercis au Pr Justine Bacchetta, professeur en pédiatrie au Centre de Référence des Maladies Rénales Rares, des Maladies Rares du Calcium et du Phosphate, à l'Hôpital Femme Mère Enfant, de Lyon, et à Pierre Chirac, président de l'Association Mieux Prescrire.

Sources :