Anosognosie : définition, AVC, symptômes, traitement

Anosognosie : définition, AVC, symptômes, traitement

L'anosognosie est un trouble neuropsychologique assez méconnu dans lequel le patient n'a pas conscience de la maladie, des difficultés et de ses répercussions sur sa vie quotidienne. Quels sont les symptômes ? Les causes ? Le traitement ? Le point avec le Pr Frédéric Blanc.

Définition : qu'est-ce qu'une anosognosie ?

"L'anosognosie, ce n'est pas une maladie mais un symptôme qui fait que le malade n'a pas conscience de sa maladie et de son évolution. Elle peut être de trois types : anosognosie franche, le patient n'en a pas du tout conscience ; anosognosie partielle, il a conscience de sa maladie mais celle-ci est réduite en particulier pour certains symptômes ; et de type anosodiaphorie, le patient est complétement ou partiellement indifférent à sa maladie", définit le Pr Frédéric Blanc. Le patient n'est pas ou peu conscient d'être malade alors que cela est évident pour le corps médical et son entourage.

Quels sont les symptômes de l'anosognosie ?

Les manifestations sont diverses et différentes d'une personne à l'autre. L'anosognosie est assez fréquente chez les personnes âgées, chez des personnes atteintes de troubles cognitifs, plus rarement chez les personnes jeunes. Le patient ne reconnaît pas les symptômes de sa maladie, il peut convenir qu'il est malade, mais ne pas se rendre compte de l'impact de la maladie dans sa vie quotidienne. "La difficulté de l'anosognosie est de la différencier du déni, qui est une défense psychologique de l'individu qui face à l'annonce d'une maladie, un cancer par exemple, va nier son état, ne va pas vouloir en parler. L'anosognosie est le fait qu'une personne malade va continuer à dire que tout va bien malgré les symptômes qui en général altèrent son état général", souligne le Pr Frédéric Blanc. Les premiers signes apparaissent de différentes manières : les résultats des tests diagnostiques, des analyses et des rapports médicaux peuvent être complètement ignorés ou remis en question. Il y a une sous-estimation de la gravité de la maladie, un manque de conscience de sa présence et de ses manifestations. Et celles-ci peuvent être permanentes ou varier selon les stades pathologiques.

Quelles sont les causes de l'anosognosie ?

L'anosognosie est la conséquence de lésions cérébrales focalisées ou diffuses au niveau de l'hémisphère droit du cerveau, souvent au niveau du lobe frontal ou de l'insula. Elle peut se retrouver chez des patients souffrant de maladies neuro-évolutives, comme la maladie d'Alzheimer, la maladie à corps de Lewy, la maladie fronto-temporale ou bien être secondaire à une lésion cérébrale aiguë comme un accident vasculaire cérébral, ou une maladie infectieuse, inflammatoire, traumatique du cerveau. Dans la démence, elle perturbe la connaissance de soi et semble impliquer le lobe frontal. Pour la maladie d'Alzheimer, la prévalence varie de 15 à 28 % pour l'anosognosie modérée à sévère et de 76 à 93 % pour l'anosognosie légère. Elle peut aussi se retrouver dans la maladie à corps de Lewy, le patient n'a pas conscience des symptômes de la maladie qui se manifestent généralement par des hallucinations, des fluctuations cognitives et de vigilance, et des troubles de l'attention. L'anosognosie peut survenir après une lésion cérébrale traumatique aiguë, comme un accident vasculaire cérébral (AVC) ou une lésion cérébrale, mais peut également survenir dans d'autres conditions qui endommagent le cerveau. Chez les patients ayant subi un AVC souffrant d'hémiparésie, la fréquence de l'anosognosie est de 10 à 18 %.

Anosognosie post-AVC : c'est quoi ?

Après un AVC, le malade peut ne pas se rendre compte qu'une de ses fonctions cognitives est touchée. Il peut, par exemple, être incapable de bouger un de ses membres sans s'en apercevoir. "L'AVC touche les régions frontales ou insulaires et le côté droit du cerveau, il engendre selon son niveau de gravité une paralysie du côté gauche et le patient atteint d'anosognosie va vouloir marcher comme si de rien n'était et tombera régulièrement du fait de la non-conscience et/ou de la négligence de son hémiplégie", explique le Pr Frédéric Blanc. Dans ce contexte, l'anosognosie peut être envisagée, elle peut être prise en charge dans le travail de rééducation qui est mis en place autour du patient et la récupération peut être spontanée.

Quel est le traitement de l'anosognosie ?

Il n'existe pas de traitement pharmacologique. Le diagnostic de l'anosognosie est établi par un entretien effectué avec un médecin et/ou des tests cognitifs réalisés par un psychologue. Le traitement passe par une prise en charge pluridisciplinaire en accord avec le bénéfice que cela peut apporter au patient : "Il faut mettre en place une prise en charge adaptée autour du patient avec la collaboration de chacun des intervenants :  kinésithérapeute, orthophoniste, neuropsychologue par exemple. Il arrive même que l'on ait recours à la vidéo, le comportement du malade est filmé, pour ainsi lui donner les preuves de sa maladie, de ses symptômes et de ses évolutions. L'idée étant d'améliorer la conscience du trouble et de participer à la qualité de vie du patient", ajoute le Pr Frédéric Blanc.

Peut-on en guérir complètement d'une anosognosie ?

La remédiation cognitive permet au patient d'améliorer sa conscience du trouble, de sa maladie et d'améliorer son quotidien.
L'orthophoniste peut amener le patient à verbaliser les difficultés rencontrées lors de mises en situation. Cette rééducation peut fonctionner pour les personnes atteintes d'une légère anosognosie. "La prise en charge de l'anosognosie est très individualisée : elle peut améliorer la qualité de vie du patient et de son entourage en reculant parfois chez les personnes âgées l'institutionnalisation. Elle est aussi très dépendante de la personnalité du malade et de la manière dont il a déjà appréhendé les accidents de la vie. Il faut savoir si cette prise en charge, cette remise en contact avec la réalité va avoir un véritable impact positif pour le patient. Si l'anosognosie s'accompagne d'un déni, il faudra savoir respecter celui-ci pour ne pas fragiliser plus le patient", ajoute le Pr Frédéric Blanc.

Merci au Pr Frédéric Blanc, neuro-gériatre, pôle de gériatrie, Centre Mémoire de Recherche et de Ressources (CM2R) de Strasbourg, et professeur en gériatrie et co-responsable de l'équipe IMIS du laboratoire ICube, Faculté de médecine de Strasbourg