Perte brutale de la vision : c'est quoi la neuropathie optique héréditaire de Leber ?

Cette maladie héréditaire rare touche en particulier les hommes jeunes.

Perte brutale de la vision : c'est quoi la neuropathie optique héréditaire de Leber ?
© 123rf

La neuropathie optique héréditaire de Leber (ou atrophie optique de Leber) est une maladie héréditaire rare qui se caractérise par une baisse brutale de la vision. Elle concerne une personne sur 30 000 à 50 000, en particulier les hommes jeunes (elle se déclare généralement entre 15 et 35 ans, même si elle peut également survenir bien plus tôt, parfois avant 10 ans). Elle entraine un mauvais fonctionnement du nerf optique, celui-là même qui transmet les informations de l'œil au cerveau. "Elle débute par une baisse d'acuité visuelle très profonde, celle-ci étant inférieure à 1/20 en quelques jours", explique le Dr Christophe Orssaud, Responsable de l'Unité Fonctionnelle d'Ophtalmologie à l'Hôpital Européen Georges Pompidou, à Paris. "Puis quelques semaines plus tard elle touche le deuxième œil avec une baisse d'acuité visuelle identique. Cette profonde altération de la vision est liée à la présence d'une tache ou scotome central dans le champ visuel de chaque œil. C'est pourquoi, s'il est possible de parler de profonde malvoyance ou de quasi-cécité, le patient garde une vision périphérique et peut se déplacer seul et sans canne dans la très grande majorité des cas." Et le Dr Damien Gatinel, chirurgien ophtalmologue à l'Hôpital Fondation Rothschild à Paris, d'ajouter : "Dans de rares cas, d'autres symptômes peuvent se manifester en plus de l'atteinte visuelle : surdité, troubles de l'équilibre, atteinte squelettique, troubles du rythme cardiaque…"

Quelles sont les causes ?

Cette maladie est une affection d'origine génétique. "Elle est causée par des mutations de l'ADN mitochondrial qui affectent la production de différentes protéines du complexe I de la chaine respiratoire intramitochondrial (ND1 et ND4)", indique le Dr Orssaud. Toutefois, toutes personnes présentant cette mutation génétique ne développent pas une neuropathie optique héréditaire de Leber. Certains facteurs, tels que l'alcool, le tabac, un traumatisme ou une anesthésie pourraient contribuer à déclencher la maladie.

Comment faire le diagnostic ?

Les signes cliniques de la maladie permettent de suspecter le diagnostic. "Mais de nombreux examens seront nécessaires pour le confirmer, et surtout éliminer des causes curables d'atteinte du nerf optique" indique le Dr Gatinel. Il s'agit tels d'un examen du fond d'œil, un OCT, l'étude du champ visuel, la mesure des potentiels évoqués visuels qui permet de mesurer l'activité électrique du nerf optique, un électrorétinogramme qui permet de connaître l'activité électrique de la rétine ainsi qu'une IRM cérébrale. La recherche génétique est indispensable pour mettre en évidence la mutation génétique.

Quelles sont les solutions thérapeutiques ?

"Un traitement, l'idébénone (Raxone®, Chiesi) dispose d'une AMM (autorisation de mise sur le marché, ndlr) dans cette pathologie. Mais ce traitement ne donne pas de résultats chez tous les patients et reste limité en terme de récupération", explique le Dr Orssaud. Des aides optiques comme des lunettes grossissantes peuvent être proposées pour améliorer le confort quotidien des malades. Toutefois, des chercheurs de l'Inserm de Sorbonne Université et du CNRS à l'Institut de la Vision à Paris ont conçu une thérapie génique pour les patients ayant la mutation 11778. Cette thérapie génique est sensée corriger le défaut de synthèse du gène ND4 en ajoutant au gène des séquences d'ADN, appelées "séquences d'adressage". Les résultats d'un essai clinique mené sur 37 patients et publiés dans la revue Science Translational Medicine, montrent que ce traitement améliore de façon significative la vision bilatérale chez plus des ¾ des patients (1). "Néanmoins, l'acuité finale après ce traitement reste voisine de 1/20", précise le Dr. Orssaud.

Merci au Dr Christophe Orssaud, Responsable de l'Unité Fonctionnelle d'Ophtalmologie à l'Hôpital Européen Georges Pompidou et au Dr Damien Gatinel, chirurgien ophtalmologue à l'Hôpital Fondation Rothschild.

  • (1)Patrick Yu-Wai-Man et al. "Amélioration visuelle bilatérale avec injection unilatérale de thérapie génique pour la neuropathie optique héréditaire de Leber" - Science Translational Medicine – Décembre 2020