Quels sont les premiers symptômes du syndrome de Minor ?
Le syndrome de Minor (ou syndrome de déhiscence du canal semi-circulaire supérieur) est une maladie otoneurologique rare qui touche la partie haute de l'oreille interne et qui peut nécessiter une opération.
C'est quoi le syndrome de Minor ?
Le syndrome de Minor est une "jeune maladie" puisqu'il a été décrit pour la première fois en 1998 par le chirurgien américain Lloyd Minor. "Il s'agit d'une maladie qui affecte le fonctionnement touchant le système vestibulaire et cochléaire, plus précisément, le canal semi-circulaire supérieur, situé dans la plus partie la plus haute de l'oreille interne, sous la méninge", explique le Pr. Mathieu Marx, Otologiste et Otoneurochirurgien à l'Hôpital Pierre-Paul Riquet, CHU de Toulouse. Elle se caractérise par un amincissement ou une absence de couverture osseuse du toit du canal supérieur (déhiscence) recouvrant ce canal semi-circulaire supérieur. Cette maladie peut être unilatérale, c'est-à-dire ne toucher qu'une seule oreille, ou bilatérale, c'est-à-dire les deux. Elle peut également commencer par être unilatérale et, avec le temps, toucher l'autre oreille.
Quels sont les symptômes d'un problème d'oreille interne ?
Si la maladie peut être asymptomatique durant plusieurs années, elle peut également provoquer de nombreux maux très invalidants au quotidien, dont l'intensité peut varier d'une personne à l'autre, mais aussi d'un jour à l'autre. Parmi ceux-ci on trouve :
► Des symptômes auditifs :
- Une autophonie : c'est-à-dire une perception anormale des bruits du corps. "Les personnes qui en sont atteintes se plaignent par exemple d'entendre, dans leur crâne, leurs yeux bouger, les craquements de leur nuque, les battements de leur cœur, leur déglutition, parfois leur digestion, le bruit de leur pas en marchant, leur voix résonne dans leur tête comme dans une cathédrale…", décrit Marie-Laure Chavannes, Co-Présidente de l'Association SDCS Minor.
- Une baisse auditive légère mais parfois plus importante, (surdité de transmission)
- Des acouphènes pulsatiles ou permanents et/ou une hyperacousie ou une hypersensibilité auditive
- Des sensations de pressions dans l'oreille
► Des symptômes vestibulaires :
- Des vertiges ou une instabilité, notamment le phénomène de Tullio : "il s'agit d'un vertige déclenché par les sons forts, précise le Pr. Marx, accompagné de nausées, chutes, malaise voire perte de connaissance"
- Des sensations d'état d'ébriété
- Des mouvements involontaires des yeux : "Principalement oscillopsie et nystagmus, c'est-à-dire l'impression que l'environnement visuel autour n'est pas stable", précise le Pr. Marx.
► D'autres symptômes :
- Une grande fatigue
- Des problèmes de concentration
- Des troubles de la mémoire
- Des troubles de la priorisation
- Un brouillard cérébral
- Des maux de tête/migraines
- Des cervicalgies intenses
- Une grande sensibilité à la lumière...
Quelle est la cause d'un syndrome de Minor ?
Les causes de son apparition sont encore mal connues.
L'oreille est ouverte sur l'oreille moyenne par deux fenêtres, une appelée "fenêtre ronde", l'autre "fenêtre ovale", par lesquelles le son entre et sort. "Schématiquement, le son pénètre le conduit auditif, fait vibrer le tympan et les osselets, qui transmettent ces vibrations à une membrane très fine, appelée " fenêtre ovale", dans l'oreille interne, explique le Pr. Marx. Les vibrations traversent la cochlée jusqu'à la "fenêtre ronde". C'est ainsi que fonctionne l'audition. Seulement, dans le cas du syndrome de Minor, la déhiscence crée une "troisième fenêtre" qui permet à une partie du son de ressortir vers la méninge et le cerveau, en passant notamment par les canaux responsables de l'équilibre". Les causes de son apparition sont encore mal connues. "La principale hypothèse est qu'il existe chez ces patients une fragilité constitutive du canal, avec une déhiscence qui se manifeste suite à un deuxième événement (traumatisme crânien, accouchement…), précise notre expert. Une autre hypothèse serait que le poids et la pulsation du cerveau use le rocher avec l'âge et le temps".
Quels examens pour poser le diagnostic ?
C'est ce qu'il y a de plus difficile : les médecins étant peu formés à cette maladie rare, les patients peuvent errer des années avant d'être enfin pris en charge. "Pour certains il s'est passé parfois plus de 10 ans entre le début des symptômes et la pose du diagnostic", précise Marie Cueff, Co-Présidente de l'Association SDCS Minor. Pour établir le diagnostic du Syndrome de Minor, il est tout d'abord nécessaire d'éliminer d'autres causes : neurologiques notamment, et d'autres pathologies comme la maladie de Ménière ou une otospongiose. Puis un interrogatoire précise des symptômes subis par le patient oriente le médecin ORL. "Un test auditif détaillé est réalisé afin de dépister une éventuelle perte auditive associée à une trop bonne perception des sons internes par voie osseuse, ajoute le Dr. Marx. Un scanner des rochers en coupes fines, ou cone beam, permet de visualiser l'état des rochers et la présence de l'ouverture du canal semi-circulaire supérieur sous le cerveau. Enfin, différents tests d'explorations fonctionnelles peuvent également être utiles, en particulier le PEO (Potentiels évoqués otolithiques myogénique), dont l'analyse des seuils abaissés confirme la présence d'une troisième fenêtre chez le patient".
Comment soigner le syndrome de Minor ?
► Des médicaments sont parfois prescrits pour réduire l'importance des troubles, comme des antivertigineux, des diurétiques, des antimigraineux et des anxiolytiques. Cependant, le recours le plus efficace est chirurgical. Il existe deux interventions possibles, réalisées sous anesthésie générale, choisies en fonction de la présence d'autres fragilités associées, de la localisation de la déhiscence sur le canal semi-circulaire supérieur.
► La chirurgie par voie sus-pétreuse. Elle consiste à refermer l'ouverture donnant sur le cerveau. "Pour cela, elle nécessite une incision au-dessus de l'oreille et la réalisation d'un volet crânien osseux de près de 10 cm à la verticale du conduit auditif externe, explique le Pr. Marx. C'est grâce à ce volet que le cerveau peut être soulevé, pour atteindre la zone concernée et pour combler la déhiscence avec des petits fragments de muscle et/ou de "bone pâté", réalisée par le chirurgien avec les propres tissus et os du patient".
► La chirurgie par voie transmastoïdienne. "Grâce à une ouverture derrière l'oreille, elle consiste à fraiser la mastoïde pour atteindre et combler chacune des deux branches du canal par un plugging, grâce à une "bone pâté".
► Par la suite une rééducation vestibulaire est nécessaire auprès d'un kinésithérapeute spécialisé. Elle consiste à restaurer l'équilibre entre la vision, l'organe de l'équilibre situé dans l'oreille interne et les pieds (proprioception). "En outre, les symptômes entrainant une grande anxiété, un suivi psychologue peut être indispensable", recommande Marie Cueff.
Quand envisager l'opération ?
- Quand les symptômes deviennent si invalidants au quotidien qu'ils perturbent la qualité de vie
- Quand l'isolement social est important
- Quand ils empêchent le maintien dans l'emploi, les déplacements, la conduite ou d'avoir une vie personnelle, intime et familiale.
Peut-on prendre l'avion avec un syndrome de Minor ?
"Il n'existe pas de contre-indications aux voyages en avion, mais la présence de la troisième fenêtre constitue toutefois un facteur de vulnérabilité théorique, c'est-à-dire que le voyage peut aggraver l'état", précise le Pr. Marx.
Merci au Pr. Mathieu Marx, Otologiste et Otoneurochirurgien à l'Hôpital Pierre-Paul Riquet, CHU de Toulouse, à Marie Laure Chavannes et à Marie Cueff, Co-Présidentes de l'Association SDCS Minor