Cancer du sein chez l'homme : âge, signes d'alerte, quand consulter ?

Le cancer du sein touche quelques centaines d'hommes chaque année en France. Mal connu, il est diagnostiqué plus tardivement que chez la femme ce qui nuit à son pronostic. Symptômes, facteurs de risque, mammographie, traitements... Découverte avec le Pr Eric Solary, président du Conseil scientifique de la Fondation ARC.

Cancer du sein chez l'homme : âge, signes d'alerte, quand consulter ?
© 123rf- repinanatoly

Le cancer du sein ne touche pas que les femmes. Les hommes peuvent aussi le développer surtout quand ils avancent dans l'âge. "Quelques centaines sont touchés chaque année en France" nous informe le Pr Eric Solary, président du Conseil scientifique de la Fondation ARC. Cela représente un peu moins de 1% de l'ensemble des cancers du sein et moins de 1% des cancers de l'homme"C'est une maladie mal connue mais il faut en parler pour améliorer son diagnostic, sa prise en charge et son pronostic." Faisons le point avec ce spécialiste.

Qu'est-ce qu'un cancer du sein chez l'homme ?

Le cancer du sein chez l'homme se localise au même endroit que chez la femme : "L'homme a une glande mammaire comme la femme, rappelle le Pr Solary. Elle est moins développée mais ce tissu peut se transformer en particulier au cours du vieillissement" et dégénérer en cancer. Il existe différents types de cancer du sein mais le plus fréquent chez l'homme est le carcinome canalaire infiltrant. Dans ce cas, les cellules cancéreuses infiltrent le tissu mammaire qui entoure les canaux. Le cancer peut parfois se métastaser.

A quel âge survient-il ?

Le cancer du sein survient plutôt vers la soixantaine chez l'homme avec une propension à monter jusqu'à 70 ans. "La moyenne d'âge au diagnostic est ainsi entre 5 et 10 ans plus élevée que chez la femme" souligne notre interlocuteur.

Quels sont les symptômes ?

Les symptômes du cancer du sein chez l'homme sont relativement analogues à ceux observés chez la femme mais plus négligés chez lui d'où un diagnostic plus tardif. Doivent alerter :

  • une déformation locale au niveau du sein,
  • une grosseur indolore qui apparaît à coté de l'aréole du sein et peut donner une rétraction du mamelon,
  • un ganglion axillaire sous le bras,
  • des écoulements du sein,
  • un changement de la couleur du téton.
schéma cancer sein homme
Schéma anatomique du cancer du sein chez l'homme © 123rf-Journal des Femmes

Quand consulter ?

"Il faut consulter (d'abord le médecin généraliste, ndlr) dès qu'une manifestation locale ou un changement suspect apparaît, répond le Pr Solary, d'autant que chez l'homme il n'y a pas de mammographie de dépistage."  Mais pour consulter, il faut aussi prendre l'habitude de se regarder or "l'homme n'attache pas assez d'importance aux modifications d'aspect de la région mammaire qui peuvent apparaître" regrette le médecin. Résultat : "30% des cancers du sein chez l'homme sont posés dans les trois premiers mois après l'apparition des symptômes, contre 60% chez la femme." 

Comment est-il diagnostiqué ?

Les examens permettant de poser un diagnostic de cancer du sein chez l'homme sont l'échographie et/ou la mammographie. C'est la même technique d'imagerie que chez la femme. En cas de grosseur, une ponction est réalisée à l'aiguille fine puis une biopsie. Un bilan d'extension est également prescrit.

Quels sont les facteurs de risque ?

Plusieurs facteurs de risque ont été mis en évidence dans le cancer du sein chez l'homme :

  • l'âge : le cancer du sein touche surtout les hommes plus âgés, à partir de 60 ans.
  • les antécédents familiaux de cancer du sein (parent proche, tant homme que femme). Le risque augmente en fonction du nombre de parents proches concernés par ce cancer.
  • le facteur génétique : 15% des cancers du sein chez l'homme sont liés à une modification héritée qui concerne le plus souvent le gène BRCA2
  • une cirrhose du foie : "On constate un peu plus de cancer du sein sur un fond de maladies hépatiques, rapporte notre interlocuteur. En fait, tout ce qui touche le foie induit l'augmentation de la production d'œstrogène et la baisse du taux d'androgènes ce qui peut favoriser le développement de cancer du sein."
  • le syndrome de Klinefelter (trouble génétique héréditaire très rare associé à un taux d'androgènes bas et un taux d'oestrogène élevé).
  • une exposition antérieure aux rayonnements ionisants (en particulier au niveau du thorax), 
  • un changement de sexe : "C'est une interrogation, précise d'emblée le Pr Solary, mais les gens qui changent de genre et parfois de sexe reçoivent des injections hormonales. Or, les modifications de l'ambiance hormonale en faveur des œstrogènes pourraient augmenter l'incidence des cancers du sein chez l'homme."

D'autres facteurs de risque sont discutés : la gynécomastie, l'obésité, la consommation d'alcool, la cryptorchidie, un antécédent d'orchidectomie, les oreillons à l'âge adulte, une exposition professionnelle (aciérie, haut fourneau, laminoir, vapeurs d'essence et gaz d'échappement), l'environnement.

Quels sont les traitements ?

Actuellement, les traitements du cancer du sein chez l'homme sont les mêmes que chez la femme :

  • La chirurgie d'abord pour enlever la tumeur. Une mastectomie peut être réalisée selon l'étendue des lésions. La reconstruction mammaire est possible.
  • La radiothérapie/chimiothérapie.
  • Puis l'hormonothérapie "pour empêcher que les cellules cancéreuses reviennent". Le traitement antihormonal dans la plupart des cas est le tamoxifène pour une durée de 5 ans.

A ces traitements de base pourraient s'ajouter des médicaments plus spécifiques : "Il y a un intérêt croissant pour constituer des cohortes de cancers du sein masculins afin d'identifier les traitements qui marchent le mieux chez l'homme et qui seraient différents de ceux de la femme. On pourrait ainsi proposer un traitement plus adapté à l'homme" explique le Pr Solary. Et de poursuivre ; "Il y a des récepteurs hormonaux présents chez l'homme qui sont un peu différents de ceux que l'on a chez la femme. En plus des récepteurs aux œstrogènes, il y a aussi des récepteurs aux androgènes (hormones masculines). Bloquer ces récepteurs est peut-être un moyen d'améliorer les traitements chez l'homme." 

"Socialement, c'est compliqué pour un homme d'admettre qu'il a eu un cancer du sein"

Quel est le pronostic du cancer du sein chez l'homme ?

"Ces cancers réagissent très bien au traitement si on les reconnaît à temps, répond le Pr Solary. Ils ne sont pas de plus mauvais pronostic que ceux de la femme mais ils sont dépistés plus tardivement ce qui fait perdre des chances de guérison. Peut-être que si on les reconnaissait plus vite, on pourrait faire mieux parce qu'histologiquement ce ne sont pas les formes les plus graves." 

Quel suivi après les traitements ?

Comme pour tous les malades soignés d'un cancer, la fin des traitements ne signifie pas l'arrêt du suivi médical. "La question de la vie après le cancer du sein chez l'homme n'est pas neutre, convient notre interlocuteur. Ce sont des gens fragilisés par la maladie, qui ont du mal à admettre socialement qu'ils ont eu un cancer du sein et qui ont en plus un risque de second cancer de 12 à 13%. Ce risque de deuxième cancer (tous confondus, pas seulement au niveau du sein, ndlr) est plus important que dans d'autres populations. Il faut apprendre à les suivre de façon adaptée, longtemps après, pour qu'il retrouve une qualité de vie correcte."

Merci au Pr Eric Solary, président du Conseil scientifique de la Fondation ARC.

Sources :

Dépistage et prévention du cancer du sein. HAS. Février 2015 

Cancer du sein chez l'homme, Institut National du Cancer.

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