Métastases au poumon : symptômes, guérison, survie

Environ 30% des patients atteints d'un cancer (rein, côlon, sein...) développent des métastases au poumon. Symptômes, examens de diagnostic, traitement, chances de survie... Eclairage du Dr Paul Cottu, oncologue à l'Institut Curie.

Métastases au poumon : symptômes, guérison, survie
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Quand une tumeur se développe à un autre endroit que celui où elle est apparue, on appelle cela une métastase. Le plus souvent, un cancer qui devient métastatique envoie des métastases vers certains organes comme le poumon, le cerveau, les os ou le foie. 30% des personnes atteintes d'une tumeur solide (on appelle tumeur solide tous les cancers sauf les leucémies, dont les cellules cancéreuses circulent dans le sang ou la lymphe) développeraient des métastases pulmonaires selon une étude de 2019 publiée dans la Revue Médicale Suisse. Quels sont les symptômes d'alerte des métastases pulmonaires ? Où sont-elles localisées ? Comment les diagnostiquer ? Avec quels traitements les soigner ? Quelles sont les chances de guérison et l'espérance de vie ? Le point avec le Dr Paul Cottu, médecin oncologue à l'Institut Curie. 

Définition : qu'est-ce qu'une métastase pulmonaire ?

"Une métastase pulmonaire est une tumeur qui s'est propagée au poumon" définit en préambule le Dr Paul Cottu, médecin oncologue. La tumeur peut se propager n'importe où dans le poumon. Elle peut coloniser un seul poumon ou les deux. Les cancers qui donnent le plus souvent des métastases pulmonaires sont :

Schéma d'un cancer qui donne des métastases pulmonaires
Schéma d'un cancer qui donne des métastases pulmonaires © Designua - 123RF
  • Le cancer colorectal (une étude de 2017 montre que 5% des patients atteints d'un cancer colorectal vont développer des métastases pulmonaires)
  • Le cancer des os ou les ostéosarcomes (environ 85% des métastases à distance d'un ostéosarcome sont situées dans le poumon)
  • Le cancer du sein
  • Le cancer du rein (carcinome rénal)
  • Les cancers ORL (tête et cou, ou VADS)
  • Le cancer du testicule
  • Le sarcome des tissus mous
  • Le mélanome
  • Le cancer de la thyroïde

>> Attention, un cancer du sein qui donne des métastases au poumon par exemple ne se transforme pas en cancer du poumon. On parler de "cancer du sein métastatique". 

Quelles sont les localisations des métastases au poumon ?

Une tumeur peut métastaser n'importe où dans le poumon ou dans des régions extérieures, mais très proches du poumon. Le plus souvent, elle métastase :

  • près de la paroi pulmonaire,
  • dans les lobes inférieurs du poumon gauche ou droit (ou les deux),
  • dans les lobes supérieurs du poumon gauche ou droit (ou les deux),
  • au niveau de la plèvre et du médiastin.

Quels sont les symptômes des métastases au poumon ?

"Les os, le foie, le poumon et le cerveau sont les organes les plus souvent sujets à métastases", précise l'oncologue. Dans certains cas, une cellule cancéreuse située au niveau du poumon reste longtemps silencieuse et n'entraîne pas de symptômes. Dans d'autres cas, les métastases pulmonaires sont symptomatiques et peuvent entraîner :

  • des épisodes de fièvre,
  • une toux intense et persistante,
  • un essoufflement,
  • des crachats de sang,
  • des douleurs intenses dans la poitrine ou le thorax "surtout si la cellule cancéreuse a atteint la plèvre, l'enveloppe du poumon qui est très innervée", précise le Dr Maurice Pérol, oncologue médical spécialiste des cancers thoraciques au Centre Léon Bérard à Lyon,
  • des infections aux bronches ou aux poumons fréquentes (bronchite, pneumonie...),
  • une perte de poids brutale.

Quelles sont les causes des métastases au poumon ?

Tous les cancers peuvent métastaser, autrement dit, migrer hors de leur emplacement d'origine. Le risque qu'un cancer évolue en cancer métastatique dépend de plusieurs paramètres, notamment : 

  • du type de cancer,
  • de la taille et de l'emplacement du cancer primitif,
  • de la rapidité avec laquelle le cancer primitif se développe,
  • de la probabilité qu'il se propage,
  • du délai de présence de la tumeur primitive dans le corps.

>> A savoir : les métastases peuvent se développer très rapidement ou plusieurs années après le diagnostic initial, tandis que certains cancers ne métastaseront jamais. 

Comment se fait le diagnostic ?

Tout d'abord, un examen clinique permet de faire un bilan des symptômes et de rechercher la présence de métastases. Ensuite, des analyses sanguines (formulation sanguine complète, saturation en oxygène, dosage des marqueurs tumoraux en fonction de chaque patient) permettent de vérifier l'état de santé global du patient, voir s'il y a une insuffisance pulmonaire ou si un cancer primitif s'est propagé aux poumons.

Examens d'imagerie : radio, TDM, TEP...

Ce sont les examens d'imagerie qui vont orienter le diagnostic :

  • Une radiographie des poumons est le premier examen à faire pour déterminer la cause d'une toux persistante ou d'un essoufflement. Elle permet également de déceler la présence de cellules cancéreuses au niveau du poumon. 
  • Une tomodensitométrie (TDM) de la poitrine fournit des images plus précises que la radiographie des poumons et sert à vérifier la présence de métastases pulmonaires, à déterminer avec précision et fiabilité leur taille et leur emplacement. Elle permet également de voir s'il y a des métastases dans les ganglions lymphatiques avoisinants.
  • Une tomographie par émission de positrons des poumons (TEP) permet, grâce à l'utilisation d'une matière radioactive, l'obtention des images en 3D qui aident à savoir jusqu'où la tumeur s'est propagée. 

Biopsie et autres examens

Une bronchoscopie permet d'examiner l'intérieur des bronches et des poumons au moyen d'un endoscope. Enfin, une biopsie permet de confirmer le diagnostic et de préciser la nature de la lésion cancéreuse. Elle repose sur le prélèvement par ponction ou par endoscopie d'un échantillon de tissu suspect. Cet échantillon est ensuite examiné au microscope. Si les métastases pulmonaires sont détectées avant que le cancer primitif n'ait été diagnostiqué, le médecin pourra demander la réalisation d'autres examens afin de déterminer l'emplacement d'origine du cancer primitif et vérifier s'il y a des métastases dans d'autres parties du corps : mammographie si un cancer du sein est suspecté, une TDM de l'abdomen si un cancer colorectal est suspecté, une échographie thyroïdienne si un cancer de la thyroïde est suspecté...  

Quels sont les traitements des métastases au poumon ?

"Le plan de traitements est défini par l'équipe médicale. Il est adapté à chaque patient en fonction de son âge, son état de santé général, ses préférences en termes de traitements, la localisation de sa tumeur primitive, l'étendue, le nombre et la taille des métastases, les symptômes, les traitements déjà reçus..." liste l'oncologue. Ce plan repose sur l'association de plusieurs traitements dont :

>> La chimiothérapie : traitement médicamenteux de référence des métastases pulmonaires, elle permet de réduire la taille des tumeurs et de limiter leur propagation. 

>> Le traitement ciblé qui consiste à administrer des médicaments (qui contiennent certaines protéines) qui ralentissent la croissance et la propagation des métastases pulmonaires. Le choix du médicament dépend de l'emplacement du cancer primitif. Le traitement ciblé est souvent associé à une chimiothérapie.  

>> L'hormonothérapie qui bloque certaines hormones afin de ralentir la croissance de certaines métastases. Ce traitement est particulièrement utilisé si les métastases proviennent d'un cancer du sein ou de la thyroïde.

>> L'immunothérapie permet de renforcer l'immunité du patient : son système immunitaire est davantage capable de détecter les cellules cancéreuses et de les détruire. 

>> La chirurgie consiste à enlever une petite partie du poumon (la tumeur et une petite partie des tissus sains autour des cellules cancéreuses). Cette technique, pratiquée par un chirurgien thoracique, est particulièrement indiquée si les métastases sont isolées (autrement dit si elles ont colonisé qu'une partie du poumon) ainsi que pour traiter des métastases pulmonaires issues d'un cancer colorectal, d'un cancer des os ou d'un sarcome des tissus mous. "Toutes les personnes atteintes de métastases pulmonaires ne peuvent pas avoir recours à la chirurgie. L'indication va dépendre de la taille des métastases, de leur emplacement, de leur nombre et d'autres facteurs liés au patient (âge, antécédents...)", précise l'expert. Le chirurgien peut aussi extraire les métastases par radiofréquence (un courant électrique produit une chaleur capable de détruire la tumeur) ou par laser (un faisceau lumineux de très haute intensité produit une chaleur capable de détruire la tumeur). Il est très rare de faire disparaître complètement des métastases. Néanmoins, les traitements arrivent à les faire régresser et à contrôler leur propagation. 

>> Les traitements de soutien ne traitent pas les métastases mais permettent de soulager certains symptômes associés comme les troubles respiratoires, les crachats de sang ou l'accumulation de liquide dans la plèvre. Cela peut être une oxygénothérapie (en cas de difficultés respiratoires), une thoracentèse (en cas d'épanchement pleural), une radiothérapie externe ou une radiothérapie stéréotaxique (en cas de toux ou de saignements). 

Pronostic : quelles chances de survie en cas de métastases au poumon ?

Les métastases pulmonaires ont un meilleur pronostic que les cancers du poumon. Globalement, "la survie à 5 ans des cancers du poumon tous stades confondus se situe aux alentours de 17-18%", indique le Dr Pérol. Pour les métastases pulmonaires :

  • Le plus vaste recueil de données à ce jour provenant du "International Registry of Lung Metastases" de la Société Européenne de Chirurgie Thoracique, indique qu'un cancer qui s'est propagé aux poumons est lié à une survie de 36% à 5 ans et entre 11 et 34% à 10 ans
  • L'étude "Métastases pulmonaires" publiée en 2017 sur "Swiss Medical Forum" montre que les métastases pulmonaires issues d'un cancer colorectal sont associées à une survie de 45 à 60% à 5 ans et que celles issues d'un carcinome rénal sont associées à une survie d'environ 40% à 5 ans

Merci au Dr Paul Cottu, médecin oncologue à l'Institut Curie à Paris et au Dr Maurice Pérol, oncologue médical spécialiste des cancers thoraciques au Centre Léon Bérard à Lyon.