Cancer de l'oeil : causes, symptômes, peut-on mourir ?
Le cancer de l'œil est une maladie rare qui peut affecter l'enfant comme l'adulte sous des formes différentes. Il faut rapidement repérer ses symptômes.
Le cancer de l'œil - ou plutôt les cancers de l'œil car il en existe plusieurs formes -, sont des maladies rares : de 500 à 600 nouveaux cas par an pour les mélanomes uvéal (surtout chez l'adulte) et de 50 à 60 pour le rétinoblastome (surtout chez l'enfant).
Définition : qu'est-ce qu'un cancer de l'oeil ?
Un cancer de l'oeil peut se développer au niveau de la rétine (rétinoblastome) ou à partir des mélanocytes de l'iris, du corps ciliaire ou de la choroïde dans l'oeil (mélanome uvéal). D'autres cancers peuvent se développer à la surface de l'œil, c'est-à-dire au niveau de la conjonctive ou des paupières et peuvent être aussi bien des mélanomes que des carcinomes. L'œil est aussi un organe qui peut recevoir des métastases d'autres cancers ou des localisations de lymphomes systémiques, principalement le lymphome oculaire primitif.
Quelles sont les causes du cancer de l'oeil ?
Chez l'enfant, le rétinoblastome est lié à une anomalie constitutionnelle du gène RB1, c'est-à-dire d'une mutation présente dans toutes ses cellules. 90% des cas de rétinoblastome se présentent avant l'âge de 3 ans, dont 40% sont héréditaires, suivant une transmissibilité autosomique dominante (du père ou de la mère). "Chez l'adulte, on ne connaît pas les causes du mélanome de la choroïde, explique le Professeure Nathalie Cassoux chef du département d'oncologie chirurgicale et chef de service d'oncologie oculaire à l'Institut Curie. Ce type de cancer n'est pas lié aux ultraviolets contrairement aux mélanomes et carcinomes de la conjonctive." On sait que globalement le cancer de l'œil touche plutôt des personnes blondes, avec les yeux clairs et une peau claire qui ne bronze pas.
"Il n'y a pas de prévention hormis le dépistage précoce et une meilleure sensibilisation aux signes cliniques."
Quels sont les symptômes ?
Chez l'enfant, deux signes fondamentaux doivent faire suspecter un rétinoblastome :
- La leucocorie, c'est à dire un éclat, un reflet blanc ou argenté dans la pupille. "C'est très souvent remarqué par les parents assez tôt parce qu'ils observent beaucoup leur bébé. Il peut aussi être aussi vu par des photos prises au smartphone sans le filtre yeux rouges, explique le Pr. Cassoux. Le problème est que parfois les médecins et ophtalmologistes ne voient pas ce reflet avec l'éclairage du cabinet : il est, en effet, intermittent au départ puis permanent à un stade plus avancé. Un examen ophtalmologique avec un fond de l'œil à pupille dilatée doit être fait dès que les parents observent ce reflet".
- Le strabisme. "Il faut tordre le cou à l'idée reçue selon laquelle le strabisme du bébé c'est normal, insiste le Pr. Cassoux. Ce n'est pas normal. Les deux yeux doivent fixer dans la même direction. Tout strabisme chez le bébé nécessite un examen ophtalmologique complet avec une dilatation du fond de l'oeil."
Détecté précocement, le cancer de l'œil de l'enfant peut donner lieu à traitement conservateur afin de conserver le globe oculaire. face à un diagnostic tardif avec une maladie très avancée, il faut parfois enlever l'œil.
Chez l'adulte, le mélanome de la choroïde se manifeste très souvent par un éclair brillant toujours au même endroit. Ce phosphène doit mener à un examen ophtalmologique complet avec un fond de l'œil avec pupille dilatée. Quand le mélanome évolue et au fur et à mesure que la tumeur grossit, les symptômes sont de plus en plus gênants : flou visuel, amputation du champ visuel, baisse de l'acuité visuelle…
Diagnostic : le fond d'oeil
Le diagnostic passe par un examen ophtalmologique complet et un fond de l'œil avec pupille dilatée. Il n'y a jamais de prélèvement chez l'enfant car d'une part, il y a un risque de faire sortir le rétinoblastome de l'œil et d'autre part, il y a suffisamment de signes cliniques pour faire un diagnostic certain. Pour le mélanome (chez l'adulte) : l'ophtalmologiste réalise également un examen clinique, un fond de l'œil à pupille dilatée et une échographie qui suffisent en général à établir le diagnostic. Dans certains cas de mélanomes, une biopsie est réalisée pour stratifier le cancer et établir le risque de métastases afin d'adapter la surveillance en fonction.
Traitement : comment soigner un cancer de l'oeil ?
Le traitement du cancer de l'œil repose sur des rayons ultra-précis (protons). Il s'agit d'un faisceau qui irradie au millimètre près et qui épargne le reste des tissus. Il y a deux centres de protonthérapie spécialisés en France. La curiethérapie (disque d'iode) peut également être utilisée mais cela est plus rare. La chimiothérapie fait aussi partie des traitements possibles. L'ablation de l'œil est réalisée uniquement pour les grosses tumeurs très avancées.
Le foie, première cible des métastases
Sur le global des tumeurs, le risque de métastase est de 30% à 10 ans. Ce risque dépend de la taille de la tumeur au moment du diagnostic ainsi que de la modification des chromosomes dans la tumeur. Les métastases au foie représentent 80% des métastases du cancer de l'œil. "Il n'y pas de réseau lymphatique dans l'œil, explique le Pr. Cassoux. Les cellules tumorales partent dans la circulation sanguine et, pour une raison que l'on ne connaît pas, elle ont un tropisme dans le foie. Elles s'y arrêtent et se mettent en latence pour se développer 2 à 5 ans après le diagnostic initial". Les patients ne répondent généralement pas à l'immunothérapie ou à la chimiothérapie. Et la chirurgie hépatique et la radiofréquence servent uniquement à allonger la survie.
Pronostic vital : le cancer de l'oeil est-il mortel ?
Aujourd'hui le cancer de l'œil chez l'enfant se soigne à 100% des cas en France. Pour l'adulte, à partir du moment où il y a des métastases, c'est à dire dans 30% des cas, le pronostic est plus difficile et ce cancer peut s'avérer mortel faute de traitements adaptés.
Merci à la professeure Nathalie Cassoux, chef du département d'oncologie chirurgicale et chef de service d'oncologie oculaire à l'Institut Curie.