"Vous avez un cancer" : ce conseil immédiat de spécialistes aide à mieux encaisser la nouvelle

Il n'est jamais simple de réagir à l'annonce d'un cancer. Entretien avec la psychologue Blandine Chemin-Sauque et le Dr Géraldine Lauridant, oncologue médicale.

"Vous avez un cancer" : ce conseil immédiat de spécialistes aide à mieux encaisser la nouvelle
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En une phrase, tout bascule. L'annonce d'un cancer marque la rupture entre la vie d'avant et celle d'après. "C'est toujours un choc", reconnaît le Dr Géraldine Lauridant, oncologue médicale. Conscients de la brutalité de ce moment, les soignants ont mis en place un protocole - le "dispositif d'annonce" - afin que cette étape se déroule dans les meilleures conditions. Institué dans le cadre du Plan Cancer, il comprend plusieurs temps : la consultation médicale puis un entretien avec une infirmière pour reformuler et répondre aux questions. Mais "il y a forcément de la violence dans l'annonce, même lorsque les mots sont choisis avec soin", souligne la psychologue Blandine Chemin-Sauque. Malgré l'accompagnement, cette nouvelle reste un bouleversement. Alors, comment réagir ?

La réaction la plus fréquente lors de l'annonce d'un cancer, c'est la sidération. "La personne est comme dans le brouillard : elle nous entend parler, mais n'enregistre plus", observe le Dr Lauridant. Cet état de choc agit comme un mécanisme de protection : l'information est "tellement au-delà de l'entendable qu'il se produit une forme de scission psychique", explique Blandine Chemin-Sauque. D'après l'oncologue, les patients "ne retiennent qu'environ 15 %" de ce qu'on leur dit. Les soignants en sont conscients. "Je sais que vous n'allez pas tout retenir, et ce n'est pas grave", rassure le Dr Lauridant. Beaucoup décrivent ce moment comme une déconnexion : "J'étais là, mais une partie de ma tête n'y était pas." Ces mécanismes de défense sont naturels et permettent au cerveau d'amortir le choc et d'amorcer l'adaptation.

Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise façon de réagir à l'annonce d'un cancer. Il faut d'abord accepter que "c'est normal d'avoir peur, normal de se sentir angoissé", souligne le Dr Lauridant. Pour traverser ce moment, Blandine Chemin-Sauque explique que le plus important est de "rester ancré dans son corps pour l'aider à réguler l'afflux de stress". C'est-à-dire ? Selon la psychothérapeute, il faut mobiliser ses sens, favoriser une respiration ample et régulière, pousser les pieds au sol et rechercher le contact visuel du médecin, quelles que soient les pensées qui commencent à nous envahir. Et chercher le contact physique avec la personne qui nous accompagne, en lui serrant la main par exemple. "Le contact maintient la personne dans le réel" argue-t-elle. En fin d'entretien, le médecin demande généralement : "Qu'avez-vous compris ? Qu'avez-vous retenu ?" pour s'assurer que les messages essentiels ont bien été intégrés. Là, il est important de raconter ce que que l'on a compris avec ses propres mots. Cela aide à enregistrer et comprendre l'information.

Une fois le choc passé, le corps médical laisse le temps nécessaire au patient pour assimiler la nouvelle. D'autres rendez-vous permettront d'y revenir. Pensez à réfléchir à vos questions, à les noter et à les poser lors du prochain rendez-vous avec votre médecin. Enfin, n'oubliez pas de demander de l'aide à vos proches et de créer un lien de confiance avec l'équipe soignante. "Même si le chemin est incertain, il y a des choses qui demeurent", rappelle la psychologue. Une mauvaise nouvelle reste une mauvaise nouvelle, mais "nous avons les moyens d'agir et de faire face", conclut positivement le Dr Lauridant.

Merci à Blandine Chemin-Sauque, psychologue et thérapeute, co-autrice avec Eloïse Maillot-Nespo de "Quand on devient aidant familial" (éd. Albin Michel). Et merci au Dr Géraldine Lauridant, oncologue médicale du Centre de cancérologie Les Dentellières.