Fuites urinaires pendant le sport : quelles solutions ?
Les fuites urinaires pendant le sport, appelées "incontinence d'effort" touchent davantage les femmes qui pratiquent des sports d'impact (running, danse...). Heureusement, des solutions (et pas que chirurgicales) existent.
Les fuites urinaires ou l'incontinence sportive concernent essentiellement les femmes qui pratiquent un sport d'impact, comme la course à pied, le trampoline ou la danse. "Typiquement, les fuites urinaires touchent les marathoniennes, confesse le Professeur Benoît Peyronnet, chirurgien urologue spécialiste de l'incontinence urinaire au CHU de Rennes et membre de l'Association Française d'Urologie (AFU). A chaque foulée, l'impact est très important. Les sports à impact et les sports impliquants une hyperpression abdominale sont des sports pourvoyeurs d'incontinence chez la femme." Les femmes sont plus touchées que les hommes en raison de leur anatomie. L'urètre féminin est court : il mesure environ 3 cm, une longueur insuffisante pour résister à un impact. La deuxième raison qui fait que les femmes sont plus touchées que les hommes est mécanique, comme l'explique le Dr Peyronnet. Lorsque tout fonctionne normalement, les tissus de soutien de l'urètre, sur la paroi antérieure du vagin, se ferment mécaniquement lors d'une hyperpression, comme la toux, le saut ou le rire. Cependant, certains facteurs, comme la pratique d'un sport, l'obésité, la grossesse ou l'accouchement, participent à abîmer ces tissus de soutènement urétral. Ils deviennent laxes et ne remplissent plus leur rôle de clapets. C'est ainsi qu'arrive l'incontinence à l'effort. C'est une erreur de ne pas penser aux traitements lorsqu'une femme souffre d'incontinence urinaire...
La pose d'un pessaire ou dispositif intra vaginal
Le pessaire est un dispositif intra-vaginal qui est surtout utilisé pour le prolapsus urinaire, plus communément appelé "descente d'organes". Le pessaire est un anneau ou un cube en plastique médical inséré dans le vagin pour maintenir les organes en place. Certaines formes possèdent un renfort sous l'urètre qui peut diminuer les fuites d'urine durant les activités sportives. Toutefois l'incontinence urinaire chez la sportive n'est pas l'indication première du pessaire. Par ailleurs, selon le spécialiste, ce type de dispositif peut être assez pénible et lourd chez une jeune femme. "Chez elles, nous utilisons plutôt le dispositif Diveen®, un dispositif intravaginal pensé pour les jeunes femmes sportives. Muni d'un anneau en silicone, il se place comme un tampon hygiénique pendant la pratique du sport, pour éviter les fuites urinaires", explique notre interlocuteur.
L'électrostimulation du périnée
L'électrostimulateur périnéal est un dispositif médical relié à une sonde qui stimule les muscles du périnée. Cette technique, indolore, permet de renforcer le plancher pelvien et de lutter contre l'incontinence d'effort. "L'électrostimulation vaginale doit être envisagée comme l'une des méthodes de rééducation. Elle a démontré scientifiquement son efficacité au sein d'un programme de rééducation, en complément d'autres méthodes. Seule, elle n'a jamais démontré de bénéfices", prévient-il.
La technique du biofeedback
La technique du biofeedback est aussi une méthode de rééducation qui consiste à établir un lien entre le corps et l'esprit afin de créer une interaction entre les deux. "La sonde intravaginale contrôle le degré de contraction musculaire. Le professionnel demande à la patiente de visualiser quand le plancher pelvien est contracté, afin de l'aider à muscler son périnée. Le biofeedback n'implique pas d'électrostimulation, il s'agit plutôt de l'enregistrement de l'activité musculaire", décrit notre expert.
La kinésithérapie pour rééduquer le plancher pelvien
La rééducation périnéale et pelvienne est une approche complémentaire et naturelle qui peut s'avérer efficace en cas d'incontinence d'effort. Le kinésithérapie du plancher pelvien consiste à réaliser des exercices alternants contractions et relâchements des muscles pelviens. "La kinésithérapie périnéale fonctionne plutôt bien chez les femmes assez jeunes", indique le chirurgien urologue.
Des protections hygiéniques spéciales
Le port de protection hygiénique est une solution transitoire, mais qui ne va pas résoudre le problème des fuites urinaires lors de la pratique d'un sport. "Cette solution est coûteuse, peu écologique, et très inconfortable pour la patiente. Sur le plan hygiénique, la macération urinaire peut provoquer des irritations cutanées. Le port de protection hygiénique n'est vraiment pas une solution idéale pour la patiente", explique le docteur Peyronnet.
Le cône vaginal
Le cône vaginal ou poids vaginal aide les femmes à muscler le plancher pelvien. Les cônes vaginaux sont des dispositifs qui se placent au niveau du vagin et pouvant être utilisés à la maison, lors des exercices de rééducation périnéale. "Selon moi, le cône vaginal est un petit complément à la rééducation pour avoir moins de fuites, en favorisant la contraction du périnée. Seule, ce n'est pas une solution efficace sur le long terme", indique le médecin.
La chirurgie de l'incontinence de l'effort : la bandelette sous-urétrale
Le traitement chirurgical de l'incontinence sportive consiste en la mise en place d'une bandelette sous-urétrale. "La bandelette se présente sous forme d'un filet en polypropylène placé sous le canal urinaire au moyen d'une petite incision vaginale. La pose de la bandelette est une intervention simple et rapide, qui se pratique en chirurgie ambulatoire. Depuis une trentaine d'années, cette chirurgie montre une excellente efficacité dans ce type d'incontinence". Comme le souligne le Dr Peyronnet, il existe une controverse en ce qui concerne cette technique chirurgicale. Globalement, c'est une méthode très bien tolérée. Les complications sont très rares, mais elles peuvent être sévères et invalidantes pour les patientes. "En pratique, on peut observer des cas d'érosion, avec la bandelette qui migre dans l'urètre ou dans la vessie, ou qui est rejetée au niveau du vagin, explique le chirurgien urologue. L'autre problématique rare est l'apparition de douleurs neuropathiques importantes et difficiles à prendre en charge. Ces complications nécessitent le retrait de la bandelette. Sur les 217 000 bandelettes sous-urétrales posées en France entre 2013 et 2022, 2,7 % des patientes ont dû retirer la bandelette dans les 10 premières années suivant la pose. Aujourd'hui, il existe un arrêté, datant d'octobre 2020, encadrant strictement l'utilisation des bandelettes sous urétrales en France de façon à minimiser au maximum ce risque de complications. Cette technique chirurgicale est donc régulée en France, mais aussi discutée avant d'être réalisée, les alternatives devant être clairement exposées à la patiente."
La bandelette autologue
D'autres techniques chirurgicales existent pour soigner l'incontinence de l'effort, comme la bandelette autologue. "L'objectif est de renforcer le soutènement urétral en prélevant un peu de tissus musculaires de la patiente, puis en le plaçant sous l'urètre. Toutefois, le prélèvement musculaire peut créer des douleurs. Par ailleurs, nous sommes obligés d'obstruer un peu plus le canal urinaire. Par conséquent, les patientes peuvent rencontrer des difficultés pour vider leur vessie. Parfois, une sonde est nécessaire pour l'écoulement urinaire. Ces problématiques sont in fine plus fréquentes que les complications suite à la pose d'une bandelette en polypropylène", détaille le chirurgien.
Les ballonnets péri urétraux et le sphincter artificiel urinaire
Ces dispositifs en silicone ont démontré leur efficacité. Ils sont toutefois réservés à des formes sévères d'incontinence urinaire d'effort et sont rarement utilisés en première intention.
Les agents de comblement
L'autre alternative pour les fuites urinaires de l'effort est le comblement. "Nous injectons un gel dans le canal urinaire pour le renforcer. Cette intervention est assez facile et nous rencontrons rarement des problèmes. Toutefois, cette technique est moins efficace que les bandelettes, surtout chez les jeunes femmes sportives".
Un traitement hormonal vaginal
D'après le Professeur Peyronnet, les traitements hormonaux locaux ont démontré une efficacité scientifique uniquement chez la femme ménopausée, particulièrement en cas d'atrophie des tissus de la vulve et du vagin. Ce traitement topique (local) consiste en l'insertion d'ovule ou application de crème plusieurs fois par semaine au niveau du vagin.
Merci au Professeur Benoît Peyronnet, chirurgien urologue spécialiste de l'incontinence urinaire au CHU de Rennes et membre de l'Association Française d'Urologie (AFU).