Causes d'un mal de tête, d'une migraine : stress, dents, plus graves ?
Une personne sur cinq serait migraineuse et un bon nombre d'adultes souffrent de céphalées de tension, vulgairement appelées "maux de tête". Stress, problèmes dentaires ou de sinus, fatigue des yeux... Qu'est-ce qui se cache derrière un mal de tête ? Quand penser à une cause plus grave ?
On distingue deux grandes catégories de maux de tête : la migraine et la céphalée de tension.
► La migraine : elle se manifeste par des crises répétées qui peuvent durer entre une demi-journée et 3 jours. "La migraine est reconnue comme une maladie depuis 1999 seulement. Une personne sur 5 dans le monde serait migraineuse, cela représente quand même 1.4 milliard de personnes !" précise d'emblée Marie-Paule Lagrange, psychologue psychothérapeute, spécialiste de l'aide au traitement des céphalées chroniques, Fondatrice et Directrice de l'Institut du Mal de Tête à Paris. Lors d'une crise de migraine, la personne ressent une forte douleur à la tête, souvent d'un seul côté, à droite ou à gauche de la tête (d'où son nom mi = moitié, graine = déformation du mot crâne). La douleur s'attaque le plus souvent à des points bien particuliers (tempe, arcade sourcilière, derrière les yeux, derrière le bas de la tête...), est souvent pulsatile (battante), et la crise de migraine peut présenter d'autres symptômes comme des vertiges, des nausées, des vomissements, une intolérance à la lumière ou au bruit. La migraine est également accompagnée d'une incapacité à se concentrer et comme un blocage de la volonté de "faire quelque chose".
► La céphalée de tension : elle se manifeste par des douleurs permanentes du matin au soir, d'une intensité constante ou s'accentuant tout au long de la journée. La douleur d'une céphalée de tension est plus diffuse que celle de la migraine, peu ou moyennement intense et sans signes digestifs associés comme des nausées ou des vomissements. "On peut travailler avec une céphalée de tension mais ce qui est désespérant, c'est que cette douleur même d'intensité moyenne, est là tous les jours et ne s'en va jamais. Lors d'une céphalée de tension, la douleur s'installe et ne s'en va plus jusqu'à ce que l'on s'endorme", observe notre interlocutrice.
Selon notre interlocutrice, il n'existe pas de statistiques connues sur le nombre de personnes souffrant de céphalées de tension.
Mais elle nous confie qu'elle termine actuellement une analyse d'une cinquantaine de cas venus consulter pour des céphalées de tension. "En analysant les données de mes patients, j'ai remarqué que la céphalée de tension s'installait souvent sur un petit terrain migraineux. Et si l'on interroge un peu longuement le patient, on s'aperçoit que ces petits maux de tête étaient en fait des migraines légères passées inaperçues ou que la plainte était discrète par rapport à l'importance de la douleur, constate la fondatrice et directrice de l'Institut du Mal de Tête et auteure du livre "Maux de tête chronique : comment les soigner", aux Editions Ellebore.
Quelles sont les causes de la migraine ?
La migraine est une maladie génétique. Elle n'est pas une manifestation psychosomatique. "Il n'existe pas un gène de la migraine, mais une susceptibilité qui dépend de l'association de plusieurs variants génétiques : plus d'une douzaine de gènes de susceptibilité à la migraine ont été identifiés depuis 2010", indique l'Inserm sur son site internet. La migraine est caractérisée par une inflammation du nerf trijumeau qui est composé de trois paires de branches :
- la paire des deux nerfs ophtalmiques (les migraineux ont très mal autour et derrière les yeux, à l'arcade sourcilière),
- la paire des deux nerfs maxillo-faciaux (les migraineux se plaignent d'avoir mal aux mâchoires et au niveau du haut du nez)
- la paire des deux nerfs qui génèrent une douleur à la base du crâne pour envahir toute la zone occipitale.
Les vaisseaux sanguins proches de ces nerfs se dilatent et c'est cette dilatation qui engendre la douleur en des points bien précis de la tête. La migraine a donc un caractère génétique, mais certains facteurs entraînant un changement physiologique chez la personne favorisent le déclenchement d'une crise de migraine. Il peut s'agir :
→ D'un changement de rythme (surmenage ou effort physique inhabituel suivi d'un relâchement, le fait de partir en voyage...) "On connaît bien la migraine du weekend qui survient après une semaine de travail et de tension nerveuse et qui se déclenche au moment où on se relâche", décrit Marie-Paule Lagrange.
→ Des variations hormonales menstruelles. "Chez la femme, la crise de migraine est plus fréquente dans la période des règles et/ou celle de l'ovulation, deux périodes marquées par la chute des œstrogènes qui entraîne un changement physiologique important dans l'organisme", indique notre interlocutrice.
→ D'une exposition sensorielle à la lumière, au bruit ou à certaines odeurs
→ De variations émotionnelles (positives ou négatives) lors de "la survenue d’événements", c'est-à-dire de situations non quotidiennes, par exemple : aller au restaurant avec des amis alors que ce n'est pas habituel.
Actuellement, il n'existe pas de traitement curatif de la migraine, c'est à dire qui supprime complètement la maladie. La prise en charge de la maladie repose sur l'identification des symptômes, puis sur le fait d'éviter certains des facteurs déclenchants, quand c'est possible. Et bien entendu, sur le fait de suivre l'ordonnance du médecin. "Par exemple il est difficile d'éviter la migraine du week-end, ou bien on ne peut pas interdire à toutes les migraineux d'aller au restaurant ou au match de foot. C'est pourquoi il vaut mieux apprendre au patient à reconnaître à temps les symptômes de la crise de migraine dès qu'elle survient afin d'en stopper le développement avant que la douleur devienne envahissante et handicapante. Pour cela il existe des traitements de crise très performants, fruit d'un travail scientifique tout à fait remarquable. Il est d'ailleurs dommage que ces substances et leur utilisation soient si mal connues des migraineux et du corps médical", regrette Marie-Paule Lagrange.
Quelles sont les causes d'une céphalée de tension ?
Pour poser un diagnostic, le médecin procède à un interrogatoire détaillé afin d'en savoir plus sur le mode d'apparition du mal de tête, les facteurs déclenchants, les caractéristiques de la douleur ressentie, les symptômes associés... Cet interrogatoire pourra ensuite être complété par d'autres examens (sanguins, dentaires, ophtalmologiques...), une radiographie des sinus ou une imagerie cérébrale par exemple. |
Un excès de stress
La céphalée de tension peut survenir suite à un stress accru, au travail par exemple. "Le stress crée des tensions musculaires qui, récupérées par les nerfs de la tête engendrent la douleur. Le stress peut aussi augmenter les sécrétions acides, qui remontant dans les voies aériennes supérieures, provoquent un mal de tête, explique notre interlocutrice.
La céphalée de tension peut également s'installer chez certaines personnes, qui ont connu un événement douloureux par le passé, et qui des années plus tard vont être confrontées à un autre événement qui fait écho au premier". C'est donc dans l'histoire de la vie du patient qu'il faudra rechercher la cause du déclenchement de la céphalée de tension et cela seul suffirait à justifier la nécessité de faire appel au psychothérapeute, en appui aux médecins, pour soulager un patient. "La neurologie et l'otorhinolaryngologie (ORL) sont les deux spécialités médicales qui peuvent être appelées pour soulager une céphalée de tension. Mais dans les deux cas c'est toujours le stress, l'accumulation de stress ou l'anxiété qui est à l'origine de la céphalée de tension, précise notre interlocutrice. Le psychologue a donc un rôle éminent à jouer auprès de ces personnes. Le patient sait qu'il va pouvoir s'exprimer longuement avec cette personne et il en a vraiment besoin depuis le temps qu'il va de médecin en service d'hôpital, sans que l'on ne trouve jamais rien à l'examen clinique ou à l'imagerie médicale. Parce que s'il y a un stress, c'est qu'il y a dans l'histoire du patient un problème psychologique qui s'est installé au fil du temps et qui le rend plus sensible à certaines attitudes ou comportements des uns ou des autres."
Un problème neurologique et musculaire
Lorsqu'on est stressé(e), les muscles du cou, des épaules ou du dos se tendent et cela peut créer des nœuds neuro-musculaires douloureux. La douleur remonte par les nerfs du dos jusqu'à la tête. "La céphalée est "en étau" ou "en casque", c'est-à-dire qu'elle prend toute la tête. Les traitements varient avec les médecins. La céphalée de tension peut être soignée par des antiépileptiques administrés à petite dose puisqu'il s'agit de détendre les muscles, et/ou par des anti-dépresseurs et d'autres psychotropes comme les anxiolytiques dont le rôle sera alors de s'attaquer aux causes du stress et non aux conséquences", explique la psychothérapeute.
→ Bon à savoir : "Le stress n'est pas seulement psychologique, il peut être aussi physiologique en raison de mauvaises postures notamment au travail (avec l'usage quasi permanent d'un ordinateur) ou à la maison lors de l'exécution de certaines tâches ménagères", explique-t-elle. Des séances de kinésithérapie, des massages ou la rééducation fonctionnelle qui vous apprend à exécuter correctement les mouvements de la vie quotidienne peuvent être extrêmement efficaces.
Une sinusite
Un mal de tête est souvent causé par une infection bactérienne : la sinusite (les douleurs sont alors localisées dans la zone des sinus frontaux). "Dans la céphalée chronique, c'est l'excès de stress qui va déclencher l'apparition du mal de tête permanent. Lorsque l'on est stressé, l'estomac fabrique plus d'acidité que nécessaire à la digestion. L'acidité remonte par l'œsophage jusque dans les voies aériennes supérieures (remontées acides). Or ,comme on le sait l'acide, ça brûle. En médecine on parle plutôt de déshydratation. Les voies nasales sont déshydratées et les muqueuses internes s'épaississent. L'air ne peut plus passer dans les sinus qui sont des cavités remplies d'air nécessaires à la respiration et cela va créer une surpression qui entraîne un mal de tête", explique la psychologue. Il s'agit de céphalées par déshydratation des voies aériennes supérieures. Cela doit amener à consulter un médecin ORL. "En fonction du diagnostic, le médecin pourra prescrire des pulvérisations d'eau de mer largement diluée dans le nez pour réhydrater les muqueuses nasales (puisque que le sel retient l'eau). L'ORL vous donnera également des conseils hygiéno-diététiques comme le fait de boire au moins 2L d'eau par jour, de ne pas manger de crudités ou d'aliments acides (vinaigre, fruits par exemple) le soir au dîner et de dormir légèrement incliné pour éviter les remontées acides", explique Marie-Paule Lagrange.
Une douleur dans la mâchoire
Une douleur dans la mâchoire ou dans le cou peut déclencher une céphalée, puisque les articulations de la mâchoire sont reliées au nerf maxillo-facial, pouvant être responsable de maux de tête. "Il arrive alors que l'on se plaigne d'avoir mal aux dents. On accuse alors une dent cariée, mais le dentiste ne constate rien d'anormal. Il faut alors penser que c'est peut-être le nerf maxillo-facial qui vous fait souffrir pour cause de migraine. C'est alors le domaine du neurologue", tient à préciser notre interlocutrice. Un défaut d'occlusion dentaire peut aussi engendrer des maux de tête, le dentiste ou l'orthodontiste peuvent réparer cela, en particulier en proposant une gouttière, petite pièce plastique adaptée à votre mâchoire, qui vous évitera de grincer des dents la nuit (ce qu'on appelle le bruxisme) et vous apportera une meilleure détente pendant le sommeil.
Une fatigue des yeux
La fatigue visuelle, "qu'il ne faut pas confondre avec la douleur oculaire de la migraine" peut être due à un manque de sommeil ou à des troubles de la vision qui ne sont pas corrigés et qui peuvent ainsi entraîner des maux de tête particulièrement en fin de journée. Il est donc conseillé de vérifier régulièrement sa vue pour avoir une correction adaptée.
Causes graves : quand s'inquiéter ?
Attention, une douleur anormalement intense, qui survient brutalement chez une personne n'ayant jamais connu de maux de tête auparavant est une urgence et nécessite un avis médical afin d'écarter une cause grave comme un accident vasculaire cérébral (AVC), une rupture d'anévrisme, une hémorragie méningée (présence de sang dans les méninges), une méningite ou une hypertension intracrânienne.
Merci à Marie-Paule Lagrange, psychologue spécialisée dans l'aide au traitement de la migraine et des céphalées de tension, fondatrice et directrice de l'Institut du mal de tête à Paris.