Sarcome utérin : diagnostic, traitement, quelle survie ?

Un sarcome utérin est une tumeur maligne de la paroi de l'utérus. Il s'agit d'un cancer rare (moins de 200 cas en France par an). Traité avec une chirurgie inadapté, son pronostic est sombre. Symptômes, cause, âge d'apparition, diagnostic et traitement avec le Pr Sylvie Bonvalot, chirurgienne à l'Institut Curie.

Sarcome utérin : diagnostic, traitement, quelle survie ?
© henadzipechan - 123RF

Le sarcome est un cancer qui se développe au niveau des tissus de soutien qui relient les différentes structures du corps ou constituent la paroi des organes. On parle de sarcome utérin quand la tumeur est située au niveau de la paroi utérine. Ce cancer est rare en France avec 100 à 200 cas par an. Le traitement de la tumeur repose sur la chirurgie (ablation totale de l'utérus). Or, une chirurgie inadaptée ou partielle aggrave considérablement le pronostic. Une étude initiée par le Pr Sylvie Bonvalot, chirurgienne, spécialiste des sarcomes à l'Institut Curie montre l'efficacité d'une nouvelle méthode diagnostique pour proposer une chirurgie personnalisée et adaptée aux femmes. Comment un sarcome utérin est-il diagnostiqué ? Entraîne-t-il des symptômes ? Connaît-on ses causes d'apparition ? Quel est le traitement de référence ? Le pronostic de survie ? Eclairage avec le Pr Sylvie Bonvalot.

Définition : c'est quoi un sarcome utérin ?

"Un sarcome est un cancer qui se développe au niveau des tissus conjonctifs", indique d'emblée le Pr Bonvalot. Les tissus conjonctifs sont des tissus qui servent de soutien, d'emballage, de protection ou de remplissage aux autres organes du corps. On parle de sarcome utérin quand la tumeur est située au niveau de la paroi utérine. Il s'agit d'une tumeur maligne. Toutefois, à la différence des fibromes utérins qui sont les tumeurs de la paroi utérine les plus fréquentes, le sarcome utérin est un cancer rare.

Quels sont les symptômes d'un sarcome utérin ?

Un sarcome utérin se présente comme une "boule" ou une masse. Elle n'est pas toujours ressentie par la patiente et la plupart du temps, elle est indolore, sauf si elle comprime un organe. Des saignements utérins anormaux, une douleur ou une masse pelvienne, peuvent être observés. 

Quelle est la cause d'apparition d'un sarcome ?

On ne connaît pas encore la cause d'un sarcome utérin. En revanche, des facteurs favoriseraient la survenue de sarcomes : 

  • des maladies génétiques rares comme : rétinoblastome, syndrome de Werner, maladie de Recklinghausen, syndrome de Li–Fraumeni…
  • l'exposition à des irradiations (radiothérapie)

Quel est l'âge moyen d'apparition d'un sarcome utérin ?

L'âge moyen du diagnostic d'un sarcome utérin est de 55 ans avec 30% des patientes ont moins de 50 ans. 

Que signifie le grade d'un sarcome utérin ?

Les sarcomes de bas grade sont des tumeurs qu'on parvient à guérir avec une chirurgie adaptée et bien faite. Les sarcomes de haut grade sont des tumeurs qui ont tendance à se développer rapidement et qui sont plus susceptibles de se propager : "Il y a un risque métastatique élevé (plus de la moitié des sarcomes de haut grade (grade III) donnent des métastases. Ce sont des métastases pulmonaires si la chirurgie a été faite dans les règles, ou des métastases pulmonaires avec une récidive péritonéale (dans la cavité abdominale) s'il y a eu une ouverture de la tumeur", indique le Pr Bonvalot.

Comment pose-t-on le diagnostic d'un sarcome utérin ?

La plupart des sarcomes utérins sont diagnostiqués au microscope après une hystérectomie (ablation de l'utérus) ou une myomectomie (ablation de la tumeur). L'opération est donc réalisée sans diagnostic préalable de malignité. "Cela pose un problème car chez les femmes ménopausées, certaines techniques d'hystérectomie fragmentent la tumeur et la dissémine. Le pronostic évolue ainsi très défavorablement et le risque de rechute est élevé et à l'inverse, chez les femmes jeunes dont l'IRM est en faveur d'un sarcome, on risque de faire une hystérectomie inutile (elles ne peuvent plus concevoir d'enfant ensuite, ndlr) si le diagnostic final est une tumeur bénigne" explique le Pr Bonvalot. Le diagnostic préopératoire n'est pas facile et repose actuellement sur l'imagerie par résonance magnétique (IRM) pelvienne. "L'imagerie des fibromes utérins est complexe pour les radiologues, car même avec l'IRM, il est parfois difficile de faire la différence entre les tumeurs bénignes et les malignes", explique le Dr Jeremy Smadja, radiologue à l'Institut Curie. Un diagnostic préopératoire très précis de ces tumeurs est primordial pour proposer une chirurgie adaptée à chaque situation : chirurgie conservatrice (myomectomie) ou chirurgie totale (hystérectomie). "Surtout qu'il s'agit d'un sarcome utérin (leiomyosarcome) et non d'un fibrome utérin qu'une fois sur 400 !" rappelle le Pr Bonvalot.

Une biopsie pour éviter une opération parfois inutile.

Elle a lancé l'étude d'une nouvelle méthode diagnostique basée sur la réalisation d'une biopsie (petit prélèvement à l'aiguille) avant l'opération, qui offre une précision de 100%. Dans le détail, cette méthode innovante combine biopsie, analyse anatomopathologique et technique de biologie moléculaire et permet de réaliser des diagnostics préopératoires très précis, pour ainsi proposer des chirurgies personnalisées, et dans certains cas éviter des hystérectomies inutiles. "Après une IRM suspecte de tumeur maligne sur la paroi de l'utérus, il sera désormais recommandé de réaliser cet examen supplémentaire. D'autre part, on a démontré que cette biopsie n'entraînait aucune complication (pas de diffusion dans la cavité péritonéale), précise la spécialiste. C'est beaucoup plus pertinent, individuellement et collectivement, de faire un traitement personnalisé bien adapté, plutôt que de rattraper une chirurgie inadaptée. Aussi, les sarcomes sont des tumeurs complexes et il est recommandé de traiter ces patientes dès le diagnostic dans des centres spécialisés et experts de ces tumeurs". Efficace et sûre, cette nouvelle approche diagnostique, déjà pratiquée à l'Institut Curie, fera progressivement partie des standards de prise en charge en France courant 2023.

► Chez la femme ménopausée, une chirurgie partielle de l'utérus réalisée sans diagnostic préalable de malignité entraîne une fragmentation de la tumeur et donc de dissémination, ce qui entraine des métastases dans la cavité abdominale et aggrave considérablement le pronostic. Faire une biopsie avant l'opération chez la femme plus âgée, permet donc de réaliser une hystérectomie mais avec une technique d'hystérectomie adaptée au sarcome. 

► Chez la femme en âge de procréer, une hystérectomie faite sans diagnostic préalable de malignité entraîne risque de geste radical inutile, particulièrement dramatique pour les femmes jeunes souhaitant une grossesse. Faire une biopsie chez la femme jeune permet donc de conserver la possibilité d'avoir un projet de grossesse et d'éviter les hystérectomies inutiles. 

Quel est le traitement d'un sarcome utérin ?

"Le traitement de la tumeur initiale est la chirurgie (ablation de l'utérus partielle ou totale) en première intentionEn revanche, en cas de rechute (ce qui se passe entre autre quand la tumeur est fragmentée lors de l'hystérectomie, mais aussi si la tumeur est de haut grade), on a recours à la chimiothérapie", explique notre interlocutrice. Grâce à la biopsie qui détermine avec précision le type de tumeur, on peut adapter la stratégie thérapeutique en fonction du diagnostic pré-opératoire :

  • chez les femmes ayant une tumeur bénigne : traitement conservateur médical ou chirurgie conservatrice (myomectomie).
  • chez les femmes ayant un sarcome : chirurgie totale en un bloc avec une marge de tissu sain sur le vagin (hystérectomie).

Quel pronostic de survie en cas de sarcome utérin ?

Si la chirurgie est adaptée et bien réalisée, les sarcomes de grade I et II sont curables. Le pronostic des femmes atteintes d'un sarcome utérin dépend principalement de l'étendue et du grade de la maladie au moment du diagnostic. A titre d'information, une étude du National Cancer Institute rapporte actuellement un taux de survie à 5 ans des femmes atteintes d'une maladie de stade I d'environ 50 %, contre 20 à 0% pour les autres stades. 

Merci au Pr Sylvie Bonvalot, chirurgien oncologue, spécialiste des sarcomes des tissus mous à l'Institut Curie.

*Cette étude initiée par le Pr Sylvie Bonvalot, chirurgienne, spécialiste des sarcomes à l'Institut Curie a été présentée le 10 septembre 2022 à l'ESMO par le Dr Jeremy Smadja, radiologue à l'Institut Curie. Elle a été menée sur 34 patientes présumées porteuses d'une tumeur utérine maligne lors de la réunion de concertation pluridisciplinaire et justifiant en théorie d'une hystérectomie.