Rétention d'urine chronique : causes, homme, femme, traitement
On parle de rétention chronique d'urine (RCU) lorsqu'une personne est incapable de vider complètement sa vessie. Quelles sont les causes chez la femme ? Chez l'homme ? Quels sont les symptômes ? Le diagnostic et le traitement ? Réponses du Pr Yves Neuzillet, chirurgien-urologue.
Définition : qu'est-ce qu'une rétention d'urine chronique ?
Une rétention chronique d'urine est à bien distinguer d'une rétention aiguë d'urine. La rétention aiguë d'urine (RAU) est l'incapacité douloureuse qu'éprouve un individu à uriner malgré le fait que sa vessie soit pleine. Quant à la rétention chronique d'urine (RCU), elle se présente comme une vidange incomplète de la vessie avec un restant d'urines après la miction, appelé résidu post-mictionnel. La rétention chronique d'urine se définit par un résidu post-mictionnel supérieur ou égale à 300 ml sur deux examens réalisés à 6 mois d'intervalle. "Lorsqu'une rétention aiguë d'urine n'est pas traitée, elle devient chronique, décrit le Pr Yves Neuzillet, chirurgien urologue à l'hôpital Foch à Suresnes. Lorsque le muscle de la vessie a subi une rétention aiguë d'urine on lui laisse le temps de récupérer, si ce n'est pas le cas on procède à un traitement palliatif de la rétention d'urine chronique".
Quelles causes chez la femme ?
Une rétention d'urine chronique chez la femme peut être liée à une sténose de l'urètre (obstruction sous-vésicale) ou à une hypo-contractilité vésicale. "La vessie est un muscle qui se contracte pour se vider. Lorsque le muscle devient faible avec l'âge ou à force de combattre un obstacle ou encore à cause de traitements médicamenteux (anti-cholinergiques utilisés par les urologues pour traiter une hyper-activité vésicale, antalgiques puissants dont la morphine, péridurale), la vidange vésicale se fait moins bien" explique le chirurgien-urologue.
Quelles causes chez l'homme ?
Chez l'homme, la rétention d'urine chronique a pour origine dans la majorité des cas une hypertrophie bénigne de la prostate. Les autres causes sont, comme pour les femmes, une sténose urétrale, une hypo-contractilité vésicale, la prise de certains traitements médicamenteux. "Un traumatisme au niveau de la moelle épinière peut également entraîner une perte de contrôle de la vessie et une rétention d'urine chronique chez l'homme et la femme" ajoute le Pr Neuzillet.
Quels sont les symptômes ?
La difficulté à vider sa vessie est le premier signal d'alarme !
Les symptômes de la rétention chronique d'urine sont :
- une dysurie : du mal à vider sa vessie, le signal d'alarme numéro 1
- des fuites par regorgement : la vessie déborde
- parfois en cas de résidu important, une masse palpable sur la partie basse de l'abdomen. "C'est le globe vésical, la vessie est distendue" précise le Pr Neuzillet.
Quelles sont les conséquences ?
Si une rétention chronique d'urine n'est pas traitée, il y a un risque d'infection des urines et d'incontinence. "Lorsque la vessie ne se vide pas bien, elle peut regorger, les urines déborder, et les personnes vont avoir des pertes d'urine à l'effort, en toussant par exemple" complète le Pr Neuzillet. Une autre complication plus rare de la rétention chronique d'urine est l'apparition de calculs. "Si les urines stagnent dans la vessie on peut avoir une accumulation de cristaux" explique le chirurgien urologue. La plus grave conséquence (à un stade avancé) est un reflux vésico-rénal, lorsque l'urine remonte de la vessie vers le rein, avec un risque d'insuffisance rénale.
Quel est le diagnostic ?
Le diagnostic est avant tout clinique. "S'il y a un doute, l'échographie de l'appareil urinaire permet de faire le diagnostic et de voir s'il y a un retentissement sur l'appareil urinaire supérieur (uretères, reins). L'urologue peut également réaliser une débimétrie mictionnelle, examen qui permet de mesurer la force du jet d'urine ou encore une fibroscopie vésicale pour voir ce qui se passe dans le canal de l'urètre" décrit le Pr Neuzillet.
Quels sont les traitements ?
Le traitement de la rétention chronique d'urine repose sur des auto-sondages et une intervention chirurgicale lorsqu'il y a un obstacle sur les voies urinaires. Les rétentions chroniques d'urine se traitaient auparavant avec une sonde vésicale à demeure. Cela ne doit plus être le cas aujourd'hui car c'est une technique qui entraîne une importante morbidité. "La sonde vésicale à demeure diminue l'autonomie des personnes âgées, en outre c'est une porte d'entrée pour les microbes. Elle multiplie par 5 le risque d'infection urinaire fébrile" explique le Pr Neuzillet. L'alternative qui se développe ce sont les auto-sondages. "Les patients se mettent eux-mêmes une sonde dans l'urètre pour vider leur vessie autant de fois par jour que les mictions normales" décrit le chirurgien urologue, précisant que les sondes d'auto-sondage ont progressé. Elles sont maintenant pré-lubrifiées et ne demandent plus d'utiliser un lubrifiant en plus. Cet auto-sondage demande une éducation thérapeutique de la personne qui doit le faire. "Les personnes qui doivent faire ces auto-sondages ne doivent pas être angoissées. Ce geste va éviter des problèmes plutôt que d'en créer. En cas d'hypertrophie bénigne de la prostate, des alpha-bloquants sont prescrits pour relâcher le col de la vessie. Une sténose du canal de l'urètre se traite de façon chirurgicale en passant par les voies naturelles le plus souvent", tient à rassurer le Pr Neuzillet.
Merci au Pr Yves Neuzillet, chirurgien urologue à l'hôpital Foch à Suresnes.