Syndrome de Guillain-Barré : transmission, contagieux ?
Le syndrome de Guillain-Barré est une affection d'origine neurologique, non contagieux, qui paralyse les membres et qui entraîne des symptômes assez impressionnants. A cause de quoi ? Quels sont les risques ?
Depuis le 8 juillet 2023 et ce pour une durée de 3 mois, un état d'urgence sanitaire est déclaré au Pérou. En cause : une hausse "inhabituelle" des cas de syndrome de Guillain-Barré, une affection rare dans laquelle le système immunitaire du patient attaque les nerfs périphériques. "Guillain-Barré se présente chaque année et il y a eu une augmentation importante ces dernières semaines qui nous oblige à agir en tant qu'État pour protéger la santé et la vie de la population", a déclaré le ministre de la Santé péruvien cité par Le Point.
C'est quoi le syndrome de Guillain-Barré ?
Le syndrome de Guillain-Barré, également appelé polyradiculonévrite démyélinisante aigüe, est une atteinte des nerfs périphériques, et plus précisément de leur gaine de myéline. "C'est une urgence médicale parce qu'il s'agit d'une atteinte rapidement extensive des nerfs qui partent du cerveau et de la moelle épinière pour aller dans toutes les régions du corps (le système nerveux périphérique)" nous explique le Pr Mathieu Zuber, chef du service de neurologie à l'hôpital Saint Joseph (Paris). Ce syndrome touche des sujets jeunes le plus souvent, aussi bien des hommes que des femmes.
Le syndrome de Guillain-Barré est-il contagieux ?
Il n'est ni contagieux ni héréditaire.
Quels sont les symptômes de Guillain-Barré ?
Le syndrome de Guillain-Barré se manifeste par une atteinte au niveau des membres et débute en général au niveau des membres inférieurs. "Il s'agit de troubles de la motricité et de la sensibilité : la personne touchée a des faiblesses au niveau des membres, sent moins bien les extrémités de ses membres, au maximum les membres sont paralysés" détaille le neurologue. La paralysie peut parfois atteindre le système respiratoire ou la déglutition. "Ce syndrome s'installe de façon rapide, sur quelques jours voire quelques heures et atteint un plateau en quelques heures, jours, une semaine maximum. Ce plateau peut s'arrêter à une paralysie modérée des jambes et des bras ou aller jusqu'à une atteinte respiratoire et de la déglutition ce qui peut conduire à une hospitalisation en réanimation" précise-t-il. Le plateau dure 1 à 2 semaines, rarement plus, et est suivi d'une phase descendante plus lente sur quelques semaines pendant laquelle les personnes voient leurs symptômes s'améliorer lentement.
Quelles sont les causes de Guillain-Barré ?
"Le syndrome de Guillain-Barré est un exemple au niveau neurologique d'une maladie auto-immune. L'organisme développe des anticorps qui par un jeu de partage de cibles vont s'attaquer au corps" informe le Pr Zuber. "La myéline des nerfs a quelques antigènes sur sa paroi qui ressemblent aux antigènes de bactéries ou de virus" explique-t-il. Par exemple, la bactérie Campylobacter jejuni (premier organisme en cause) est bien connue pour avoir des cibles partagées entre sa paroi et celle de la myéline. Un certain nombre de virus ont été associés à l'apparition d'un syndrome de Guillain-barré :
- la grippe,
- du Cytomégalovirus,
- de l'Epstein-Barr Virus (mononucléose infectieuse),
- et plus récemment le virus de la Covid-19.
"Le deuxième type de déclenchement peut-être ce qui provoque une réaction immunitaire, par exemple les vaccins, notamment celui contre la grippe ou contre la diphtérie même si cela est moins fréquent aujourd'hui car les vaccins sont plus purifiés" ajoute le médecin.
Comment est diagnostiqué le syndrome de Guillain-Barré ?
Le diagnostic est tout d'abord clinique. "Les symptômes sont assez spectaculaires, chez des personnes en pleine force de l'âge : elles s'affaiblissent, tombent dans la rue…" décrit le Pr Zuber. "L'examen clinique permet d'observer des signes d'atteinte des nerfs. Il y a une perte des réflexes tendineux" explique-t-il. Les examens complémentaires confirment le diagnostic. L'électromyogramme (EMG), étude de l'électricité au niveau des nerfs, montre un ralentissement de l'influx nerveux à cause de l'atteinte de la myéline. Une ponction lombaire recherche une élévation anormale de protéines évocatrice du syndrome de Guillain-Barré.
Quels sont les traitements de Guillain-Barré ?
Les traitements du syndrome de Guillain-Barré sont des traitements spécifiques, communs aux autres maladies auto-immunes. "Ils consistent à se débarrasser des anticorps qui gênent la gaine de myéline, ce qui permet aux nerfs de récupérer" indique le Pr Zuber. "Cela peut se faire en pratiquant des perfusions d'immunoglobulines intraveineuses, et plus rarement avec une technique plus lourde telle que les échanges plasmatiques qui consistent à filtrer les anticorps dans le sang" précise-t-il. A cela s'ajoutent de la rééducation (parfois en centre de rééducation), des séances de kinésithérapie, ergothérapie et la prise d'antalgiques car l'atteinte sensitive peut provoquer des douleurs.
Quelles sont les risques de séquelles ?
La majorité des personnes récupèrent complètement après un syndrome de Guillain-Barré. "15% des personnes gardent des séquelles avec un degré variable de handicap : certains sont autonomes mais ne peuvent plus courir par exemple, d'autres peuvent avoir des séquelles lourdes et restent dépendants" indique le neurologue. Les séquelles peuvent être une diminution de la sensibilité au toucher, une persistance des fourmillements ou de la faiblesse musculaire, surtout dans les pieds ou les mains.
Quel est le pronostic de guérison ?
"C'est un syndrome qui a une évolution favorable chez la majorité des gens : certains gardent des séquelles et un encore plus petit pourcentage décèdent" informe le Pr Zuber. La majorité des personnes atteintes du syndrome de Guillain-Barré récupèrent leurs capacités physiques au bout de 6 à 12 mois.
Quel lien entre le syndrome de Guillain Barré et les vaccins du Covid ?
Au cours de l'été 2021, l'Agence européenne du médicament (EMA) rapportait près de 900 cas de syndrome de Guillain-Barré survenus après une injection du vaccin Covid Vaxzevria d'AstraZeneca. Cet effet secondaire est considéré comme "très rare" soit environ 1 personne sur 10 000. Après une analyse des cas de syndrome de Guillain-Barré (SGB) déclarés en Europe, l'EMA avait considéré qu'il existait également un lien possible avec le vaccin Janssen. Aucune association n'a été identifiée entre ce syndrome et les vaccins COVID-19 Comirnaty (Pfizer) et Spikevax (Moderna). Le signal a aussi été confirmé aux Etats-Unis. Dans un document publié en ligne, l'Agence américaine du médicament (FDA) indiquait que les symptômes évocateurs du syndrome de Guillain-Barré débutaient généralement dans les 42 jours suivant l'administration du vaccin. L'autorité a rappelé comme en Europe que "les bénéfices (de la vaccination) l'emportaient clairement sur les risques potentiels" et que "la probabilité que cela se produise est très faible ".
Merci au Pr Mathieu Zuber, chef du service de neurologie à l'hôpital Saint Joseph (Paris).