Cancer de la langue : symptômes, quel pronostic ?
Le cancer de la langue est le plus fréquent des cancers de la bouche et est souvent diagnostiqué entre 55 et 65 ans. Rappel des symptômes et facteurs de risque.
Il y a environ 15 000 cancers lèvre‑bouche‑pharynx découverts chaque année en France dont 10 000 chez l'homme. Parmi les cancers de la bouche, un tiers concerne la langue. Dans un entretien accordé à L'Obs le 10 décembre 2022, le chanteur Maxime Le Forestier âgé de 73 ans a révélé avoir été soigné d'un cancer de la langue. Hospitalisé après un malaise sur scène en décembre 2021, les médecins lui font une série d'examens "et, à force d'investigations, on m'a découvert des petites saloperies regroupées à la base de la langue. L'ORL de l'Institut Curie qui m'a annoncé la nouvelle n'a pas (non plus) prononcé le mot 'cancer'. Je l'ai compris quand il m'a prescrit une série de trente-cinq séances de radiothérapie" raconte-t-il avant d'ajouter "Je n'ai pas nommé la maladie jusqu'au moment où on m'a annoncé que j'étais guéri."
Définition : qu'est-ce qu'un cancer de la langue ?
Le cancer de la langue est l'un des cancers de la cavité buccale. "90 à 95% des cancers de la langue sont des carcinomes épidermoïdes qui se développent à partir de l'épithélium, le tissu de revêtement, informe le Dr Philippe Gorphe, chirurgien ORL à l'Institut Gustave Roussy. Ce cancer se développe d'abord localement puis il s'étend très rapidement aux ganglions du cou. Il reste longtemps localisé au niveau de la tête et du cou avec un objectif de guérison. La maladie ne se généralise que tardivement". Le cancer de la langue peut se subdiviser en deux types : les cancers de la partie mobile et ceux de la partie arrière (base fixe de la langue).
Âge
Les cancers de la cavité buccale touchent 6 000 personnes par an en France, dont un tiers de cancers de la langue. "L'âge moyen des cancers de la cavité buccale est 62 ans" indique le chirurgien ORL. "Le pic d'âge au diagnostic est entre 55 et 65 ans" précise-t-il. Cette maladie qui est masculine dans trois quarts des cas survient dans un tiers des cas chez des personnes de plus de 70 ans.
Quels sont les symptômes du cancer de la langue ?
Les premiers symptômes suffisamment probants n'apparaissent généralement qu'à un stade déjà avancé de la maladie. Dans un premier temps, la prolifération de cellules anormales au niveau de la langue ne se manifeste que par une légère sensation de gêne lors de la mastication ou des mouvements de la partie mobile de l'organe. Peu à peu, les signes cliniques évoluent. "Le premier symptôme est une douleur spontanée et à la déglutition. La personne peut aussi avoir du mal à articuler, décrit le chirurgien ORL. Il y a souvent une perte de poids car la personne mange moins". Autres signes fréquents :
- des saignements et des ganglions du cou apparents. "Les tuméfactions des ganglions sont un symptôme fréquent" informe le Dr Philippe Gorphe.
- "La douleur de la langue peut irradier vers l'oreille car elle emprunte le nerf de la sensibilité de la cavité buccale" ajoute-t-il.
Dans un peu moins d'un tiers des cas, les personnes n'ont jamais fumé et bu.
Quelles sont les causes du cancer de la langue ?
Le tabac et l'alcool sont les premiers facteurs de risque de développer un cancer de la bouche. Lorsqu'ils sont consommés ensemble, les effets du tabac et de l'alcool ne s'additionnent pas mais se multiplient. "Dans un peu moins d'un tiers des cas, les personnes n'ont jamais fumé et bu, informe néanmoins le Dr Philippe Gorphe. Il existe une tranche d'âge particulière pour le cancer de la langue : des patients de moins de 40 ans non-fumeur. Plusieurs théories ont été émises pour expliquer cette incidence particulière, notamment des mutations sporadiques potentiellement cancérigènes et des facteurs prédisposants, par exemple chez des personnes ayant une déficience de l'auto-nettoyage des cellules". L'infection par le papillomavirus humain (virud HPV également à l'origine de cancers du col de l'utérus) transmis notamment par contact avec la peau ou avec les muqueuses - favorise également l'apparition de certains cancers de l'oropharynx incluant les amygdales et la base de la langu).
Stades
"Dans deux tiers des cas, le cancer de la langue est diagnostiqué à un stade global avancé, ce qui a une incidence sur l'importance du traitement et un impact majeur sur le pronostic, le stade de la maladie est le reflet direct des chances de survie" explique le Dr Philippe Gorphe.
Comment est diagnostiqué un cancer de la langue ?
Le diagnostic du cancer de la langue se fait avec un examen clinique et une biopsie, réalisée sous endoscopie le plus souvent. "Ce cancer étant très souvent associé à une intoxication tabac ou tabac et alcool, il risque d'y avoir une tumeur au niveau des autres muqueuses : pharynx, larynx, œsophage" explique le Dr Philippe Gorphe.
Le traitement est en général chirurgical et radiothérapeutique
Traitement, opération, reconstruction de la langue...
"Comme pour les autres cancers de la bouche, le traitement est en général chirurgical et radiothérapeutique. Est effectuée une chirurgie de la tumeur et des aires ganglionnaires et une radiothérapie post-opératoire, informe le chirurgien ORL. S'il n'y a pas de pathologie ganglionnaire apparente de façon clinique et radiologique, on enlève seulement un ou deux ganglions pour les analyser et voir si la maladie n'est pas partie dans les ganglions : c'est la technique du ganglion sentinelle".
"Si aucun facteur de gravité n'a été trouvé lors de la biopsie il peut ne pas y avoir de radiothérapie après la chirurgie. Si des facteurs de gravité ont été trouvés une chimiothérapie peut être associée à la radiothérapie", précise ce spécialiste. En fonction de la taille de la tumeur, une reconstruction de la langue peut s'avérer nécessaire après la chirurgie.
Pronostic et survie du cancer de la langue
Les chances de survie, évaluées à 5 ans, sont très variables en fonction du site et du stade de développement de la tumeur. Les tumeurs de la partie mobile dépistées précocement ont un taux de survie assez élevé mais qui chute si le dépistage est tardif.
Merci au Dr Philippe Gorphe, chirurgien ORL à l'Institut Gustave Roussy.