Pénurie de médecins : un suivi moins bon ? " Dans de nombreuses facultés, la médecine générale est dévalorisée "
Catherine a 21 ans, elle est en 4ème année de médecine (DCEM2) et est donc externe. Elle étudie en Bretagne, région très touchée par les pénuries de médecins. Elle nous donne son avis sur le sujet.
Selon vous, pourquoi les jeunes médecins sont-ils réticents à s'installer à la campagne ?
Je pense que les jeunes médecins sont plus attirés par le travail en hôpital qu'en cabinet car la pratique hospitalière permet un travail en équipe. A côté, le libéral est un travail plus isolé et souvent les médecins ne comptent pas leurs heures. Que ce soit en ville ou dans des endroits plus isolés à la campagne, le travail se fait de façon isolée.
La médecine générale est-elle délaissée par les étudiants ?
Sans suivi, la pathologie évolue et s'aggrave alors qu'elle pourrait être contrôlée.
Pendant nos études, la médecine générale est longuement abordée mais ce n'est pas le cas partout. En Bretagne, on y est très sensibilisés en raison des zones rurales, parfois isolées en termes de services de santé. On a, par exemple, la possibilité de faire un de nos stages en libéral plutôt qu'à l'hôpital. Ce n'est pas obligatoire, mais c'est possible.
Comme les résultats de votre étude le montrent, au quotidien, nous voyons tous des personnes qui n'ont pas un suivi suffisant de leur(s) pathologie(s), faute de médecins proches de chez eux ou tout simplement de rendez-vous. Du coup, la pathologie évolue et s'aggrave alors qu'elle serait contrôlée si le suivi était régulier. Les personnes âgées sont particulièrement concernées par ces difficultés de prise en charge.
Les jeunes médecins ne veulent pas travailler seuls en libéral.
Dans beaucoup de facultés, la médecine générale est dévalorisée. Lors du classement à l'issue du concours de la 6e année, les étudiants choisissent la spécialité qu'ils souhaitent suivre (la médecine générale est reconnue depuis 2004 comme une spécialité). 50 % des places à pourvoir sont pour la médecine générale. Du coup, les étudiants que nous sommes, c'est-à-dire conditionnés pour être les meilleurs depuis notre première année de fac (voire plus tôt), pensent que c'est "plus facile" d'obtenir cette spécialité que les autres. Mais cette dévalorisation est également due à certains professeurs qui la dénigrent...
Quelles solutions pourraient inverser la tendance ?
Concernant l'augmentation du numérus clausus, les autorités ont réagi trop tard. Elles semblent avoir "oublié" qu'il faut 9 ans minimum pour former un médecin. Du coup, l'augmentation du numérus clausus (passé de 3 700 à 6 200 en 2005), ne permettra pas d'éviter la baisse du nombre de médecins, puisqu'une importante partie d'entre eux partiront à la retraite avant la fin de la formation de leurs potentiels successeurs.
Les autorités ont "oublié" qu'il faut 9 ans minimum pour former un médecin.
Un contrat d'engagement de service public a été mis en place pour inciter les jeunes médecins à exercer dans des zones qui ont besoin de médecins. L'étudiant est payé tous les mois par l'Etat (1 200 euros). Une fois diplômé, le médecin doit exercer en zone rurale le même nombre de mois qu'il a été rémunéré pendant ses études.
Parfois, les villes ou communautés de communes prennent en charge les loyers pendant un an pour favoriser l'installation d'un médecin dans une ville isolée. Ca enlève un poids aux jeunes et peut être attractif.
Il faut aider les jeunes à s'installer.
Ce qui est intéressant aussi, ce sont les centres médicaux ou centres de santé qui regroupent plusieurs professionnels de santé, médecins, infirmières ou kinésithérapeutes... Ces centres évitent aux jeunes de se retrouver seuls à exercer.
De nombreux centres de type SOS médecins se développent en périphérie, pour apporter des soins aux personnes isolées. Malheureusement, cela ne permet pas de faire un suivi régulier comme peut le faire un médecin généraliste référent.