Pénurie de médecins : un suivi moins bon ? "Avant tout une mauvaise répartition des acteurs de santé"

Jean-François Petton, 64 ans, est médecin généraliste depuis 36 ans. Il nous livre son témoignage en tant que praticien à Scaër, dans le Finistère (Bretagne), classé désert médical (densité de médecins généralistes faible) par l'agence régionale de santé.

Avez-vous le sentiment qu'il y a une pénurie de médecins ? Certaines spécialités sont-elles plus touchées ?

 Plus qu'une pénurie de médecins généralistes, c'est une mauvaise répartition des acteurs de santé : 15.8% de MG pour 5000 habitants à Paris 8°, 21.2 pour 5000 à La Clusaz (Haute-Savoie), 0.88 pour 5000 à Lizy-sur-Ourcq (Seine-et-Marne) et 3 pour 7000 habitants dans le bassin de Scaër (sources : Atlas démographique du Conseil de l'Ordre des médecins).

Pour les médecins, l'éloignement des hôpitaux rend le travail insécuritaire.

Concernant les spécialistes autres que les généralistes, il m'est difficile de répondre... On sait par contre qu'il n'y a plus d'ophtalmos dans certains hôpitaux (à l'hôpital de Rodez en Aveyron par exemple). Et les délais d'attente sont d'environ 6 mois en Bretagne.

Le nombre de médecins généralistes diminue dans notre bassin : 6 médecins il y a 10 ans, puis 5 après un départ en retraite, puis 4 après celui d'une jeune médecin et 3 à ce jour. Aux alentours le nombre baisse également et la tendance va s'accentuer dans les 12 mois qui viennent.

Quelles sont, pour vous, les causes principales de cette désertification des médecins dans les zones rurales ?

 Je pense qu'il y a plusieurs causes à la désertification : la baisse bien sûr du numerus clausus divisé par deux en 20 ans. La féminisation de la profession est également à prendre en compte : beaucoup de femmes médecins s'installent en libéral, reprennent à deux patientèle d'un seul médecin, privilégiant ainsi leur qualité de vie.

Autre raison : le refus des gardes de nuit qui, rappelons-le, repose sur le pur volontariat des médecins.

L'offre de salariat des médecins vide les viviers : de nombreux postes sont offerts à l'hôpital (régulateurs au 15, urgentistes, addictologues...), mais aussi le recrutement d'étudiants par la médecine militaire à niveau de PCEM1 et 2, ou encore nombre de médecins conseils dans les caisses d'Assurance maladie. Par exemple, la Mutualité sociale agricole (MSA) 22 et 29 fusionnent pour former MSA Armorique mais recrute 11 nouveaux médecins, alors que la population d'agriculteurs ou rattachés n'augmente pas.

Autre raison : le refus des gardes de nuit ou le dimanche qui, rappelons-le, repose sur le pur volontariat des médecins. Nous notons également au quotidien la difficulté à trouver des remplaçants pour les vacances.

Pour les médecins, l'éloignement des hôpitaux rend le travail insécuritaire.

Enfin, il y a un manque d'attractivité de nos zones rurales : spectacles, mer...

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