Douleur, fissure : les vrais risques de la sodomie

Douleur, fissure : les vrais risques de la sodomie

On peut avoir des blocages à l'idée de pratiquer la sodomie. La peur de la douleur, de la fissure, des hémorroïdes, de l'incontinence ou de l'infection sexuelle ? Le point sur les vrais (et faux) risques liés à la pénétration anale.

"La sodomie s'est fortement banalisée ces cinquante dernières années", commente l'Ifop dans un sondage de 2021 s'intéressant aux pratiques sexuelles des Françaises de plus de 18 ans. D'après ce sondage, en 2021, 51 % des Françaises ont déjà pratiqué la sodomie. Elles étaient 14 % en 1970. Mais si les femmes sont de plus en plus adeptes de cette pénétration anale "elles ne sont pas toujours au fait des risques qu'on peut avoir en le faisant ou selon comment on le fait" constate le Dr Thierry Higuero, proctologue, interrogée pour l'occasion.

1. Des douleurs (quand on n'est pas bien préparé)

On parle d'anodyspareunie quand on a des douleurs pendant une pénétration anale, "Ces douleurs sont plus fréquentes chez la femme" indique notre interlocuteur. Elles peuvent parfois s'associer à des irritations anales et rectales. Ce qui favorise les douleurs : une pénétration trop brutale, un anus contracté, un manque de lubrification, un manque de stimulation de l'anus au préalable (par massage digital par exemple) ou un blocage psychologique dans l'acceptation de la sodomie. 

2. Une baisse du tonus anal

"Lorsqu'on a des rapports par voie anale, le tonus anal diminue, on est plus souple au niveau du sphincter interne" explique le Dr Higuero. Ces effets dépendent aussi de la pratique : "Ils ne sont pas les mêmes quand on le fait avec son mari ou avec plusieurs personnes lors d'une même soirée et/ou si on utilise des objets sexuels plus ou moins gros". Deux muscles existent au niveau de l'anus correspondant à deux sphincters :

► Un sphincter interne qu'on ne maîtrise pas. Il s'ouvre quand on va à la selle ou en cas de gaz. "Il participe à 50-60% de la pression de fermeture qu'on appelle "pression de repos" qui permet d'avoir l'anus complètement clos et étanche."

► Un sphincter externe qui se serre quand on serre l'anus, c'est une pression "volontaire" (qui permet par exemple de se retenir quand on a envie d'aller à la selle).

3. Un risque de fissure (rare, sauf si la sodomie est brutale)

Le risque absolu de fissure n'existe pasrépond le Dr Higuero. Une étude publiée en 2009 a confirmé cela et a montré que les rapports anaux n'augmentaient pas le risque de fissure. Sauf si la sodomie est mal préparée ou violente : "Là ça peut déchirer comme ça peut déchirer au niveau de la vulve" ajoute le spécialiste. Et de rappeler : "Le plus important est d'assurer une lubrification suffisante même si ce n'est pas la première fois et de ne pas oublier les préliminaires."

4. Des risques d'hémorroïdes

"Il n'y a pas de risque de problèmes hémorroïdaires quand c'est bien fait et bien préparé" explique le proctologue. "Cependant, si la personne a une maladie hémorroïdaire pré-existante, cela peut être désagréable voire majorer les symptômes en fonction de l'intensité de l'acte (ou du nombre de partenaires dans la soirée ou de la taille des accessoires sexuels utilisés)" tempère-t-il.

► Attention en cas de chirurgie hémorroïdaire : "Certains traitements chirurgicaux peuvent gêner une sexualité anale. Il ne faut pas hésiter quand on a une maladie hémorroïdaire qui nécessite une prise en charge chirurgicale à dire au médecin que l'on a une sexualité anale et qu'on souhaite la poursuivre parce que certaines techniques opératoires comme l'intervention de Longo peuvent entraîner des difficultés voire une impossibilité à avoir des rapports par cette voie" prévient le Dr Higuero.

5. Des risques d'incontinence anale

Si la sodomie rend les sphincters anaux plus souples, "ce n'est pas forcément corrélé à un trouble de la continence" rassure le spécialiste. 

► Dans une enquête menée en 1993, 40 hommes homosexuels ayant en moyenne 2,5 rapports anaux passifs par mois ont décrit une incontinence anale (flatulences, selles liquides) plus fréquente que les 18 témoins.

► Dans une étude réalisée en 2018 auprès de 1 000 femmes, 32% avaient au moins eu un rapport anal et 12% régulièrement. 70% d'entre elles déclaraient une incontinence anale et 10% considéraient que c'était en lien avec leur sexualité anale.

► Dans un troisième travail mené sur 4 170 adultes (2 100 hommes et 2 070 femmes), le sexe anal était corrélé à une incontinence fécale plus fréquente.

► Ce qu'il faut retenir d'après notre proctologue : "Les chiffres disent que les gens ayant des rapports par voie anale ont un peu plus de troubles de la continence mais pour quel type de rapport anal (classique ou pas) ? Par ailleurs, ces troubles peuvent être en rapport avec des antécédents obstétricaux - accouchement traumatique par exemple - et/ou de chirurgie anale non précisés dans ces travaux. Il faut poursuivre les recherches avant de conclure à un risque réel pour une relation sexuelle anale "classique"."

6. Un risque d'infection sexuelle

Les infections sexuelles augmentent très rapidement en France. La sodomie est un facteur de risque bien identifié. "C'est une épidémie avec beaucoup de co-infections (deux infections en même temps). Les plus touchés sont les homosexuels masculins et les femmes de moins de 40 ans avec une probable multiplicité des partenaires sexuels" constate le Dr Higuero.

► Pourquoi ? "Une explication pour les jeunes a été apportée par une étude qui a montré que regarder fréquemment des images pornographiques est associé à une activité sexuelle plus précoce, à un plus grand nombre de partenaires sexuel(le)s et de partenaires occasionnels, à une pratique de la pénétration anale, à une moindre prévention des infections sexuellement transmissibles." 

► Quelles infections peut-on contracter lors de la sodomie ? La syphilis, la gonococcie, la chlamydiose, les hépatites B et C et le VIH à l'origine du Sida.

► Pourquoi la sodomie transmet-elle ces infections ? "En cas de rapports non protégés, il peut y avoir des petites lésions de la muqueuse qui peuvent saigner" explique le médecin. Le seul moyen de se protéger est de mettre un préservatif en cas de rapports avec des partenaires occasionnels.

Merci au Dr Thierry Higuero, proctologue médico chirurgical, Président de  la commission proctologie du Club de Réflexion des Cabinets et Groupes d'Hépato-Gastro-entérologie (CREGG), membre du conseil d'administration de la Société Nationale de Colo-Proctologie (SNFCP) et co-auteur du livre "Ma bible des questions de santé" de Jessyca Falour.

  • Sondage Ifop / The Poken company réalisé auprès de 5026 femmes de 18 ans et plus vivant en Espagne, Italie, France, Allemagne et Royaume-Uni, par questionnaire auto-administré du 1er au 5 mars 2021.
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