Ischémie myocardique silencieuse : symptômes, dépistage
L'ischémie myocardique silencieuse est une maladie cardiaque qui correspond à un manque d'oxygénation du muscle cardiaque, résultant d'un problème de l'artère coronaire. Quels sont les symptômes ? Qui doit faire un dépistage régulier ? Les personnes diabétiques ? Quel est le traitement ? Réponses de notre expert.
Définition : qu'est-ce qu'une ischémie myocardique silencieuse ?
L'ischémie silencieuse ou asymptomatique représente l'événement ischémique le plus fréquent de la maladie coronarienne (avant l'angine de poitrine). "L'ischémie myocardique est, sur le plan physiopathologique, un manque d'oxygène des cellules myocardiques lorsqu'une artère du cœur est obstruée. Lorsqu'elle est évoluée, elle entraîne une anomalie de la fonction ventriculaire gauche. En dernier stade, la douleur angineuse apparaît. C'est la cascade ischémique" explique le Pr Alain Furber, Professeur de cardiologie au CHU d'Angers, et président de la Fédération Française de Cardiologie (FFC). L'angine de poitrine se traduit par une douleur thoracique à l'effort. "L'ischémie myocardique silencieuse survient avant l'apparition de la douleur angineuse ou se voit chez des personnes qui ne ressentent pas la douleur angineuse à cause d'une autre anomalie, la plus fréquente étant la neuropathie diabétique" décrit le cardiologue qui précise que l'ischémie myocardique silencieuse est fréquente.
Quels sont les symptômes ?
Comme son nom l'indique, la myocardie ischémique silencieuse est asymptomatique (sans symptôme). Mais si les symptômes sont absents, la maladie, quant à elle, évolue. Elle peut entraîner un infarctus du myocarde (nécrose rapide des cellules cardiaques).
Quelle est sa cause ?
La cause la plus fréquente de l'ischémie myocardique silencieuse est la maladie athéromateuse. "Les plaques d'athérome rétrécissent les artères coronaires. Cela peut être associé à une dysfonction endothéliale (cellules de l'endothélium) liée à des facteurs de risque ou à une anomalie de la micro-circulation au niveau cardiaque" indique notre interlocuteur. Et de préciser que ces deux dernières causes peuvent être isolées.
Ischémie myocardique et diabète : quel est le lien ?
On rencontre souvent cette pathologie chez les personnes diabétiques, chez qui une des complications de l'évolution de ce diabète, la neuropathie, détruit une partie de certains nerfs, d'où une diminution voire une absence totale de la sensation de douleur dans la zone innervée par ces nerfs, les nerfs cardiaques dans ce cas. "Le risque d'ischémie myocardique silencieuse est très élevée chez les diabétiques compliqués :
- diabète qui évolue depuis au moins 10 ans,
- diabète qui présente déjà des complications (atteinte de la fonction rénale, albumine dans les urines, sténose, artérite des membres inférieurs, hypertrophie du ventricule gauche)
En quoi consiste le dépistage d'une ischémie myocardique silencieuse ?
Le dépistage d'une ischémie myocardique silencieuse se fait chez des personnes à risque.
Le dépistage de l'ischémie myocardique silencieuse repose sur des tests d'imagerie à la recherche d'une anomalie de la perfusion du cœur (scintigraphie myocardique, IRM cardiaque) qui détectent le stade précoce d'une ischémie. "Ces examens sont couplés à un test d'effort ou un test pharmacologique. La deuxième approche consiste à faire une échographie de stress pour dépister une anomalie de la cinétique du ventricule gauche. De façon plus récente, une mesure du scorecalcique est réalisée. Cette nouvelle approche va faire partie des recommandations de dépistage. " Ce test permet de quantifier le degré de calcification des artères coronaires" détaille le Pr Furber. Un scanner thoracique sans injection mesure ce score. Lorsque ce score est élevé, il faut réaliser un test fonctionnel : scintigraphie myocardique, IRM cardiaque ou échographie d'effort. "Les recommandations d'experts sont de faire un examen de dépistage tous les 4 ou 5 ans" indique le spécialiste. Le dépistage d'une ischémie myocardique silencieuse se fait chez des personnes à risque :
► Le premier groupe est constitué par des personnes ayant déjà une maladie coronarienne et ayant été pris en charge pour un pontage, une angioplastie. "Le risque de faire une ischémie myocardique est de 40%. Le dépistage d'une ischémie myocardique silencieuse est faite 2 ans après la pose d'un stent puis tous les 2 ou 3 ans et 5 ans après un pontage" informe le Pr Furber.
► Le deuxième groupe de personnes à risque regroupe :
- les personnes diabétiques qui sont à très haut risque d'avoir une ischémie myocardique silencieuse
- les personnes ayant de nombreux facteurs de risque cardiovasculaires (hypertension artérielle, hypercholestérolémie, tabagisme…)
- les personnes qui ont une sténose de l'artère carotide
- les personnes ayant une artérite des membres inférieurs
- les personnes ayant une insuffisance rénale chronique.
Quelles sont les complications possibles ?
Les dangers de cette affection sont bien entendu liés à son caractère asymptomatique : le malade ne se rend pas compte qu'il est atteint alors qu'une partie de ses cellules myocardiques meurent. "Globalement, le pronostic est le même que celui de l'angine de poitrine" Le risque d'infarctus du myocarde est élevé.
Quel traitement envisager ?
Lorsque l'ischémie myocardique est très étendue, cela nécessite :
- un traitement de revascularisation (pontage coronarien, angioplastie),
- un traitement médical (antiagrégant plaquettaire, statines, bêtabloquants)
- la correction des facteurs de risque (surpoids, diabète, hypercholestérolémie, tabagisme, sédentarité).
"Chez ces patients, une bonne hygiène de vie (arrêter de fumer, pratiquer une activité physique régulière) est essentielle, insiste le médecin. Chez les personnes qui ont déjà une maladie coronarienne et eu un pontage ou une angioplastie, la réadaptation cardiaque diminue le risque d'ischémie silencieuse".
Merci au Pr Alain Furber, président de la Fédération Française de Cardiologie (FFC).
Sources :
- Emmanuel Cosson, Philippe Moulin, Dépistage de l'ischémie myocardique silencieuse chez le diabétique : quelle attitude en 2018, en attendant les prochaines recommandations ?, Correspondances en Métabolismes Hormones Diabètes & Nutrition / N° 3-4 avril 2018
- Meiltz, A., Ciaroni, S. (2005). 'L'ischémie myocardique silencieuse : un silence assourdissant', Rev Med Suisse 2005; volume -9. no. 009, 613 - 616 doi: .
- Site Fédération Française de Cardiologie (FFC)