Virus : définition, mode d'action, comment le combattre ?
Les virus sont des micro-organismes qui peuvent déclencher des maladies virales plus ou moins graves et toujours contagieuses. Ils peuvent se transmettre très rapidement, donner lieu à une épidémie, voire une pandémie comme avec le coronavirus. Découverte avec le Dr Henri Agut, médecin virologue à Paris.
Définition : qu'est-ce qu'un virus ?
C'est au 19e siècle que les virus sont découverts, grâce aux travaux d'Adolf Mayer sur la mosaïque du tabac. Seules les bactéries étaient alors connues, mais l'agent infectieux responsable de cette maladie était bien plus petit qu'une bactérie car non retenu par le filtre de Chamberland. Le virus de la mosaïque du tabac (VMT) a finalement été identifié en 1935 par Wendell Stanley. "Les virus sont des structures biologiques, ce qui signifie qu'ils appartiennent au monde du vivant ou biosphère" explique le Dr Henri Agut, médecin virologue à Paris. Dans la biosphère, ils coexistent avec les cellules eucaryotes - éléments de base des organismes animaux et végétaux - et les bactéries qui sont des micro-organismes et agents de maladies infectieuses. Un virus est environ dix fois plus petit qu'une bactérie et cent fois plus petit qu'une cellule : son diamètre moyen est d'un dix-millième de millimètre. Sa structure est aussi beaucoup plus simple : "II est formé d'un acide nucléique portant l'information génétique du virus – dit génome - qui est protégé par un assemblage de protéines. Le génome d'un virus est soit une molécule d'ADN comme pour les cellules et les bactéries, soit une molécule d'ARN, ce qui n'existe que pour les virus dans la biosphère. Certains virus sont, en plus, recouverts d'une couche de molécules de lipides dans laquelle sont insérées des protéines de surface, ayant ainsi l'aspect d'une boule microscopique hérissée de piquants : c'est la représentation emblématique d'une particule virale." décrit le Dr Agut.
Mode d'action : comment se multiplie-t-il ?
Les virus ont absolument besoin de pénétrer dans une cellule ou une bactérie et de l'infecter pour se répliquer et donc survivre. Les virus qui infectent les bactéries s'appellent bactériophages ou simplement phages. Il existe également des virus qui infectent les animaux et d'autres qui infectent les végétaux. "Un virus se multiplie à partir de son seul génome en détournant le fonctionnement de la cellule hôte à son profit." Les gènes viraux obligent cette cellule hôte à synthétiser, de nouvelles et très nombreuses particules virales, en tous points identiques à celle qui a pénétré initialement dans la cellule. Les nouveaux virus vont aller infecter d'autres cellules du voisinage, assurant ainsi la multiplication et la propagation du virus dans la biosphère. "Un virus ne peut survivre très longtemps à l'état de particule virale libre dans le milieu ambiant, Il doit donc trouver rapidement une cellule à infecter. C'est essentiellement sous la forme de cellules infectées, des "usines" à fabriquer des virus, qu'il existe dans la biosphère." explique le virologue.
Mode de reproduction
Comme pour toute entité du monde vivant, la seule finalité d'un virus est de se répliquer pour continuer à exister. Pour cela, il altère voire détruit, les cellules hôtes – animales ou végétales – qu'il a infectées. Ces destructions ou altérations fonctionnelles peuvent, si elles sont importantes, provoquer l'apparition d'une maladie qui, dans certains cas, est mortelle pour l'organisme hôte. Mais de nombreux virus qui se répliquent activement, même chez l'homme, ne provoquent pas de maladies apparentes. "Un virus donné est en général très bien adapté à un hôte donné. Un virus des plantes n'infecte pas les animaux, un virus des animaux n'infecte pas les plantes, un virus d'une espèce animale n'infecte pas une autre espèce animale. C'est ce qu'on appelle la barrière d'espèce. Cependant, parfois, dans des circonstances exceptionnelles, cette barrière peut être franchie : un virus de chauve-souris ou de porc peut infecter l'homme accidentellement et continuer à se propager chez son nouvel hôte." précise le Dr Agut. Chez l'homme, on connaît de nombreux virus qui, en se multipliant dans les cellules des différents organes, donnent des maladies du foie, des poumons, de la peau ou du cerveau, entre autres et de gravité variable
Exemples de virus
"En fonction de la nature du génome (ADN ou ARN) et de la structure des particules virales, les virus ont été classés dans plus de 100 familles différentes, chacune comportant des dizaines d'espèces virales distinctes. Les plus connus sont ceux responsables de maladies graves chez leurs hôtes, et en particulier ceux qui ont causé de grandes épidémies." explique le spécialiste.
Parmi les virus à ARN :
- Le poliovirus, agent de la poliomyélite ;
- Le virus de la rougeole ;
- Le VIH, agent du sida ;
- Le virus de la grippe ;
- Le virus de l'hépatite C ;
- Le virus Ebola, agent de la fièvre du même nom ;
- Le virus de la rage ;
- Le virus respiratoire syncytial, agent de la bronchiolite du nourrisson ;
- Le virus de la dengue.
Dans cette liste, le virus de la grippe, "ou plutôt les virus de la grippe car il en existe de très nombreuses espèces distinctes, est l'archétype du virus variable génétiquement, facilement transmissible, infectant à la fois les hommes et les animaux, et pouvant provoquer des pandémies d'une intensité exceptionnelle" précise le virologue.
Parmi les virus à ADN :
- Le virus herpès simplex, agent de l'herpès ;
- Le virus de la varicelle et du zona ;
- Le virus Epstein-Barr, agent de la mononucléose infectieuse ;
- Le virus de la variole ;
- Le virus de l'hépatite B ;
- Le papillomavirus, responsable des verrues et du cancer du col utérin.
Contagion et transmission
Comme l'explique le Dr Agut, "le mode de transmission des virus humains est essentiel à considérer pour essayer de maîtriser les épidémies. Pour cela, il faut connaître la source de virus, la porte d'entrée dans l'organisme, le caractère direct ou indirect de la transmission, la quantité de virus transmise."
La source de virus est le plus souvent un être humain infecté.
"Tous les sujets infectés, symptomatiques ou asymptomatiques, infectés de façon aiguë ou chronique, peuvent transmettre les particules virales ou les cellules infectées présents dans leurs sécrétions". Les sujets asymptomatiques ou en phase d'incubation de la maladie constituent le danger le plus important car non détectables sur des signes extérieurs. Une forte densité de personnes est évidemment très propice pour la propagation des infections virales.
La source de virus peut aussi être un animal infecté.
La transmission à l'homme peut alors se faire de plusieurs façons :
- Directement : par exemple le virus de la rage qui se transmet par morsure,
- Indirectement, au contact de déjections contaminées comme c'est le cas pour le virus de la grippe aviaire,
- Ou encore par le biais d'un insecte qui sert de relais actif entre personnes infectées et personnes sensibles, comme c'est le cas pour le virus de la dengue transmis par les moustiques. C'est le même mode de transmission que celui du paludisme (piqure de moustique) qui est une maladie parasitaire ou de la maladie de Lyme (piqure de tique) qui est une maladie bactérienne.
Puis, l'entrée du virus dans l'organisme peut se faire par différentes voies :
- Une lésion de la barrière cutanée (éraflure, coupure, piqûre, morsure), si minime soit-elle, suffit pour créer une porte d'entrée.
- Le contact avec une muqueuse (bouche, nez, œil, organes sexuels) reste le mode d'entrée privilégié des virus dans l'organisme humain.
- La transmission par voie respiratoire se fait classiquement par des microgouttelettes ou des aérosols (particules plus fines et diffusant plus loin que les gouttelettes) contenant des sécrétions respiratoires émises par la personne infectée, en toussant, éternuant voire simplement en parlant.
- La transmission par voie digestive - dite fécale-orale - concerne des virus particulièrement résistants, tels que les virus de gastro-entérites, présents dans les selles, contaminant le milieu extérieur et introduits dans l'organisme par l'alimentation.
- La transmission par voie sexuelle implique les différents virus qui peuvent être présents dans les lésions ou les sécrétions génitales.
"Dans tous les cas, la pénétration du virus dans l'organisme peut être relayée par une contamination des mains qui reste un mode de transmission majeur." insiste le virologue.
Conséquences sur le système immunitaire ?
Quand un virus se réplique chez l'homme, son organisme réagit car il identifie les molécules du virus comme étrangères. "Le système immunitaire va d'abord provoquer une réaction inflammatoire puis une réponse immune spécifique avec production d'anticorps et de cellules lymphocytaires susceptibles d'empêcher la réplication du virus." décrit le spécialiste. Cette réponse immune a deux fonctions :
- Immédiatement : inhiber la multiplication virale et, dans le meilleur des cas, permettre la guérison en éliminant le virus ;
- Ensuite, si l'organisme humain a survécu à la première infection, empêcher toute nouvelle infection par le même virus et assurer ainsi une protection prolongée.
"Certains virus ont la capacité d'échapper à la réponse immune et peuvent donc provoquer des infections prolongées chroniques. Parmi ceux-ci, il y a des virus qui bloquent leur propre réplication dans les cellules et restent ainsi dans un état silencieux à l'abri des anticorps ou des cellules immunes. Il y en a d'autres qui infectent et détruisent directement les cellules du système immunitaire créant un état d'immunodépression et favorisant ainsi le développement d'autres infections, virales ou bactériennes, ou même de tumeurs. C'est notamment le cas du VIH" décrit le Dr Agut.
Comment le combattre ?
"Un des adages de la médecine est qu'il vaut mieux prévenir que guérir. C'est particulièrement vrai dans la lutte contre les infections virales." insiste le virologue.
- L'hygiène reste un des moyens les plus efficaces de cette lutte, d'autant plus que cette stratégie est utile aussi contre tous les autres agents infectieux. Le lavage fréquent des mains est ainsi un mode universel de prévention des infections.
Parmi les mesures d'hygiène à appliquer spécifiquement dans les établissements de soins, au lavage fréquent des mains s'ajoutent : L'utilisation de matériel médical à usage unique, Les circuits adaptés d'élimination des déchets, La désinfection des surfaces de travail.
- Dans la vie quotidienne, en situation d'épidémie, la prévention de la transmission aérienne des virus passe par : Les gestes barrières, Le port de masques. La distanciation sociale.
- "Pour les virus transmis par le sang (en particulier VIH, virus de l'hépatite B, virus de l'hépatite C), le criblage des donneurs de sang et d'organes est effectué en vue d'exclure du don les sujets à risque lors des transfusions ou des greffes." explique le virologue. Quand l'infection survient et que la gravité de la maladie l'impose, des médicaments antiviraux spécifiques, disponibles pour certaines infections virales, peuvent être administrés : infection à VIH, hépatite C, hépatite B, grippe, herpès. "En général, chacun de ces antiviraux n'est actif que contre un virus donné, ce qui souligne encore la nécessité d'identifier correctement le virus causal avant de traiter. Ils peuvent être administrés sous la forme d'associations quand plusieurs d'entre eux sont dirigés contre le même virus et cela renforce en général leur efficacité." Ces antiviraux peuvent, dans certains cas, être administrés à titre préventif pour empêcher l'infection chez une personne qui a été exposée au virus.
- Enfin, on peut combattre la propagation d'un virus à l'aide d'un vaccin. Comme le détaille le virologue "les vaccins ont pour but d'induire une réponse immune protectrice sans qu'il y ait eu la maladie et contribuent à réduire le nombre des individus sensibles à l'infection au sein d'une population, limitant ainsi la dissémination épidémique de l'infection." La vaccination a même permis l'éradication de la variole, maladie qui a disparu de la surface de la Terre, et l'éradication de la poliomyélite est proche de son terme. La vaccination contre la rougeole, quand elle a été parfaitement effectuée, a permis de diminuer la survenue d'épidémies dévastatrices chez les enfants, notamment dans les pays pauvres.
"L'administration d'anticorps provenant de personnes immunisées est un substitut provisoire de la vaccination mais n'a pas son efficacité de prévention au niveau collectif." ajoute le docteur Agut.
Merci au Dr Henri Agut, médecin virologue à Paris.