Groupe sanguin Rh null (sang en or) : le plus rare du monde ?

Groupe sanguin Rh null (sang en or) : le plus rare du monde ?

Certains groupes sanguins sont parmi les plus rares du monde. Le "sang en or" est un fluide précieux, mais il peut être source d'inquiétudes chez le porteur.

Qu'est-ce que le groupe sanguin Rh null ?

Avant d'évoquer le groupe Rhésus null, il nous faut comprendre ce qu'est un groupe sanguin. "Chez l'être humain, nous connaissons actuellement 44 groupes sanguins, nommés aussi familles ou systèmes de groupes sanguins, dont le plus connu est le système ABO", explique Thierry Peyrard, biologiste médical et directeur du Département national de référence en immuno-hématologie et sang rare à l'Etablissement français du sang. Un autre système majeur est le système RH ou Rhésus. Au sein de ces différentes familles de groupes sanguins, on retrouve ce que l'on appelle des antigènes, molécules présentes ou absentes à la surface des globules. Pour mémoire, un antigène est une substance capable d'engendrer des anticorps en situation d'incompatibilité. "Dans le système Rhésus, nous dénombrons 56 antigènes différents, positifs ou négatifs, selon les individus. Lorsqu'une personne est Rhésus négatif, il manque un antigène dont le nom est  D. Environ 15 % de la population en Europe est Rhésus négatif, autrement dit D négatif, ce qui n'est donc pas rare du tout", tient à rappeler Thierry Peyrard. En revanche, lorsqu'une personne est Rhésus null, "tous les antigènes du système Rhésus sont absents au niveau de la surface des globules rouges. Ce groupe sanguin est extrêmement rare, car nous comptons quelques dizaines d'individus Rhésus null dans le monde, pour une dizaine de donneurs de sang plus ou moins actifs au niveau mondial.

"En France, en 18 ans de carrière, nous avons trouvé 3 groupes Rhésus null"

En France, en 18 ans de carrière, nous avons trouvé 3 groupes Rhésus null, dont un en Belgique, confesse le biologiste. Et ces personnes faisaient partie du circuit patient : nous n'avons donc jamais trouvé de nouveaux donneurs Rhésus null". "On appelle le groupe sanguin Rhésus null "le sang en or", car il s'agit du sang universel pour tous les groupes sanguins rares du système Rhésus. Il existe en effet de nombreux autres groupes sanguins rares affiliés à la famille Rhésus, beaucoup moins rares que le Rhésus null. A titre d'exemple, le groupe RH:-18 est rare et on le retrouve principalement dans les populations originaires d'Afrique Sub-saharienne, mais nous n'avons que très peu de donneurs. Ce groupe rare est aussi retrouvé chez certains patients souffrant de drépanocytose. Ces patients doivent, s'ils sont immunisés avec un anticorps anti-RH18, obligatoirement être transfusés avec le même sang rare que le leur, ou avec du sang Rh null dans la mesure où ce dernier peut être considéré comme universel", détaille le biologiste.

Quelles sont les conséquences chez une personne porteuse de ce groupe sanguin ?

Le groupe sanguin Rhésus null est facilement dépistable dans un bilan de routine ou lors d'une grossesse. "Pour les autres groupes sanguins rares, plus de 190 sont connus chez l'Homme, nous ne les recherchons pas systématiquement mais si l'anticorps correspondant au groupe rare est présent, les bilans de routine avant une hospitalisation ou lors d'un suivi de grossesse sont une manière indirecte de les mettre facilement en évidence. Chez une personne Rhésus null, il n'existe aucun risque à la première transfusion sanguine (en l'absence de grossesse préalable), car le système immunitaire n'a pas encore été stimulé. Il faut laisser le temps aux cellules du système immunitaire de s'activer. Le risque commence à apparaître à la seconde transfusion ou lors de la deuxième grossesse). Si l'individu s'est immunisé, c'est-à-dire que l'organisme à fabriquer l'anticorps correspondant à son groupe sanguin rare, alors il est impératif de donner du sang compatible. C'est à ce moment que nous faisons appel à la Banque de sang rare, indique le directeur du Département national de référence en immuno-hématologie et sang rare.

Exceptionnellement, un groupe sanguin rare peut être associé à une pathologie, mais pas le groupe Rh null.

Et de poursuivre : "avant toute transfusion, nous réalisons une RAI (Recherche d'Anticorps Irréguliers). Cela nous permet de savoir si le patient présente des anticorps dirigés contre les globules rouges de donneurs de sang qui serviraient à le transfuser". Exceptionnellement, un groupe sanguin rare peut être associé à une pathologie, mais pas le groupe Rh null. Les personnes de ce groupe ne sont pas malades, bien qu'elles présentent une fragilité au niveau des globules rouges par rapport à la population générale. En effet, les protéines Rhésus ont un rôle dans la stabilisation de la membrane du globule rouge. En moyenne, un globule rouge a une durée de vie de 120 jours. Chez un sujet du groupe Rh null, elle est plus courte. Toutefois, leur moelle osseuse parvient à compenser ce léger déficit. Par conséquent, leur taux d'hémoglobine est un peu plus faible que la moyenne mais sans être pathologique.

Est-ce le groupe sanguin le plus rare du monde ? 

Selon Thierry Peyrard, le "sang en or" est très rare, mais ce n'est pas forcément le plus rare du monde. Concernant le groupe Rhésus null, nous comptons environ 1 cas sur 10 millions d'individus. Néanmoins, l'Établissement Français du Sang connaît des patients ou des familles de patients ayant d'autres types de groupe sanguin parfois uniques au monde, retrouvés chez un seul individu ou uniquement dans une fratrie.

Est-il compatible avec tous les autres groupes sanguins ? 

Ce qui rend ce sang particulièrement attractif est le fait qu'il soit considéré comme universel. Le groupe Rhésus null est compatible avec tous les groupes sanguins Rhésus rares. Le "sang en or" est donc très précieux : en pratique, il peut répondre à de nombreux problèmes transfusionnels rencontrés en particulier chez les patients souffrant de drépanocytose ayant un groupe sanguin rare du système Rhésus. "Un seul donneur Rhésus null actif est répertorié dans les bases de données en France, même s'il habite en Suisse. Ce donneur vient donner son sang à la frontière, puis les poches sont transférées à Paris pour être congelées à la Banque nationale de sang rare. Pour préserver l'intégralité des globules rouges, la congélation se fait à - 80 °C et est réservée au sang rare en raison du coût important d'une telle conservation au long cours", précise Thierry Peyrard.

Quelle est la prise en charge d'un porteur de groupe sanguin Rh null ?

Le sang Rhésus null est réservé aux personnes du même groupe immunisées avec l'anticorps correspondant, qui ont déjà été transfusées ou ayant eu des grossesses. En effet, en cas d'hémorragie ou d'intervention chirurgicale, donner le même sang au patient, soit Rh null, est impératif. "Nous pouvons aussi lancer une aide internationale grâce au réseau sang rare. Nous pouvons être amenés à contacter nos collègues, mais dans la quasi-totalité des cas, (plus de 99,9 % des situations), la France sait gérer ses stocks de sang rare de manière autonome. Si un appel est lancé en provenance d'un autre pays, nous apportons bien évidemment notre aide, si nous avons un certain degré de confort, en veillant toujours à préserver nos stocks. En cas d'urgence, nous pouvons faire rapidement parvenir un don à l'international grâce à d'importants moyens logistiques". "Lorsque l'on trouve un groupe sanguin rare chez quelqu'un, nous l'encourageons à donner son sang pour alimenter la Banque nationale de sang rare et nous proposons à sa fratrie d'être testée.

"D'un point de vue génétique, il existe une chance sur quatre de retrouver ce même groupe rare chez un frère ou une sœur"

D'un point de vue génétique, il existe une chance sur quatre de retrouver ce même groupe rare chez un frère ou une sœur. La communication de l'existence d'un groupe sanguin rare auprès d'un patient ou d'un donneur de sang est un processus délicat : en effet, toutes les personnes ne vont pas réagir de la même manière. Soit elles sont angoissées à l'idée d'avoir des problèmes de santé ou de voyager en cas de besoin de transfusion, soit elles voient leur rareté comme un avantage unique pour le bénéfice des patients avec le même groupe rare que le leur. Dans tous les cas, le laboratoire de référence national est là pour accompagner avec pédagogie toute personne qui souhaite obtenir des renseignements sur son groupe sanguin rare", tient à rappeler le biologiste médical Thierry Peyrard.

Merci à Thierry Peyrard, biologiste médical et directeur du Département national de référence en immuno-hématologie et sang rare à l'Etablissement français du sang.

  • Toutsurlatransfusion.com : https://www.toutsurlatransfusion.com/index.php
  • Etablissement Français du Sang : https://dondesang.efs.sante.fr/don-de-sang-et-diversite-tous-concernes