Injection intracaverneuse : comment la faire, prix, effets secondaires

L'injection intracaverneuse est une méthode consistant à faire pénétrer des médicaments (prostaglandines) dans les corps caverneux du pénis pour traiter une dysfonction érectile ("impuissance"). Comment faire ? Après une prostatectomie ? Explications avec le Dr Ala Chebbi, urologue et andrologue au Groupe Hospitalier Paris Saint-Joseph.

Injection intracaverneuse : comment la faire, prix, effets secondaires
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L'injection intracaverneuse est une méthode consistant à faire pénétrer des médicaments dans les corps caverneux du pénis afin de traiter la dysfonction érectile ou "impuissance". Elle a été initiée pour la première fois en 1980. Comment ça marche ? Quels sont les produits injectés ? Y a-t-il des risques et effets secondaires ? Explications.

Définition : en quoi consiste une injection intracaverneuse ?

"Une injection intracaverneuse (IIC) consiste à s'auto-injecter au niveau du pénis un produit permettant de provoquer une érection par un mécanisme d'afflux sanguin local dans les corps caverneux" nous répond le Dr Ala Chebbi, urologue et andrologue au Groupe Hospitalier Paris Saint-Joseph. Le pénis se compose de deux corps caverneux et du corps spongieux. A l'intérieur de chaque corps caverneux se trouve l'artère principale de l'érection appelée "artère caverneuse".

Comment faire une injection intracaverneuse ?

schéma corps caverneux et corps spongieux du pénis
Anatomie du pénis montrant les corps caverneux et spongieux © 123RF-bilderriese

L'injection intracaverneuse est réalisée par le patient lui-même. C'est le médecin qui prescrit l'injection qui lui explique comment procéder. "La ou les premières injections intracaverneuses doivent ainsi être réalisées par un médecin maîtrisant la technique (urologue, andrologue, sexologue, angiologue) en consultation, précise notre interlocuteur. Les patients ont généralement une peur et une appréhension liées à l'aiguille mais elles disparaissent rapidement après la première injection réalisée en consultation. Il est par ailleurs possible d'utiliser un stylo injecteur réutilisable permettant de masquer l'aiguille et pouvant apporter un confort supplémentaire."

► L'injection se fait sur le côté droit ou gauche du pénis. Pas sur le dessus du pénis car il existe une veine dorsale et pas sur le dessous non plus car il y a l'urètre.

► L'injection est réalisée à l'aide d'une aiguille très fine "qui n'est pas douloureuse" précise le médecin.

Quel délai entre deux injections ?

L'intervalle entre deux injections doit être d'au moins 24 heures, à raison de deux injections par semaine. "La dose utile permettant un rapport sexuel satisfaisant doit être déterminée au cabinet médical et après apprentissage des auto-injections par le patient" précise notre interlocuteur.

"Il s'agit d'une érection artificielle qui ne nécessite pas de stimulation sexuelle"

Quels sont les produits injectés et pourquoi ?

Il s'agit d'une substance vasodilatatrice : la prostaglandine E1. "Elle va induire la dilatation des vaisseaux sanguins en relâchant les fibres musculaires lisses à l'intérieur des corps caverneux. Cette accumulation de sang va permettre aux corps caverneux de s'élargir et ainsi d'obtenir une rigidité du pénis. Il s'agit d'une érection artificielle qui ne nécessite pas de stimulation sexuelle" poursuit le Dr Chebbi.

Quelle efficacité sur "l'impuissance" ?

La réalisation d'injections intracaverneuses n'est pas immédiatement proposée à un homme qui vient consulter pour des problèmes érectiles. Elles sont indiquées en cas d'échec ou de contre-indication du traitement médicamenteux oral (Viagra®, Cialis®), ou dans le cadre d'une rééducation à l'érection après chirurgie pour cancer telle qu'une prostatectomie (ablation de la prostate) ou cysto-prostatectomie (ablation de la vessie et de la prostate). "L'efficacité des IIC est variable selon la cause de l'impuissance, de 55 à 93%, explique notre interlocuteur. Le taux d'abandon est en revanche non négligeable : 1 patient sur 2 continue à pratiquer les injections un an après leur instauration." 

Quelle efficacité après une prostatectomie ?

Une prostatectomie soit l'ablation de la prostate peut entraîner des problèmes d'érection. Les injections intracaverneuses peuvent alors être proposées au patient comme rééducation érectile. "Le but est d'éviter la fibrose post-opératoire des corps caverneux (du pénis, ndlr) en instaurant les injections suffisamment tôt" détaille notre interlocuteur. Le protocole est généralement défini par deux injections par semaine jusqu'à la récupération éventuelle d'érections spontanées. Concernant l'efficacité de la méthode "les données dont nous disposons actuellement ne permettent pas d'affirmer la supériorité de l'une des méthodes par rapport aux autres (traitement oral type Viagra® ou Cialis®, pompe vacuum ou injection) en termes de réhabilitation à l'érection".

Quels sont les effets secondaires des injections intracaverneuses ?

Il existe des effets secondaires après des injections intracaverneuses comme : 

  • Des douleurs du pénis surtout au début de traitement et "généralement liées à l'érection induite et non à l'injection en elle-même". "Ces douleurs, qui surviennent dans environ un quart des cas, peuvent régresser progressivement au fil des injections" rassure le Dr Chebbi.
  • Un hématome au point d'injection. Il n'est pas grave et peut être évité en réalisant une compression manuelle à l'aide d'une compresse pendant quelques secondes, à la suite de l'injection.
  • Des érections prolongées, voir un priapisme, surviennent dans 1 à 2 % des cas.
  • Une fibrose localisée des corps caverneux survient dans 0.8 à 2 % des cas.

Quel est le risque de priapisme après l'injection ?

Les injections intracaverneuses ont pour but de déclencher l'érection. Si les doses utilisées sont trop élevées et non encadrées médicalement, il y a un risque de priapisme c'est-à-dire de la persistance d'une érection pendant plus de 4 heures. Cet effet secondaire est "peu fréquent" rassure cependant le Dr Chebbi.

Quelles sont les contre-indications ?

Les contre-indications aux injections intracaverneuses sont :

  • Une hypersensibilité aux prostaglandines.
  • Une maladie psychiatrique telle qu'une psychose, une paraphilie.
  • Une pathologie prédisposant à la survenue de priapismes répétés ou d'érections prolongées, telle que la drépanocytose.
  • Une grossesse chez la partenaire en raison du passage de l'alprostadil (prostaglandine E1) dans le sperme et le liquide séminal.

Pour les patients qui ont une courbure acquise du pénis caractérisée par le terme de "maladie de Lapeyronie" ou une fibrose des corps caverneux peuvent faire des injections intracaverneuses mais ils doivent avoir une surveillance médicale particulière. Enfin, les patients ayant des maladies cardio-vasculaires stables avec un suivi cardiologique régulier et/ou qui prennent des traitement anticoagulants peuvent faire des injections intracaverneuses.

Quel est le prix des injections intracaverneuses ?

L'injection coûte à l'unité environ une dizaine d'euros. Le prix peut varier selon les lieux de vente.

Est-ce remboursé ?

Pour être remboursé, il faut avoir l'une des pathologies suivantes et une ordonnance de prescription de médicaments d'exception :

  • Neuropathie diabétique avérée,
  • Para ou tétraplégie
  • Séquelles de la chirurgie (prostatectomie radicale, cystectomie totale et exérèse colorectale) ou de la radiothérapie abdomino-pelvienne
  • Sclérose en plaques
  • Séquelles de priapisme
  • Séquelles de la chirurgie vasculaire (anévrisme de l'aorte)
  • Traumatismes du bassin compliqués de troubles urinaires.

Merci au Dr Ala Chebbi, urologue et andrologue au Groupe Hospitalier Paris Saint-Joseph.

Source : Les injections intracaverneuses. Dr Ronald Virag. Editions John Libbey Eurotext. 2004. 

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