Cryptorchidie (ectopie testiculaire) : conséquences, opération, infertilité
La position normale des testicules, à l'intérieur du scrotum, n'est pas toujours acquise au moment de la naissance. Il arrive que l'un des testicules (ou les deux) ne soit pas descendu dans les bourses. On parle d'ectopie testiculaire ou de cryptorchidie. Une intervention chirurgicale peut être nécessaire car c'est un facteur de risque d'infertilité et de cancer testiculaire.
La position normale des testicules, à l'intérieur du scrotum, n'est pas toujours acquise au moment de la naissance. Il arrive que l'un des testicules (ou les deux) ne soit pas descendu dans les bourses. Les testicules, qui migrent de l'abdomen vers le scrotum durant la grossesse, peuvent alors avoir une localisation entre l'abdomen, l'aine, le périnée... Ils nécessitent souvent une intervention chirurgicale. Ce sont des facteurs de risques d'infertilité et de cancer testiculaire.
Définition : c'est quoi une ectopie testiculaire ?
"On va parler d'anomalie de migration testiculaire ou de testicule non descendu plutôt que d'ectopie testiculaire ou de cryptorchidie, précise d'emblée le Dr Olivier Chamond, chirurgien urologue pédiatrique. Il s'agit d'une anomalie congénitale qui se traduit par un arrêt plus ou moins haut dans la migration du testicule de l'abdomen vers le scrotum. Au lieu d'être au fond de la bourse à la naissance, il peut être non palpable, à l'intérieur de l'abdomen, ou palpable au niveau du pli de l'aine ou du pubis." L'ectopie testiculaire est constatée chez 1 à 2 nouveau-nés sur 100. On peut observer une migration spontanée du testicule dans les premiers mois de vie mais jamais après 6 mois. Parfois, le testicule peut être présent par intermittence dans la bourse et remonter dans le pli de l'aine à certains moments : c'est le testicule ascenseur (ou oscillant, baladeur, yoyo…) lié à un réflexe crémastérien. "C'est un phénomène assez fréquent jusqu'à la puberté et sans conséquence sur le développement du testicule".
Chez le bébé
L'anomalie de migration testiculaire touche 3 à 5 % des garçons nés à termes et 2% des nourrissons de plus de 6 mois. En revanche, elle touche 30% des prématurés.
Chez l'adulte
"On ne devrait pas récupérer de jeunes adultes avec un testicule non descendu !", insiste le médecin. "Si on se rend compte qu'à la puberté le testicule ne s'est pas développé, et qu'il a un risque de dysfonctionner, on peut proposer de l'enlever et de mettre à la place une prothèse. Mais cela reste très rare."
Quelles sont les causes ?
Schématiquement, on définit plusieurs causes :
→ La prématurité est un facteur de risque : "30% des prématurés ont un problème de testicule non descendu à la naissance, contre 3 à 5 % des nouveaux nés à terme", explique le chirurgien.
→ Des causes environnementales : "On a constaté que l'incidence du testicule non descendu est en augmentation (X2) depuis de nombreuses années dans les pays industrialisés. Tout comme le cancer du testicule, le cancer de la prostate, et d'une manière générale l'altération du spermogramme". Ce qui implique un facteur environnemental. "Des perturbateurs endocriniens peuvent être à l'origine de cette progression".
Seuls 20 à 30 % des cas sont bilatéraux.
→ Des causes génétiques : elles sont peu fréquentes. "On retrouve un antécédent familial dans près d'un quart des cas. Des études ont retrouvé un risque de 4,5 % pour qu'un nouveau-né dont le père a eu un problème de migration testiculaire naisse avec le même problème". Certaines anomalies chromosomiques peuvent également avoir une incidence sur la migration testiculaire, dans 3 à 4 % des cas (5 % des formes bilatérales).
Quels sont les symptômes ?
"Il n'y a pas de symptôme, c'est juste une constatation de l'examen clinique", répond le médecin.
Cryptorchidie unilatérale ou bilatérale ?
Les deux cas sont possibles. "Mais l'anomalie de migration testiculaire est plus fréquemment unilatérale, assure le spécialiste. Seuls 20 à 30 % des cas sont bilatéraux. Pour ces patients là, le rôle des facteurs environnementaux et génétiques est bien plus important. Tout comme les conséquences fonctionnelles, notamment sur la fertilité."
Près de 10% des cancers testiculaires des jeunes adultes ont un antécédent de cryptorchidie.
Quelles sont les conséquences ?
De nombreuses études ont montré que l'anomalie est liée à un mauvais développement du testicule (dysgénésie testiculaire) qui ne va pas produire correctement les facteurs nécessaires à sa migration. "Ce défaut de développement du testicule peut engendrer des troubles de la fertilité par défaut de qualité ou de quantité des spermatozoïdes" détaille le chirurgien. "On ne l'aborde pas forcément en première intention mais à l'âge adulte, des cas de cancers testiculaires peuvent apparaitre. Près de 10% des cancers testiculaires des jeunes adultes (entre 20 et 35 ans) ont un antécédent de cryptorchidie. Le risque de cancer est multiplié par 4 à 6 par rapport à un testicule en place à la naissance. C'est assez significatif." Il n'y a pas de surveillance systématique, "car on part du principe que ce cancer est facilement détectable : le testicule grossit et on le repère". En revanche, le cancer du testicule qui est resté dans l'abdomen est plus difficile à repérer.
Un risque d'infertilité ?
Quand on prend toutes les causes d'infertilité masculine, dans quasiment 10% des cas on retrouve un problème de migration du testicule. "Pour fabriquer des spermatozoïdes, le testicule doit être dans les bourses. L'opération est donc essentielle. S'il n'y a pas de retentissement significatif sur la fertilité dans les formes unilatérales opérées, le taux de stérilité s'approche de 50 % chez les garçons opérés de formes bilatérales", atteste le chirurgien.
Quel est le diagnostic ?
Le diagnostic n'est que clinique. "Si on arrive à palper le testicule, aucun examen complémentaire n'aura d'intérêt, assure le Dr Chamond. Une échographie n'apportera aucune précision sur la position du testicule non descendu. Même s'il est situé à l'intérieur de l'abdomen". Idem pour l'IRM et le scanner. L'examen des testicules se fait dès la naissance. "Il y a maintenant une rubrique dans le carnet de santé qui concerne les organes génitaux externes. Elle doit être remplie par le pédiatre ou la sage-femme qui examinent le bébé à la naissance". Cet examen doit être ensuite systématique les premières années de la croissance.
Quels sont les traitements ?
Le seul traitement est chirurgical. "Depuis 2007, il existe un consensus dans les pays développés qui incite les chirurgiens pédiatriques à opérer les enfants le plus tôt possible, entre 6 mois et 1 an", souligne notre interlocuteur. On peut attendre une migration spontanée du testicule pendant les premiers mois de vie, grâce à une influence hormonale. "Pendant environ 3 mois, le bébé est en effet imprégné des hormones de sa maman".
Quand envisager l'opération ?
Les résultats sont meilleurs à long terme si on opère le plus précocement possible. "C'est une intervention de routine pour des chirurgiens pédiatriques, secondés par des anesthésistes aguerris, rassure notre interlocuteur. Elle se fait sous anesthésie générale en ambulatoire : l'enfant rentre le matin et ressort l'après-midi. Une petite incision dans le pli de l'aine permet de libérer tout ce qui retient le testicule et d'allonger ses vaisseaux ; une seconde petite cicatrice sur le scrotum est réalisée pour y positionner le testicule". En quelques jours, l'enfant a récupéré. "Pour les testicules situés à l'intérieur de l'abdomen, on opère en coelioscopie, c'est-à-dire à l'aide d'une petite caméra insérée au niveau du nombril et des instruments spécifiques de la pédiatrie de 3 mm". Cette intervention est prise en charge par l'assurance maladie.
Merci au Dr Olivier Chamond, chirurgien urologue pédiatrique, à la clinique Marcel Sembat à Boulogne Billancourt (92).