Mourir de vieillesse : c'est quoi, signes, à quel âge ?
Mourir de vieillesse est une notion qui interpelle : cela veut-il dire mourir âgé et bien portant ? Mourir d'une belle mort sans souffrance ? Mourir entouré des siens ? A quel âge ? Définition, causes, signes : interviews de professionnelles.
Définition : ça veut dire quoi mourir de vieillesse ?
Mourir de vieillesse signifierait pour la grande majorité de la population mourir âgé d'une belle mort : dans son lit, tranquillement, auprès des siens. Cette image de la mort est singulière et ce type de mort reste assez rare. "En pratique, on ne meurt pas de vieillesse en fait, on meurt de maladie. On meurt d'un événement qui survient dans la vie, ainsi on meurt en étant âgé de plein de façons", souligne le Dr Sophie Moulias. Lorsqu'il est question du décès d'une personne âgée, ou très âgée, diagnostiquée d'aucune pathologie (du moins publiquement), il est assez commun d'entendre que "cette personne est morte de vieillesse". À l'image d'une bougie dont la flamme s'éteindrait au terme de son jaillissement. "La vieillesse est le symptôme de la fin, d'un corps qui lâche, soit touché par une pathologie qui raccourcit la durée de vie ou simplement par des organes qui s'épuisent et c'est la fin physiologique de la vie", ajoute Giovanna Marsico.
À quel âge meurt-on de vieillesse ?
Mourir de vieillesse, c'est mourir au grand âge, à partir de 85 ans.
L'âge de la mort, c'est la bataille de l'espérance de vie. Aujourd'hui, en France, l'espérance de vie chez la femme est de 85,4 ans pour les femmes et 79,4 ans pour les hommes (chiffres extraits des statistiques de l'état civil et des estimations de population, Insee*, janvier 2022). Mourir de vieillesse serait donc mourir à un âge plus élevé que celui de l'espérance de vie : autour de 90 ans pour la femme et de 80 ans pour l'homme. "Mourir de vieillesse, c'est mourir au grand âge, à partir de 85 ans. Mais selon le mode de vie et le milieu socio-professionnel, cet âge s'allonge et se situe à partir de 90 ans dans les milieux et pays favorisés notamment", observe Giovanna Marsico. "En effet, on vit tous plus longtemps et mieux, en bonne santé ou avec moins d'accidents de la vie que les générations antérieures. Ce qui n'est pas le cas dans tous les pays", ajoute le Dr Moulias.
Une étude issue de la revue Gérontologie et société (voir source plus bas) qui s'est intéressée à la définition et à la représentation du grand âge en questionnant deux types de population : des professionnels de santé et des patients âgés, a offert des résultats intéressants sur cette problématique de la vieillesse. Pour les professionnels de santé, le grand âge est défini par l'autonomie de la personne âgée, à savoir l'augmentation du temps et de la capacité à s'habiller seule. Alors que pour les patients âgés, il se caractérise par l'incapacité de pouvoir faire l'amour. "Ces résultats sont assez riches en enseignement et démontrent le point de vue de l'humain versus le point de vue du professionnel sur la question du grand âge", observe Giovanna Marsico.
Quels sont les symptômes d'une mort de vieillesse ?
La mort est un processus biologique déclenché par le premier organe qui lâche du fait du grand âge. Cet organe peut dépendre de la pathologie qui touche la personne âgée : cancer, problème cardiaque, maladie d'Alzheimer... Selon un rapport de l'Insee de 2007, la première cause de mortalité chez les personnes âgées sont les tumeurs (130 393), suivies de près par les maladies cardiovasculaires (131 439). Mourir de vieillesse, c'est s'éteindre petit à petit : avoir la mémoire qui flanche, voir les gestes du quotidien se ralentir… C'est aussi laisser son corps allait jusqu'au bout. "Mourir de vieillesse, c'est aussi envisager la mort dans la physiologie de la vie et en parler avant de disparaître pour partir de la manière dont on l'envisage", conclut Giovanna Marsico.
Merci au Dr Sophie Moulias, gériatre à Paris et membre de la Société française de gérontologie et de gériatrie et Giovanna Marsico, directrice du Centre National Fin de vie Soins palliatifs.
*Insee : Institut national de la statistique et des études.
**Thibaud A, Hanicotte C. Quelles représentations les soignants ont-ils de la sexualité des sujets vieillissants ? Gérontologie et société 2007/3 ; vol. 30 / n° 122, p. 125-37.