Somnambulisme : cause, âge, que faire en cas de crise ?
Vous marchez, parlez, écrivez même pendant votre sommeil ? Vous êtes peut-être somnanbule. Le Pr Isabelle Arnulf, cheffe de service, neurologue et somnologue à Hôpital Pitié Salpêtrière à Paris nous en dit plus sur ce trouble du sommeil mal connu du grand public.
Qu'est-ce que le somnambulisme ?
C'est un trouble du sommeil pendant lequel la personne effectue des actes moteurs complexes (marcher, parler, agir, écrire) dans un état intermédiaire en le sommeil lent profond et l'éveil. "Elle est donc capable d'actes élaborés, mais dans un état de confusion mentale qui peut conduire à des actions inappropriées, ou dangereuse pour elle ou pour ses voisins de chambre", explique le Pr Isabelle Arnulf, cheffe de service, neurologue et somnologue à Hôpital Pitié Salpêtrière (Paris).
Symptômes : comment reconnaître le somnambulisme ?
"On suspecte un somnambulisme quand la personne la nuit s'assoit dans son lit, se lève, déambule, manipule les objets, parle toute seule (voire répond aux questions), les yeux ouverts, comme si elle était éveillée ; mais en même temps, certains éléments indiquent qu'elle n'est pas tout à fait réveillée : confusion, regard vague, réponse évasive et hors de propos, actes inappropriés au contexte (exemple uriner dans le placard), amnésie possible des faits ensuite ", décrit le Pr Arnulf. Cela survient généralement dans les deux premières heures du sommeil.
Cause : qu'est-ce qui provoque le somnambulisme ?
"Le somnambulisme correspond à un réveil incomplet "à moitié", le cerveau étant dans un état hybride entre la vielle et le sommeil : l'arrière du cerveau est suffisamment éveillé pour voir, agir et interagir, mais l'avant du cerveau est encore endormi, dans un demi rêve et en sommeil lent profond, c'est à dire sans capacité de réflexion complexe, sans bien se rendre compte de ce qui se passe et sans bien le mémoriser ", détaille la spécialiste du sommeil.
Age et facteurs de risques
Il existe des facteurs de prédisposition à l'apparition du somnambulisme comme le précise le Pr Arnulf :
- un terrain familial : dans les mêmes familles certains sont somnambules, d'autres simplement de gros parleurs dans leur sommeil, ou ont eu enfant des terreurs nocturnes (hurlement en début de nuit associé à une peur intense et parfois à de brèves visions de catastrophe telles que le plafond qui s'écroule sur le lit). On pense donc qu'il y a une susceptibilité génétique.
- le jeune âge : le somnambulisme survient plus souvent chez l'enfant (17%) que chez l'adulte (4%), donc on pense qu'il y a aussi un lien avec le développement du cerveau et du sommeil avec l'âge.
Par contre il touche autant les hommes que les femmes. Il existe des facteurs qui favorisent les épisodes de somnambulisme, tels que le manque de sommeil ou un événement stressant le jour d'avant. Et il existe des facteurs qui déclenchent des épisodes (bruit soudain, contact) ou les rendent plus longs et plus sévères (par exemple la prise d'alcool).
Qui et quand consulter ?
Le somnambulisme calme, peu fréquent, ne nécessite pas souvent plus que des mesures de bon sens pour éviter les blessures ou les problèmes : dormir suffisamment, en pyjama (pour ne pas se retrouver nue dehors), sécuriser la chambre, apprendre à se relaxer. "On conseille de consulter quand c'est fréquent (au moins une fois par semaine), qu'il y a eu des actions potentiellement dangereuses (approche et ouverture des fenêtres, sortie du domicile), des blessures ou des risques de blessure de soi ou du compagnon de lit, ou que la personne est fatiguée le matin, ou honteuse de ce qu'elle fait. Bref, quand c'est gênant ou dangereux", rapporte le Pr Arnulf. Les médecins qui connaissent le mieux le somnambulisme sont les médecins du sommeil (une sur-spécialité exercée par des neurologues, des psychiatres et des pneumologues).
Test et diagnostic
Le diagnostic est posé sur le récit du dormeur et de ceux qui l'ont observé. "S'ils peuvent apporter au médecin une vidéo faite à la maison c'est précieux. Un enregistrement du sommeil et de l'électroencéphalogramme avec de nombreuses électrodes collées sur les scalp sous caméra vidéo en infrarouge, souvent sur deux nuits, en laboratoire de sommeil permet d'éliminer d'autres diagnostics (épilepsie nocturne, troubles du sommeil paradoxal), d'identifier des éléments directs ou indirects d'éveils confus en sommeil lent profond, et de rechercher des facteurs qui favorisent les accès (apnées, ronflement, mouvements de jambes par exemple)", détaille la spécialiste.
Que faire pendant une crise de somnambulisme ?
Si l'on assiste à une crise de somnambulisme, il faut parler calmement au somnambule, avec une voix douce, lui suggérer de revenir dans le lit. On évite de le maintenir brutalement car il peut devenir agressif sauf bien sûr s'il se met en danger (s'il est en train d'ouvrir ou d'enjamber la fenêtre par exemple).
Comment le soigner ?
Environ 80% des cas chez les enfants vont disparaître à la puberté. Dans beaucoup de cas, expliquer et réduire les facteurs favorisant diminuent les crises. "L'hypnose médicale et la relaxation peuvent aider. Sinon, il existe des traitements médicamenteux qui peuvent être pris soit en continu, soit dans les périodes où l'on n'est pas en sécurité", liste le Pr Arnulf.
Merci au Pr Isabelle Arnulf, cheffe de service, neurologue et somnologue à Hôpital Pitié Salpêtrière à Paris.