Syndrome de Lyell : symptômes, qu'est-ce qui le cause ?
Maladie grave de la peau, le syndrome de Lyell se caractérise par la destruction et le décollement de l'épiderme. La prise de certains médicaments est très souvent en cause.
Le syndrome de Lyell est une maladie aiguë, très rare et grave, qui laisse des séquelles chez le patient. "Nous estimons entre 2 et 6 cas par million d'habitant par an, dans le monde. Il touche aussi bien les adultes que les enfants ainsi que les personnes âgées. Toutefois, l'âge moyen des patients se situe entre 40 et 50 ans" explique le Professeur Saskia Oro, médecin dermatologue et vénérologue à l'hôpital Henri-Mondor, site coordonnatrice du centre de référence français des Dermatoses bulleuses toxiques et toxidermies graves TOXIBUL.
Qu'est-ce que le syndrome de Lyell ?
"Le syndrome de Lyell est une maladie de peau et des muqueuses. Il touche l'épiderme, la couche la plus superficielle de la peau ainsi que les muqueuses buccales, oculaires ou génitales. Les lésions sont plus ou moins étendues sur la peau. Parfois, elles s'étendent à tout le corps" détaille notre interlocutrice.
Quelles différences avec le syndrome de Stevens-Johnson ?
La nécrolyse épidermique (NE) toxique regroupe le syndrome de Lyell (NE toxique) et le syndrome de Stevens-Johnson. "Il s'agit de la même maladie, impliquant les mêmes processus en cause. Toutefois, nous parlons du syndrome de Stevens-Johnson lorsque moins de 10% de la surface corporelle est atteinte et du syndrome Lyell ou nécrolyse épidermique toxique quand les lésions concernent plus de 30% de la surface corporelle. Entre deux, c'est le syndrome de chevauchement", répond le médecin.
Qu'est-ce qui cause le syndrome de Lyell ?
Dans 85% des cas, la cause du syndrome de Lyell est l'allergie médicamenteuse, souvent difficile à prévoir. "L'organisme du patient fait une reconnaissance anormale du médicament, ce qui provoque une allergie violente, soudaine, grave et imprévisible.
Dans 85% des cas, la cause du syndrome de Lyell est l'allergie médicamenteuse
L'allergie active les lymphocytes T cytotoxiques, engendrant la fabrications de protéines, notamment la granulysine. Cette dernière est toxique pour l'épiderme, et c'est elle qui est responsable de la destruction de la couche superficielle de la peau. En résumé, nous avons une reconnaissance anormale d'un certain médicament par les lymphocytes T cytotoxiques menant à une réaction inflammatoire intense." D'après la dermatologue, certaines populations présentent une susceptibilité génétique particulière avec certains médicaments. C'est le cas des personnes d'origine asiatique.
Les trois grandes familles de médicaments identifiés comme étant à haut risque de syndrome de Lyell sont :
- Les antiépileptiques : carbamazépine, phénobarbital, phénytoïne et lamotrigine
- L'allopurinol : traitement pour la goutte
- Les antibiotiques sulfamides
D'autres médicaments sont à risque, comme la névirapine, les anti-inflammatoires anti-stéroïdiens (AINS) et les inhibiteurs de la pompe à protons. "Ce sont les principales molécules susceptibles de donner un syndrome de Lyell, même si en théorie, tous les médicaments peuvent provoquer une allergie." Plus rarement, une bactérie de la famille des mycoplasmes est en cause. "Le syndrome de Lyell causé par une infection bactérienne est assez rare chez l'enfant, et très rare chez l'adulte." Les maladies auto-immunes sont aussi une cause possible. Enfin, "parfois, aucune cause n'est retrouvée, nous parlons alors de syndrome de Lyell idiopathique".
Quels sont les symptômes ?
Les symptômes du syndrome de Lyell commencent sur quelques jours. Des petites taches violacées purpuriques (qui ne s'effacent pas à la pression) apparaissent sur la peau. Elles sont souvent très douloureuses. "Le patient présente souvent de la fièvre ainsi qu'une altération de son état général. Des douleurs précoces des muqueuses au niveau de la bouche et des yeux surviennent ensuite. Il s'agit du tableau clinique le plus fréquent" détaille le Pr Saskia Oro. Ensuite, typiquement, la couche la plus superficielle de la peau, l'épiderme, se soulève et forme des cloques (bulles). Lors de ce décollement épidermique, le derme est à nu. Les symptômes sont très douloureux pour le patient, que ce soit sur la peau ou au niveau des muqueuses, à tel point qu'il éprouve des difficultés à s'alimenter.
Il n'y a pas de traitements pour guérir plus vite
L'idéal est de prendre en charge le patient dans un centre habitué afin d'augmenter ses chances de guérison. "Cette maladie est rare et grave, le transfert du patient vers un centre habitué est préférable." Le traitement consiste à attendre que les lésions cicatrisent d'elles-mêmes, pour une guérison spontanée en 10 jours environ. "Nous n'avons pas de traitement pour guérir plus vite de la maladie." Dans un même temps, le traitement consiste à pallier toutes les défaillances du corps liées à l'absence d'épiderme notamment :
- La déshydratation : par une hyperhydratation ;
- La perte calorique, notamment protéique et vitaminique : nutrition par sonde ;
- La perte de chaleur : l'environnement est chauffé ;
- Une tachycardie (cœur qui bat trop vite) ;
- La fièvre.
"En cas d'infection bactérienne avérée, des traitements antibiotiques sont administrés au patient. Des pommades et des crèmes sont appliquées sur la peau et dans les yeux toutes les deux à quatre heures." Certains patients souffrent d'atteintes respiratoires et ORL graves. La prise en charge en réanimation est alors indispensable. "Nous mettons le patient sous sédation et sous intubation afin de mieux le soigner. Les cas graves concernent environ un tiers des patients. La durée du séjour en réanimation varie de quelques jours à quelques semaines."
Le syndrome de Lyell peut mettre en jeu le pronostic vital
Le syndrome de Lyell est une maladie grave pouvant mettre en jeu le pronostic vital : "le risque de mortalité en phase aiguë dans les 6 premières semaines est compris entre 15 et 20 %."
Syndrome de Lyell : quelles séquelles ?
Le syndrome de Lyell est une maladie qui laisse des séquelles parfois sévères. La vie du patient est souvent bouleversée, notamment en cas de séquelles ophtalmologiques. "Les séquelles lors d'une atteinte des yeux en phase aiguë sont plus ou moins graves, comme une sécheresse oculaire, une gêne à la lumière ou à la conduite de nuit. Certaines atteintes sont plus handicapantes, pouvant mener à la cécité. D'autres séquelles existent, comme des séquelles psychologiques, avec la peur de reprendre des médicaments, une anxiété chronique, et parfois, de la dépression. C'est une maladie dont les patients ne sortent pas indemnes. En effet, deux tiers des patients au moins présentent des séquelles pouvant durer des années." Des soins sont nécessaires pendant la phase aiguë, mais une prise en charge est indispensable en phase chronique. "Un soutien associatif est possible, grâce à l'association AMALYSTE ou à des blogs d'anciens patients" conclut le Pr Oro.
Merci au Professeur Saskia Oro, médecin dermatologue et vénérologue à l'hôpital Henri-Mondor, site coordonnatrice du centre de référence français des Dermatoses bulleuses toxiques et toxidermies graves TOXIBUL
- Prise en Charge du Syndrome de Lyell ou Necrolyse Epidermique Toxique - NIH
- TOXIBUL