Maladie de l'homme de pierre : symptômes, évolution, définition

La maladie de l'homme de pierre, ou fibrodysplasie ossifiante progressive (FOP), est une maladie génétique rare qui emprisonne le corps humain dans un deuxième squelette ectopique. Symptômes, causes, traitements…Le point avec le Dr Geneviève Baujat, médecin pédiatre généticien à l'hôpital Necker et spécialiste membre de l'association FOP France.

Maladie de l'homme de pierre : symptômes, évolution, définition
© Ekachai Wongsakul

Définition : qu'est-ce que la maladie de l'Homme de pierre ?

La maladie de l'homme de pierre est une maladie génétique extrêmement rare, dont la fréquence est estimée à environ 1 personne sur 700 000. Elle se caractérise par la survenue d'ossification progressive au sein des muscles, tendons et ligaments du corps. 

Quels sont les symptômes ?

"Les signes de la fibrodysplasie ossifiante progressive se manifestent dès la naissance, avec une déformation des gros orteils qui sont déviés en-dedans et raccourcis (hallux valgus), explique le Dr Geneviève Baujat. Durant la première décade de vie, soit avant l'âge de dix ans, des poussées successives inflammatoires surviennent : elles vont entraîner la formation d'os hétérotopique, c'est-à-dire d'ossification présent en dehors du squelette normal. Cet os hétérotopique va se développer au niveau des muscles et des enthèses (tendons, ligaments et aponévroses des muscles), de manière caractéristique : cela commence généralement dans le haut du dos, puis descend progressivement dans le bas du dos, allant de postérieur en antérieur et du pôle céphalique au pôle caudal, c'est-à-dire que l'ossification anormale va aller de haut en bas et d'arrière en avant." Ces poussées inflammatoires sont très variables d'une personne à une autre (en termes de nombre et fréquence) et vont, ou non, donner de l'os hétérotopique. En moyenne on estime que 80% des poussées entraînent une ossification hétérotopique. "L'os hétérotopique entraîner une limitation croissante de la mobilité des patients : ankylose au niveau articulaire et segmentaire, à savoir au niveau du tronc, des membres, des hanches, des épaules, de la mâchoire et de la région cervicale. Les patients sont peu à peu enfermés dans un second squelette qui se développe petit à petit et va les déliter", continue-t-elle. 

Quelles sont les causes ?

La cause est génétique. Elle est quasiment toujours due à la même mutation (variant pathogène) au niveau du gène ACVR1 qui code pour une protéine qui est un récepteur transmembranaire, jouant sur la voie des BMP, des protéines très importantes pour l'ossification. "La mutation accélère le processus d'ossification de façon anormale en termes de localisation et de temporalité, sous l'influence de facteurs pas encore bien élucidés, dont des facteurs immunologiques. Autrement dit, il y a un processus de déclenchement de fabrication d'os à un endroit qui n'est pas le bon", précise le médecin pédiatre généticien. 

Quel est le diagnostic ?    

"Le diagnostic est souvent évoqué au moment où l'on observe les premières poussées chez l'enfant et que surgit brutalement une tuméfaction, en général dans le haut du dos, dans la région de l'omoplate ou au niveau du cou, comme si l'enfant avait reçu un gros coup", indique la spécialiste. S'ensuit une raideur localisée qui peut parfois se révéler douloureuse. En parallèle, le médecin constate une malformation des gros orteils avec des hallux valgus. Il se distingue de l'hallux valgus classique par le fait qu'il est raccourci et qu'il est congénital, c'est-à-dire présent dès la naissance. "Nous essayons de faire de l'enseignement pour qu'il y ait une détection systématique de cet hallux valgus lors de l'examen du nouveau-né", ajoute-t-elle.

Quels sont les traitements ?

Le traitement repose sur l'association de plusieurs éléments :  

La prévention : "Les mesures préventives sont très importantes parce que les poussées sont souvent déclenchées par des éléments extérieurs. Toute blessure musculaire va entraîner ces poussées et par conséquent cette ossification anormale", note le Dr Geneviève Baujat. Chez le petit enfant, les blessures musculaires sont souvent liées à la vaccination, une biopsie ou encore une intervention chirurgicale. Une infection virale peut aussi engendrer une inflammation qui va être responsable de la poussée d'os hétérotopique. La prévention réside dans le fait de limiter ces facteurs déclencheurs et d'éviter les chutes, qui provoquent elles aussi souvent une série de poussées. 

Les traitements médicamenteux : les poussées doivent être traitées le plus précocement possible grâce à des anti-inflammatoires de deux types : les anti-inflammatoires stéroïdiens (corticoïdes) et les anti-inflammatoires non-stéroïdiens, que l'on utilise différemment en fonction de la localisation de la poussée, selon un schéma de traitement bien établi. "Cela permet de limiter l'intensité de l'inflammation et de limiter l'installation d'os hétérotopique, même si ça n'empêche pas complètement leur développement" commente notre experte. 

Des mesures complémentaires : par exemple au niveau dentaire pour éviter les caries ; la kinésithérapie pour apprendre à bouger, à respirer et à gérer l'équilibre (proprioception) car le mouvement limite la progression de l'os hétérotopique. Enfin, la mise en place de mesures d'adaptation au domicile et sur les lieux de vie comme l'école, le collège et plus tard la vie professionnelle. 

"De nouvelles thérapies commencent à apparaître : ce sont des anti-ossificateurs qui sont actuellement en phase d'essai thérapeutique avec des résultats prometteurs. Ce ne sera pas une baguette magique d'emblée, mais ces médicaments devraient permettre de freiner significativement l'évolution de cette pathologie", se réjouit la spécialiste membre de l'association FOP France. 

Quelle est l'espérance de vie ?

Aujourd'hui, l'espérance de vie est dite de 56 ans mais il existe en réalité une grande variabilité d'une personne à l'autre, notamment selon l'intensité de l'inflammation, la localisation des poussées et l'évolution de la maladie avec la quantité d'os hétérotopique qui se forme. "Notons que les personnes ayant une FOP ont des capacités intellectuelles tout à fait normales voire aiguisées par l'expérience de cette pathologie. Toutes les mesures visant à favoriser l'inclusion dans le milieu scolaire et socioprofessionnel est fondamental, avec des aides de vie adaptées à la situation de chacun", insiste le Dr Geneviève Baujat. 

Lien de l'Association française sur la Fibrodysplasie Ossifiante Progressive :www.fopfrance.fr 

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