L’amiante continue de faire des victimes chaque année en France
Pourtant interdite en France depuis 1997, l’amiante, ce matériau isolant très largement utilisé dans l'industrie entre les années 1960 et 1980, serait responsable d’au moins 2200 nouveaux cas de cancers chaque année, selon les dernières estimations de l’Institut de veille sanitaire.
On n’a pas fini de parler de l’amiante. En dépit d’avancées significatives dans le champ des connaissances et de la prévention, la thématique "amiante" demeure plus que jamais d’actualité en France, peut-on lire dans un rapport publié ce mardi par l’Institut national de veille sanitaire (InVS).
D’après les dernières données épidémiologiques, il apparait que le poids des cancers liés à l’amiante (poumon, mésothéliome, larynx, ovaire) demeure très important. Pour preuve, l’InVS estime que 2200 à 5400 nouveaux cas de cancers et 1700 décès seraient liés à l’amiante chaque année en France. Le cancer du poumon arrive très largement en tête des cancers professionnels attribuables à l'amiante, avec 1 328 à 3 709 nouveaux cas estimés (dont seulement 56 à 81 chez des femmes) et 1 004 à 2 805 décès en 2012 (dont 43 à 62 chez des femmes). Assez logiquement, les cancers respiratoires touchent majoritairement les hommes. Historiquement, en effet, les expositions à l’amiante avaient lieu dans le cadre professionnel et touchaient principalement les ouvriers et les artisans.
Cancer de l'ovaire et amiante. Pour la première fois, les chercheurs ont étudié deux autres cancers, ceux du larynx et de l'ovaire que l'agence pour le cancer de l'Organisation mondiale de la santé a décidé d'ajouter en 2009 à la liste des maladies induites par l'exposition à l'amiante. Ils ont estimé que 129 à 731 nouveaux cas de cancers du larynx (quasiment tous observés chez des hommes) et 46 à 55 cancers de l'ovaire découverts en 2012 pouvaient être attribués à une exposition professionnelle à l'amiante.
Le mésothéliome sous-estimé chez les femmes ? Le cancer de la plèvre, aussi appelé mésothéliome, continuerait à progresser en France, les dernières études suggérant même que le pic d’incidence n’est peut-être pas atteint, contrairement à ce que l’on pensait jusqu’à présent. Il s’agit d’un cancer dont le seul facteur de risque avéré à ce jour est l'exposition (professionnelle ou extra-professionnelle) à l'amiante, contrairement au cancer du poumon, surtout favorisé par le tabagisme. Bizarrement, l’InVS relève une augmentation sensible des nouveaux cas de mésothéliome entre la fin des années 1990 et la fin des années 2000, notamment chez les femmes, alors que pour 28 % d'entre elles, aucune exposition à l'amiante n'a été retrouvée. "L’augmentation de l’incidence du mésothéliome chez les femmes, même si les cas féminins représentent moins de 25 % de l’ensemble des cas, souligne l’importance de mieux documenter les enquêtes étiologiques pour les cas de sexe féminin. La mise en place récente du dispositif de déclaration obligatoire (DO) du mésothéliome, sur l’ensemble du territoire national, devrait notamment aider à obtenir des informations sur un nombre plus élevé de cas de mésothéliomes féminins", commente l’InVS.
Enfin, le Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (Fiva), crée par la loi du 23 décembre 2000 dans le but d’indemniser les personnes atteintes d’une pathologie liée à l’amiante, serait "très vraisemblablement sous-utilisé" en ce qui concerne le cancer bronchopulmonaire et le mésothéliome pleural, estime l’InVS.
Selon des estimations publiées en août dernier par le Haut Conseil de la santé publique (HCSP), l'amiante pourrait tuer entre 68 000 et 100 000 personnes d'ici à 2050 en France.