Diabète juvénile (DT1) : symptômes, âge, causes, espérance de vie

Le diabète juvénile (DT1) représente 10% des diabètes en France. Une soif intense et des urines abondantes sont des symptômes d'alerte. A quel âge apparaît-il en moyenne ? Quelles sont les causes ? Quels sont les traitements ? L'espérance de vie ? Réponses du Dr Marc De Kerdanet, pédiatre et Président de l'Aide aux Jeunes Diabétiques.

Diabète juvénile (DT1) : symptômes, âge, causes, espérance de vie
© robertprzybysz - 123RF

Actuellement en France, on estime à 25 000 le nombre d'enfants et d'adolescents de moins de 18 ans atteints d'un diabète juvénile, conséquence d'un déficit en insuline et à 250 000 le nombre total de personnes atteintes en France. L'incidence progresse d'environ 5% par an. Quels sont les symptômes à surveiller ? Quelles sont les causes ? Les traitements ? L'espérance de vie ? Eclairage sur cette maladie auto-immune encore mal connue avec le Dr Marc De Kerdanet, pédiatre et Président de l'AJD (Aide aux Jeunes Diabétiques

Définition : qu'est-ce que le diabète juvénile ?

Le diabète juvénile est la dénomination ancienne du diabète de type 1 (DT1). "On appelait diabète juvénile car c'est un diabète qui apparaît plus fréquemment chez l'enfant et les adolescents", précise d'emblée le Dr Marc De Kerdanet. C'est un diabète qu'il ne faut absolument pas confondre avec le diabète de type 2 qui survient la majorité des cas chez les plus de 50 ans. 

Quelles sont les causes ?

En France, tous les 15 ans, le nombre de jeunes diabétiques de moins de 18 ans double.

Le diabète de type 1 est un événement lié au hasard, mais favorisé par une prédisposition génétique (de nombreux gènes sont impliqués dans l'apparition d'un diabète). Il s'agit d'une maladie auto-immune, autrement dit, caractérisée par une erreur du système immunitaire. Les cellules du système immunitaire (les lymphocytes T) se mettent à considérer les cellules bêta du pancréas qui fabriquent l'insuline, comme des cellules étrangères à l'organisme et se mettent à les éliminer. Or, l'insuline est l'hormone qui permet de stocker réguler le taux de glucose dans le sang et son utilisation par différents organes. Le glucose consommé ne peut donc pas être correctement distribué et se retrouve en excès dans le sang, ce qui définit l'hyperglycémie. "L'incidence du diabète de type 1 (nombre de cas annuels) augmente de 4.5 et 5% par an (contre 2% par an pour le diabète de type 2). On considère donc que tous les 15 ans, le nombre de cas de diabète pédiatrique (appelé la prévalence) double. L'augmentation de l'incidence est clairement due au mode de vie occidentale, sans qu'on puisse aller encore très loin dans la compréhension. Des facteurs environnementaux de type viral (les enfants vivant dans les pays occidentaux rencontrent moins tôt les particules infectieuses et le système immunitaire n'apprendrait pas correctement à réagir, conduisant aux maladies auto-immunes ou aux allergies ("hypothèse hygiéniste"), la pollution ou l'alimentation figurent parmi les autres hypothèses. Mais on n'a pas encore repéré une raison particulière et cela fait d'ailleurs l'objet de travaux en cours, notamment avec Santé publique France, pour essayer de mieux comprendre", explique le Dr De Kerdanet. 

Quel est l'âge moyen d'apparition ?

"L'âge moyen d'apparition d'un diabète juvénile est de 8 ans, rapporte notre interlocuteur. Nous avons observé un rajeunissement des situations de diabète avec un quart des diabètes qui surviennent chez les moins de 4 ans. Ce qui fait que dans ces terrains-là, l'évolution de la maladie est encore plus rapide"

Quels sont les symptômes d'un diabète juvénile ?

Les premiers symptômes d'un diabète de type 1 sont :

  • La soif abondante (polydipsie) 
  • Les urines abondantes et fréquentes (polyurie), avec le retour d'une énurésie chez un enfant qui était jusque- là propre. 

Les symptômes plus tardifs sont :

  • Une perte de poids (amaigrissement brutal malgré un appétit conservé, fonte musculaire)
  • Une grande fatigue et un manque d'énergie
  • Des douleurs abdominales, nausées ou vomissements
  • Des troubles de la vue
  • Des troubles respiratoires, qui évoquent un pré-coma. "La décompensation respiratoire peut se faire très brutalement d'autant plus que le diabète débute plus tôt, dans 25% des cas chez des enfants de moins de 4 ans", alerte notre interlocuteur.  

Quand s'inquiéter ?

Consultez un médecin ou un service d'urgence hospitalier sans tarder si :

  • Votre enfant a tout le temps soif et boit plus que d'habitude
  • Votre enfant urine plus que d'habitude
  • Votre enfant a recommencé à faire pipi au lit
  • En plus, votre enfant perd du poids rapidement et est fatigué

Quel est le diagnostic ?

Le DT1 de l'enfant représente une urgence immédiate pour confirmer le diagnostic et débuter le traitement. "Dès qu'un diabète est suspecté, le médecin généraliste doit faire, dans son cabinet, une glycémie capillaire ou une analyse d'urine. Un excès de sucre dans le sang ou dans les urines associé à des symptômes évocateurs d'un diabète doit amener à présenter l'enfant aux urgences rapidement. D'autant plus que près de 50% des enfants continuent à avoir un état de santé très précaire dans cette phase de découverte, car la maladie n'a pas été diagnostiquée (heureusement, la détection d'un diabète reste relativement rare chez l'enfant, mais les généralistes ne sont, de ce fait, pas souvent confrontés à un diabète chez l'enfant et n'ont donc pas le réflexe d'évoquer un diagnostic de diabète). Cette situation sévère est l'acidocétose diabétique (la conséquence d'une forte carence en insuline), et peut conduire rapidement à un coma, présent chez 15% d'entre eux à l'arrivée aux urgences", détaille notre interlocuteur. Un diagnostic de DT1 est toujours confirmé par un seul dosage de la glycémie (toujours  nettement plus élevée que la limite "officielle" de 1.26 g/l) et de la cétonémie (liée à la carence en insuline). D'autres examens peuvent être par ailleurs effectués (dosage de l'hémoglobine glyquée, dosage de l'insuline et du peptide C...) mais ils restent secondaires.

Quels sont les traitements ?

Plus le traitement est précoce, plus les formes graves peuvent être évitées. Depuis une centaine d'années, on a trouvé le moyen de faciliter la vie des personnes diabétiques et de réduire le risque de complications du diabète grâce à l'administration d'insuline

>> par voie intraveineuse, en période de réanimation à l'hôpital

>> par voie sous-cutanée, plusieurs fois par jour, au moyen d'un stylo injecteur ou d'une pompe à insuline. Il faut ajuster la dose d'insuline en fonction des besoins spécifiques de la personne, de sa consommation de glucides et de son activité physique. 

Selon les recommandations de la Haute Autorité de Santé, c'est l'équipe pédiatrique (entraînée en diabétologie) qui doit suivre l'enfant, et non le médecin généraliste. "Apprendre aux parents et à l'enfant à gérer ses injections d'insuline est le travail des soignants pédiatriques qui doivent, de plus, aider les parents à transmettre peu à peu à l'enfant la réalisation et la responsabilité de son traitement", tient à préciser le pédiatre. Aujourd'hui, le diabète de type 1 ne se guérit pas, mais se soigne. "Les progrès de ces dernières années laissent à penser qu'on finira peut-être par trouver un moyen de traiter définitivement un DT1 et d'avoir une sécrétion d'insuline régulée de façon biologique", espère notre spécialiste, par exemple, par des progrès sur les greffes de cellules bêta productrices d'insuline au niveau du pancréas (thérapie cellulaire pour l'instant réservée à des adultes dans des situations très sévères).

Les patients traités par insuline ont une espérance de vie équivalente au reste de la population.

Quelle est l'espérance de vie ?

Sans traitement, l'espérance de vie est réduite de quelques semaines à quelques mois. Les patients qui bénéficient d'un traitement par insuline ont quant à eux une espérance de vie équivalente au reste de la population. "Il y a encore chaque année quelques enfants qui décèdent en France car la découverte du diabète n'a pas été faite. C'est inacceptable, un siècle après la découverte de l'insuline ! Et c'est pourtant encore fréquemment le cas dans les pays à faibles ressources", déplore notre interlocuteur. 

Diabète et discrimination à l'école, au travail...

Le diabète peut donner lieu à des discriminations en milieu professionnel ou scolaire. "Et ce, à cause notamment de certaines lois qui établissent une inaptitude des personnes qui ont un diabète à faire certaines écoles ou à exercer certaines professions. Les associations se sont emparées du sujet et cela a conduit à un projet de loi déposé au Sénat il y a plus d'un an, encore en cours d'examen. Par ailleurs, du fait d'une méconnaissance de la maladie et dans une société où l'opinion prévaut sur la connaissance scientifique, certaines cantines refusent de prendre la responsabilité de nourrir des enfants ayant un diabète, leur proposant à la place, au mieux de ramener leur propre panier-repas, au pire en les excluant de la restauration scolaire, en contradiction avec les réglementations", décrit le président de l'AJD. Or, l'enfant qui a un diabète est un élève comme les autres, qui peut tout à fait manger à la cantine. A chaque rentrée scolaire, l'élève et ses parents rencontrent les enseignants et (si possible) le service de santé scolaire pour les informer du diabète et mettre en place un Projet d'accueil individualisé (PAI). La circulaire n° 2003-135 du 8 septembre 2003, relative à l'accueil en collectivité des enfants et des adolescents atteints de troubles de la santé évoluant sur une longue durée, stipule :

>> qu'il y a obligation de favoriser l'intégration de l'enfant ayant un diabète au même titre que tout autre enfant,

>> qu'il faut trouver un compromis pour qu'il puisse pratiquer ses contrôles de glycémie et/ou ses injections à l'école,

>> qu'il a le droit d'être accueilli au restaurant scolaire (avec des aménagements éventuels pour assurer l'apport nécessaire en aliments glucidiques)

Merci au Dr Marc De Kerdanet, pédiatre et Président de l'AJD (Aide aux Jeunes Diabétiques) 

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