Médecin légiste : que fait-il ?
Popularisée par les films et les séries policières, le médecin légiste assure un rôle prépondérant dès lors que des violences ont été commises sur une personne. Il est également saisi par la justice pour réaliser une autopsie en cas de décès d'origine criminelle. Que fait-il exactement ? Quel est son salaire et quelles études faire pour devenir médecin légiste ?
Définition : qu'est-ce qu'un médecin légiste ?
"Contrairement à l'image véhiculée dans les séries télé et les films américains, n'est pas, en France, la médecine de la mort, mais la médecine légale, c'est-à-dire, de la violence, ou plutôt des violences." explique le Dr Franck Clarot, médecin légiste. Cette spécialité médicale comporte en effet un volet thanatologique, c'est-à-dire l'étude de la mort, de ses causes, et de ses caractéristiques médico-légales ; et un volet "dit clinique," qui s'occupe des vivants et de l'ensemble des violences, qu'elles soient volontaires ou involontaires, physiques, psychologiques, ou sexuelles. "C'est une matière médicale originale, transversale, particulièrement riche" résume le médecin légiste.
Il existe enfin d'autres branches de la médecine légale comme :
- l'anatomopathologie médico-légal,
- l'anthropologie imagerie médico-légal,
- l'entomologie médico-légal,
- la toxicologie,
- le droit médical...
Que fait un médecin légiste ?
Post mortem, le médecin légiste intervient dès lors qu'il y a une mort suspecte ou une mort violente, la mort naturelle n'étant pas du ressort de la justice, mais uniquement de la santé. Cette intervention peut consister en un examen externe simple, complété éventuellement de prélèvements toxicologues, et éventuellement d'examens supplémentaires, imagerie ou autopsie, suivi aussi possiblement de dosages toxicologiques, et d'une étude anatomopathologique.
Dans le cadre de la médecine du vivant, l'intervention du légiste survient en général après un épisode de violences dans le but de constater les lésions, de les évaluer, d'étudier la compatibilité médico-légale avec les faits rapportés, d'évaluer le retentissement et la nécessité éventuelle d'une action secondaire, et de déterminer d'éventuels préjudices. Cette intervention vise aussi à déterminer l'incapacité totale de travail au sens pénal du terme (ITT), l'une des base de réflexion des magistrats ainsi que dans l'évaluation de la qualification des faits.
"Dans les faits, et en pratique, la médecine légale concerne surtout les vivants, dans un pays comme le nôtre, où les violences à l'origine de la mort sont heureusement assez peu fréquentes. On peut estimer entre 80 et 90% le nombre d'intervention concernant des vivants" explique le Dr Clarot.
Quelles études pour devenir médecin légiste ?
"La formation des médecins légistes a connu de multiples changements dans les 20 dernières années, et notamment depuis 2011, avec une vaste réforme, qui a fait suite au rapport Jardé de 2003." explique le Dr Clarot. Pendant longtemps, la formation en médecine légale consistait en l'obtention d'un DESC (diplôme d'études spécialisées complémentaires), qui venait compléter un DES (diplôme d'études spécialisées), c'est-à-dire une formation effectuée durant l'internat de médecine et immédiatement en post internat de médecine, ce qui offrait au médecin légiste une double casquette, grâce à ces deux diplômes, comme par exemple psychiatre est médecin légiste, ou radiologue et médecin légiste. Il existait aussi une voie différente dans le cadre d'une capacité, qui permettait aux médecins généralistes d'accéder au titre de médecin légiste, après plusieurs années d'expérience, dans le cadre d'une formation parallèle.
Depuis 2017, et la réforme du troisième cycle des études de médecine, et la disparition des des DESC de type 2, cinq nouvelles spécialités ont été créés, dont la "médecine légale et expertise médicale". Cette spécialité est donc désormais constituée d'un tronc unique, avec une "maquette" fermée de formation, dans le but affirmé d'uniformiser l'enseignement (les DESC étaient auparavant inter régionaux). La formation comporte désormais :
- deux semestres constituant un socle de base,
- quatre semestres d'approfondissement,
- un stage de deux semestres de consolidation, soit quatre ans après le concours de l'internat (qui se passe en sixième année de médecine)
Quel est le salaire d'un médecin légiste ?
La rémunération des médecins légistes suit la grille des personnels hospitaliers durant la formation, durant l'internat, puis éventuellement chef de clinique et assistant des hôpitaux. Ensuite, l'exercice à l'hôpital est rémunéré de la même manière qu'un praticien hospitalier, quelque soit sa spécialité.
Dans certaines structures, il peut bénéficier d'un complément de revenu lié au paiement direct des réquisitions qui lui sont faites nominativement, dans le cadre de ses missions judiciaires. Néanmoins, cette pratique n'est pas systématique, elle résulte d'accords locaux, en fonction des modalités de financement des structures, et des contrats santé justice. Dans le privé, le médecin légiste est rémunéré à l'acte, comme tout médecin libéral, soit par la justice, soit par les compagnies d'assurance, il peut d'ailleurs être soumis à la TVA (ce qui n'est pas le cas de la très grande majorité des médecins), compte tenu d'une activité considéré comme non thérapeutique.
Le médecin légiste n'est pas un membre de la police.
Où exerce un médecin légiste ?
Le médecin légiste n'est pas un membre de la police ou d'une quelconque structure judiciaire. Il est indépendant. "C'est un collaborateur de justice, une sorte d'interface entre la médecine et la justice", précise le Dr Clarot. Il n'a pas de pouvoirs d'enquêteur et ne se déplace d'ailleurs que rarement sur le terrain, et uniquement à la demande des magistrats, en particulier lors des levées de corps (constatation initiale sur scène potentielle de crime) ou lors de certaines reconstitution. Il n'agit d'ailleurs en général que sur réquisition ou sur demande judiciaire.
Il exerce en général en centre hospitalier, en unité médico-judiciaires (UMJ) ou en institut de médecine légale (IML). Il peut aussi exercer en cabinet privé, notamment dans le cadre d'expertise diligentée soit à la demande des magistrats, soit éventuellement à la demande des compagnies d'assurance, dans le cadre de la réparation juridique du dommage corporel.
Merci au Dr Franck Clarot, médecin légiste.