"Je pense toujours que les autres ne n'aiment pas" : pourquoi, que faire contre le Liking Gap ?
Certaines personnes se dévalorisent systématiquement et sont persuadées qu'on ne les apprécie pas. Après chaque échange, elles se refont la conversation et se disent qu'elles n'ont pas été à la hauteur...
Les conversations avec des inconnus sont souvent anxiogènes. Mais, s'il est naturel de vouloir faire bonne impression, certaines personnes se dévalorisent systématiquement et sont persuadées qu'on ne les apprécie pas. Baptisé "liking gap" en anglais, ou "écart d'appréciation" en français, ce phénomène désigne l'écart entre l'image que l'on pense avoir renvoyée et celle reçue par notre interlocuteur. Une attitude qui peut largement affecter nos interactions sociales. Comme il est impossible de savoir ce que les autres pensent de nous, nous avons recours à l'auto-évaluation. Or, nous sommes beaucoup trop critiques envers nous-mêmes. Résultat, nos interprétations sont le fruit de notre imagination et par conséquent, elles sont forcément erronées. "Le liking gap renvoie à une certaine discordance entre la perception que les autres ont de nous et celle que nous avons de nous-même. C'est plutôt la crainte de ne pas plaire aux autres sans en avoir la certitude qui entre en jeu", commente Véronica Olivieri-Daniel, psychologue clinicienne.
Le linkg gap n'existe que chez l'adulte
On le sait, les jeunes enfants vivent dans l'instant présent et ne se préoccupent guère de ce que l'on pense d'eux. En 2021, une étude a démontré que le liking gap se développait en grandissant. "Les très jeunes enfants ne se demandent pas vraiment si une autre personne les aime, ils ne se soucient pas de la réputation qu'ils se font. Mais au fur et à mesure que cette voix se soucie de la réputation, l'écart d'appréciation commence à apparaître", détaille le Dr Gus Cooney, psychologue spécialisé dans les interactions sociales à Vice.
Un besoin d'être aimé ?
Le liking gap repose sur deux problématiques : un manque de confiance en soi et le besoin d'être aimé. "Dans notre société occidentale, notre valeur est plus ou moins attribuée par des facteurs extérieurs comme l'aspect physique, le succès, l'argent, la réussite familiale, professionnelle et sportive, explique Véronica Olivieri-Daniel. "Or, il est difficile de se sentir à l'aise sur tous ces plans là et c'est précisément ce qui nourrit le manque de confiance en soi. Dans nos interactions, on ne sait pas ce que l'autre attend de nous mais on cherche à lui plaire à tout prix car c'est ce qui nous donne l'impression d'avoir de la valeur. Si on a le sentiment de ne pas du tout séduire, la confiance en soi est altérée. Le liking gap touche davantage les personnes qui sont seules, comme les jeunes adultes qui n'ont pas de contexte professionnel rassurant et qui n'ont pas encore construit leur vie conjugale ou familiale".
"On ne doit pas faire reposer la confiance en soi sur les autres"
Vous l'avez probablement remarqué : plus vous apprenez à connaître une personne, plus vous vous sentez à l'aise en sa compagnie. Le liking gap a donc tendance à diminuer avec le temps, c'est en tout cas ce que l'équipe de chercheurs menée par Erica Boothby a mis en avant. Pour dépasser cet écart d'appréciation, il est essentiel d'entreprendre un travail de confiance en soi, indique notre psychologue. "Celui-ci peut être thérapeutique mais aussi pragmatique en se donnant des objectifs et en essayant de les atteindre (parler une langue, apprendre une danse, voyager seule…). L'idée, c'est de faire en sorte que nous devenions les spectateurs de nos actes afin de nous mettre à l'épreuve indépendamment des autres. On ne peut pas vivre comme si les autres n'existaient pas mais on ne doit pas faire reposer notre confiance en soi sur les autres car c'est une voie sans issue".
Merci à Véronica Olivieri-Daniel, psychologue clinicienne