"La ménopause m'a libérée"

"On ne devient pas vieille et moche à la ménopause" défend Sophie qui vit cette période comme une nouvelle "liberté". D'oser, de s'exprimer, de se lâcher... partout... y compris au lit. Témoignage.

"La ménopause m'a libérée"
© MARIE ROUGE/Journal des Femmes

Sophie Kune, 55 ans, mariée et mère d'un ado de 16 ans, a pris à bras le cœur cette problématique qui n'est ni plus ni moins qu'une nouvelle étape dans la vie d'une femme, celle de la ménopause, en abordant sur son compte Instagram @menopause.stories toutes les interrogations qui en découlent : les symptômes, les solutions, les experts… Bref, elle ne passe à côté d'aucune d'entre elles et aborde même la question de la sexualité sans tabou. Parce que pour elle, la ménopause est l'occasion de se réinventer et de se libérer.

L'importance de savoir à l'avance ce qui va se passer dans le corps

Du côté de mon corps, au moment où mes hormones ont commencé à faire du tohu-bohu, j'ai senti de nombreux changements. La ménopause est en effet la fin d'un cycle, celui de la reproduction. Les menstruations disparaissent et libèrent en quelque sorte la femme de ce statut de fécondation. Elle peut alors vivre différemment avec un corps qu'elle redécouvre et avec lequel elle peut s'affirmer autrement. Elle peut faire l'amour quand elle veut, elle n'est plus ennuyée par ces cycles (plus de mal de ventre, de peur de tomber enceinte…). Bref, elle peut vivre plus librement cette nouvelle étape. Bien évidemment à la ménopause, le corps change et différents symptômes peuvent apparaître et être ressentis de façon assez inégale selon les femmes. La sécheresse au niveau de la peau, des muqueuses et du vagin en est un. La sexualité peut alors être perturbée. À cette sécheresse s'ajoute une atrophie de la vulve, sa paroi s'affine et en fonction de chacune, des douleurs peuvent être plus ou moins ressenties au tout début du rapport sexuel.

Pour certaines femmes, cela peut être rebutant, surtout pour celles qui ne savent pas que ces symptômes peuvent arriver et/ou qui n'ont pas envisagé les solutions pour y remédier. Elles peuvent alors carrément dire stop à leur sexualité et se "refermer sur elles-mêmes". Ce que je trouve intéressant à ce moment-là, c'est d'en parler et surtout de consulter un gynécologue, un sexologue ou une sage-femme, qui peut donner quelques solutions, notamment avec la rééducation du périnée.

"C'est là que j'ai compris que la sexualité peut se réinventer à la ménopause"

Et c'est vraiment ce point-là qui m'a fait comprendre que la sexualité à la ménopause est alors à réinventer. Ce corps qui change, qui cherche un nouvel équilibre appelle à autre chose. Dans les différents témoignages que je retrouve sur mon compte, on parle très souvent de douceur : l'étreinte va être différente et les préliminaires vont devenir des fondamentaux. Pour certaines femmes célibataires à cette période, c'est le moment de s'éclater et de se faire plaisir.

Penser enfin à soi et exprimer ses désirs

La libération passe donc aussi par l'affirmation de soi. Certaines femmes réalisent des "coming out" et découvrent de nouveaux plaisirs avec des partenaires différents. Dans le couple, les choses changent aussi. L'homme, s'il est du même âge, peut aussi ressentir des changements : une baisse de l'érection, de la libido. Et la non-communication peut provoquer de vraies ruptures. Le partenaire peut ne pas percevoir ces bouleversements et se sentir très embarrassé et désarmé. Certains hommes peuvent même éviter tous rapports. La communication dans le couple est la base pour construire un nouvel échange : les douleurs à la pénétration peuvent être expliquées et peuvent faire l'objet d'un renouveau dans l'étreinte, dans l'acceptation de ces corps changeants. La performance ou encore la maîtrise parfaite de certaines positions ne sont plus au cœur de la sexualité, surtout si elle est synonyme d'inconfort. Il serait à présent plutôt question d'exprimer un désir évoqué en toute simplicité, pour accueillir un plaisir intense

"Disposez un miroir bienveillant sur vous-même"

C'est le moment de faire le point sur notre corps, sur notre perception de nous, de disposer un miroir bienveillant pour se libérer, se faire plaisir et se donner rendez-vous avec soi. C'est une nouvelle étape durant laquelle, il faut trouver des ressources qui peuvent être par exemple de renouveler sa lingerie et d'apporter une nouvelle touche de féminité et d'érotisme au travers différents tissus ; de choisir des lubrifiants ; de faciliter sa sexualité personnelle si on a besoin de reprendre confiance ; de s'acheter un sextoy ; d'avoir recours à l'ASMR (autonomous sensory meridian response)… La ménopause c'est juste une mise au point, passer d'un chapitre à l'autre pour ouvrir de nouvelles perspectives. Parler avec un professionnel comme un sexologue de ces changements est pour moi un vrai plus. Aujourd'hui, on voit bien dans notre société que les femmes revendiquent un statut différent : il y a des femmes de 50-60 ans voire plus, qui par une simple paire de lunettes, une attitude… vont dégager un charisme fou. Je crois vraiment que cette confiance en soi se cultive et qu'elle est génératrice de liberté. Et plus on se connaît, plus on peut dépasser les freins et se lancer des défis.

Avec la ménopause, on ne devient pas vieille et moche. On change certes, notre corps vit et si on accompagne ce changement, on a alors la possibilité d'aller là où on le désire. C'est donc le moment de se réapproprier son corps dans toutes ses dimensions et de se libérer. Le sexe devient alors une nouvelle danse, avec des préliminaires différents et plus importants pour assouvir ses désirs et ressentir du plaisir. L'orgasme est souvent plus lent et l'acte sexuel doit donc en tenir compte. Cette période est pour certaines femmes l'occasion de faire de nouvelles expériences, avec de nouveaux partenaires (femme ou personne plus jeune…) ou en consolidant son propre couple au travers de nouvelles possibilités.

"Il n'y a pas d'âge pour aimer et se faire plaisir"

Tous les champs des possibles s'ouvrent ainsi. Il faut s'autoriser à les vivre sans avoir peur du regard des autres et de la société. Les films sont révélateurs de la représentation des femmes mûres dans notre société : Les jeunes amants (2022) est, pour moi, un film très intéressant dans lequel il est démontré qu'une femme mûre peut tomber amoureuse d'un homme plus jeune et vice-versa. Melvil Poulpaud a été interviewé sur la difficulté ou non de filmer la scène d'étreinte avec Fanny Ardent. Dans le film, il a 45 ans, elle en a 71, et au-delà de cette différence d'âge et son corps marqué par les années, il explique qu'il ne voit pas en elle "une femme d'un certain âge" mais une femme désirable qu'il n'a pas peur d'aimer, de désirer et d'étreindre. La scène est forte et révélatrice qu'il n'y a pas d'âge pour aimer et se faire plaisir. Et c'est vraiment important de montrer que la ménopause n'est pas une fin. C'est un renouveau fait de plaisirs à vivre, chacune à sa manière.