L'arthrose en 12 questions/réponses
Mal interprétée, l'arthrose continue d'alimenter de nombreuses questions. Pour en savoir plus, nous avons interviewé le Pr François Rannou, rhumatologue et rééducateur à l'hôpital Cochin à Paris.
La France est le deuxième pays européen le plus touché par l'arthrose, derrière la Belgique et devant la Pologne, l'Espagne et la Suède. Selon une étude GPI by GSK (septembre 2017), 54% des Français se plaignent de douleurs articulaires, et ce chiffre atteint même les 61% chez les personnes âgées de plus de 55 ans. Pour en savoir plus sur l'arthrose, le Pr François Rannou, rhumatologue et rééducateur à l'hôpital Cochin à Paris répond à nos questions.
L'arthrose et les rhumatismes sont-ils une seule et même chose ?
François Rannou : Oui et non. L'arthrose fait partie des rhumatismes. Lorsque l'on parle de rhumatismes, ils regroupent en réalité l'ensemble des maladies articulaires, dont l'arthrose.
L'arthrose ne touche-t-elle que les personnes âgées ?
Il est vrai que c'est une maladie qui est souvent liée à l'âge. Plus nous sommes âgés et plus nous avons de risque d'avoir de l'arthrose, mais c'est aussi une maladie qui est liée aux traumatismes. Ainsi, chaque personne, qu'elle ait 15 ans ou 70 ans, peut souffrir d'un traumatisme, comme une fracture articulaire par exemple, et dans ce cas l'arthrose secondaire n'est plus liée à l'âge mais au traumatisme initial. Certaines personnes peuvent avoir une arthrose très précoce si elles ont connu un traumatisme articulaire important. Nous pouvons également citer les sportifs professionnels : footballeurs, tennismen ou danseuses. Ces personnes peuvent développer des problèmes d'arthrose dès l'âge de 35 ans.
Quels sont les traitements qui existent contre l'arthrose ?
Il existe plusieurs types de traitements ; d'une part les traitements symptomatiques, et d'autre part les traitements qui ont un effet sur la structure. Les traitements symptomatiques bien évidemment marchent aujourd'hui, qu'ils s'agissent des antidouleurs ou des nouvelles biothérapies, comme les anticorps anti-NGF (Nerve Growth Factor, ndlr). En revanche, aucun traitement n'a montré pour l'heure d'effet structural. Aujourd'hui, nous n'avons que des traitements symptomatiques !
Faut-il moins bouger quand nous avons de l'arthrose ?
Au contraire, je recommande de bouger car si nous bougeons moins, nous allons enraidir l'articulation, ce qui a tendance à aggraver la maladie et à diminuer la fonction, donc c'est un cercle vicieux. Au contraire, il faut conserver une activité. Mais il faut garder du bon sens, nous n'allons pas dire aux personnes qui souffrent d'arthrose du genou, de courir le marathon. Il faut adapter ses activités, mais certainement pas les arrêter.
Le surpoids augmente-t-il le risque de développer de l'arthrose ?
Vrai, et de manière majeure. Les personnes en surpoids sont essentiellement touchées par l'arthrose du genou, beaucoup plus qu'à la hanche par exemple.
L'arthrose est-elle plus douloureuse chez la femme ?
Non. Il est vrai que l'arthrose est plus fréquente chez la femme, en tout cas jusqu'à 65 ans à peu près. Mais elle n'est pas plus douloureuse. En termes de douleur, les femmes sont souvent beaucoup plus résistantes que les hommes, donc ce serait même plutôt le contraire.
Les prothèses représentent-elles une bonne solution face à l'arthrose ?
Les prothèses ne traitent pas l'arthrose, elles l'éradiquent. Tout simplement en enlevant l'organe malade. C'est une solution radicale. Vous avez mal là ? On vous enlève cette partie du corps et on la remplace par un objet en polyéthylène ou en céramique, et ce procédé marche très bien.
Le cartilage peut-il être "remis à neuf" ?
Aujourd'hui, ce n'est pas possible même si nous assistons à des résultats encourageants de recolonisation des articulations par du cartilage. Mais nous en sommes encore qu'à l'état de recherches.
Existe-t-il des exercices pour soulager la douleur liée à l'arthrose ?
Absolument. De manière générale, les exercices ont souvent des vertus antalgiques, donc d'antidouleurs. Au début, l'exercice va souvent augmenter les douleurs, et au fur à mesure que le patient fera ses exercices tous les jours, ils vont plutôt avoir l'effet inverse, c'est à dire diminuer la souffrance. Ce sont des exercices assez simples qui consistent à entretenir la mobilité de l'articulation et à entretenir les muscles qui stabilisent l'articulation malade.
Peut-on prévenir l'arthrose ?
Le premier réflexe, lorsque l'on souffre de traumatismes articulaires, est d'avoir une prise en charge médicale optimale. La seconde possibilité peut résider parfois dans la chirurgie préventive, notamment chez les personnes qui ont des malformations. Dans ce cas, nous allons les opérer pour essayer de corriger cette malformation. Et la troisième prévention, qui est fondamentale, est la surveillance de son poids. Je recommande d'adopter une qualité de vie saine.
Dois-je arrêter le sport parce que j'ai de l'arthrose ?
Pas du tout. Et il doit alors s'agir du sport que le patient préfère, car si nous voulons faire pratiquer une activité physique à un patient, il faut qu'il l'apprécie. Si vous lui dîtes de faire de la natation et qu'il n'aime pas nager, il n'en fera pas. Ensuite, si le patient ne sait pas quel sport pratiquer, je conseille avant tout le vélo, la natation et la marche rapide.