Lait : bon ou mauvais pour la santé ? Le calcium protège-t-il vraiment des risques de fracture ?
Ce qui apparaissait depuis des décennies comme une vérité absolue est, depuis quelques années, remis en cause par certains scientifiques : le lait serait-il vraiment notre ami pour la vie, plein de sensations pures (ou de pures sensations) comme nous le suggèrent les spots publicitaires depuis des années ? Pas si sûr, répondent certains, parmi lesquels le journaliste et éditeur Thierry Souccar, responsable des éditions du même nom, auteur du livre "Lait, mensonges et propagande", sorti en 2007.
Premier élément remis en cause : les bienfaits des produits laitiers sur les os. Certes ils contiennent beaucoup de calcium. Et ce calcium est le mieux assimilé, puisqu'il est d'origine animale et non végétale. Cela, personne ne le nie. Mais pour Thierry Souccar et pour plusieurs scientifiques qui ont conduit des études sur le sujet, c'est la relation entre calcium et solidité des os qui est peut-être à remettre en cause. "L'industrie laitière évite de parler de fractures car elle n'a pas de véritable preuve scientifique pour appuyer ses dires, estime Thierry Souccar. Ce qui est prouvé, c'est que si on manque réellement de calcium, les os peuvent être fragilisés. L'industrie laitière a voulu faire l'équation os = calcium mais en réalité c'est beaucoup plus compliqué que ça. Les études épidémiologiques n'ont jamais montré que la consommation faramineuse de calcium était bénéfique." Et de souligner que, alors que la France recommande une consommation de 900 mg par jour, la recommandation officielle de l'Organisation mondiale de la santé n'est que de 500 mg, celle de la Grande-Bretagne de 700 mg.
Par ailleurs "dans d'autres pays, en Afrique ou en Asie, où il n'y a pas de laitages et où la source de calcium est donc uniquement végétale, l'apport journalier tourne autour de 300 à 400 mg. Pour autant, il n'y a pas plus de fractures dans ces pays. On constate même plutôt l'inverse : ce sont dans les pays les plus consommateurs de produits laitiers, comme l'Europe du Nord par exemple, qu'il y a plus de fractures. En revanche, en Asie, il y en a peu."
Densité osseuse n'égale pas os solides
Question de gènes, vous dites-vous ? "Non, car on a pu constater qu'à Hong Kong et dans la région chinoise voisine, deux populations aux mêmes origines, l'occidentalisation de l'alimentation, comprenant entre autres l'introduction de produits laitiers, avait été de pair avec une augmentation du nombre de fractures du col du fémur", poursuit Thierry Souccar. "Certes, mais cela va aussi avec l'allongement de l'espérance de vie des populations de ces pays, rétorque le Dr Marie-Claude Bertière, nutritionniste du Cniel. C'est le nombre de fractures du col du fémur que l'on mesure dans ce genre d'études. Il est donc logique qu'il augmente quand la population vieillit."Reste la question de la densité osseuse : une forte consommation de lait augmente la densité osseuse, c'est un fait. "C'est à cause des hormones oestrogènes contenues dans le lait, souligne Thierry Souccar. Mais, d'une part, ce phénomène est transitoire et peu spectaculaire, d'autre part, le lien entre densité osseuse et solidité des os n'a jamais été prouvé. Au contraire, les femmes végétariennes, par exemple, qui ont des os moins denses que la moyenne, n'ont a contrario pas plus de fractures."