Fini les rayons ? La radiothérapie après mastectomie en cas de cancer du sein remise en question
Selon un essai mené sur 1600 personnes, les bénéfices seraient plus limités qu'on ne le pense.
Environ 60 000 nouveaux cas de cancer du sein sont recensés chaque année en France. Pour certaines femmes, la mastectomie, soit l'ablation du sein, est nécessaire au traitement de la maladie. Cette intervention peut aussi survenir en prévention chez les femmes à haut risque de cancer du sein, comme celles porteuses du gène BRCA. Selon les chiffres publiés en 2025, 20 000 à 22 000 femmes subissent chaque année une mastectomie totale (ablation complète du sein) dans le cadre du traitement d'un cancer du sein.
Traditionnellement, les médecins proposent une radiothérapie (ou "rayons") après la mastectomie afin de réduire le risque de récidive locale, en particulier chez les patientes présentant des facteurs associés à un risque plus élevé de récidive, comme une tumeur volumineuse ou une atteinte des ganglions lymphatiques. En revanche, son intérêt chez les femmes atteintes d'un cancer du sein dit "à risque intermédiaire" de récidive restait jusqu'ici moins clairement établi. L'essai SUPREMO, mené au Royaume-Uni, apporte de nouveaux éléments au débat. Cette étude randomisée a inclus près de 1 600 patientes ayant bénéficié d'une mastectomie, suivies pendant une durée médiane de 10 ans.

Les résultats montrent que, dans cette population à risque intermédiaire, l'ajout d'une radiothérapie après la chirurgie n'entraîne pas d'amélioration significative de la survie globale, ni de la survie sans métastase, par rapport à l'absence de radiothérapie.
En revanche, la radiothérapie permet bien de réduire le risque de récidive locale, avec une diminution relative estimée à environ 45 %. Toutefois, les experts soulignent que la différence réelle observée entre les deux groupes reste limitée, avec un écart d'environ 2 points entre les patientes traitées et celles qui ne l'ont pas été. Un bénéfice jugé "modeste" au regard des effets indésirables potentiels de la radiothérapie, notamment cutanés, cardiaques ou pulmonaires, ainsi que de son impact sur la qualité de vie.
Ces résultats ne conduisent pas, à ce stade, à une remise en cause des recommandations actuelles. Plusieurs limites sont évoquées, notamment l'évolution des pratiques chirurgicales, des traitements systémiques et du dépistage depuis le début de l'essai. Ils s'inscrivent néanmoins dans une réflexion plus large en oncologie, celle de la désescalade thérapeutique, qui vise à adapter l'intensité des traitements au niveau réel de risque.
En pratique, la radiothérapie après mastectomie reste indiquée chez les patientes à haut risque de récidive. Mais ces nouvelles données pourraient, à terme, encourager une individualisation plus fine des décisions, fondée sur le profil tumoral, les caractéristiques biologiques et les préférences des patientes.