Témoignage syndrome PIMS-Covid : "Chaque heure compte"

Le syndrome inflammatoire multisystémique (PIMS ou MIS-C) touche les enfants et adolescents. Quelques 300 cas supplémentaires ont été recensés en France, en lien avec l'épidémie de Covid-19. Présentant des symptômes évocateurs de cette maladie, Nathanaël, 9 ans, a dû être hospitalisé en urgence. Sa maman est revenue sur cette difficile épreuve pour le Journal des Femmes.

Témoignage syndrome PIMS-Covid : "Chaque heure compte"
© Nathanaël (novembre 2020) - Droits réservés

Le syndrome inflammatoire multisystémique (PIMS ou MIS-C) a de grandes similitudes avec la maladie de Kawasaki, une maladie inflammatoire aiguë qui peut entraîner d'importantes séquelles cardiaques, voire un décès. Ce syndrome post Covid reste encore peu connu du grand public, et même des médecins et des services d'urgence. Pourtant, entre le 1er mars 2020 et le 24 janvier 2021, 368 cas ont été recensés en France dont 310 chez des enfants positifs à la Covid-19. En France, l'incidence des PIMS en lien avec la Covid-19  est estimée à 21,4 cas par million d'habitants dans la population des moins de 18 ans, indique Santé Publique France qui le considère ainsi comme "rare". Nathanaël, un petit garçon de 9 ans sans antécédent ni soucis de santé. en a été atteint fin octobre 2020 et a dû être hospitalisé en urgence. Sa maman, Stéphanie, revient sur cette épreuve difficile - des premiers symptômes jusqu'à la guérison - et livre au Journal des Femmes son témoignage. 

Le Journal des Femmes : quels ont été les premiers symptômes de Nathanaël ?

Les symptômes d'un PIMS

  • Rougeur des yeux
  • Ganglions lymphatiques enflés
  • Fièvre importante (> 40°)
  • Inflammation aux poumons
  • Douleur aiguë à l'abdomen
  • Choc toxique
  • Rash cutané (boutons)
  • Maux de tête
  • Pas de toux, ni d'essoufflement

Stéphanie : Tout a commencé en octobre 2020. Nous étions partis en famille en Bourgogne pendant les vacances de la Toussaint dans notre maison de campagne. Mon fils Nathanaël était plutôt en très bonne forme, bien qu'il ait eu le Covid-19 juste après moi fin septembre 2020 avec des symptômes légers (fièvre, mal au ventre). Rien d'alarmant donc. Il s'en était vite remis. Pour moi, c'était de l'histoire ancienne et je ne m'inquiétais pas. Je trouvais ça même bien qu'on l'ait eu car je pensais qu'on allait être pendant un temps plus résistants. Dans la nuit du vendredi 30 au samedi 31 octobre, Nathanaël nous a rejoint dans notre lit vers 6h du matin. Il était bouillant et avait de la fièvre, il s'était un peu évanoui en allant aux toilettes, avait mal au ventre et mal à la tête, avait le cœur qui battait très fort et des boutons partout sur les jambes, un peu comme un urticaire. Il commençait à avoir les lèvres gonflées. Je me suis dit qu'il y avait un truc qui clochait. D'habitude, mon fils n'a jamais de fièvre et n'est jamais malade. La journée passe et le soir, on a décidé d'appeler le 15 (service des urgences médicales) qui nous a passé un médecin en ligne. Ce dernier nous a conseillé d'aller dans une maison médicale de garde. Nous y sommes allés. Là-bas, le médecin de garde nous a pris de haut en nous disant qu'il ne fallait pas s'inquiéter après un jour de fièvre. Toutefois, elle trouvait la présence de boutons un peu bizarre et a pris mes coordonnées pour me rappeler si elle avait d'autres infos. Selon elle, Nathanaël avait un virus, peut-être une gastro parce qu'il avait également de la diarrhée. Elle m'a donné du Doliprane® et des antihistaminiques. Le lendemain, nous sommes rentrés en région parisienne. Il allait encore moins bien que la veille. 

Le Journal des Femmes : quels examens a-t-il passés ? 

Je n'avais jamais vu mon fils dans un tel état...

Stéphanie : En arrivant à Paris, j'ai rappelé le 15 qui m'a dit de retourner à la maison médicale. A tous les médecins, je disais que mon fils avait eu le Covid le mois dernier et ce qui me rend fâchée, c'est que les personnes du 15 ne semblaient pas prendre cette information en compte. A aucun moment, ils m'ont orientée vers un PIMS et ils semblaient même ne pas être au courant de ce syndrome qui touche les enfants et qui est pourtant lié au Covid, alors qu'on est en pleine pandémie ! Je n'ai pas voulu retourner à la maison médicale et j'ai demandé à voir un pédiatre. Ils m'ont dit d'aller aux urgences pédiatriques de Versailles. Nathanaël a eu des prises de sang et un examen clinique. Les médecins m'ont dit qu'il avait probablement une infection virale, mais n'ont absolument pas évoqué un possible lien avec le Covid. En parallèle, je m'étais renseignée et je trouvais que ça ressemblait pas mal à la maladie de Kawasaki. Pour autant, je n'ai pas osé leur dire. Ses analyses de sang étaient correctes. Malgré tout, ils l'ont gardé jusqu'à 1h du matin car il avait 40-41° de fièvre. Il a refait un test PCR. Puis, nous sommes rentrés à la maison. Ses symptômes s'accentuaient. Il s'est mis à vomir et est resté allongé dans le canapé. Je n'avais jamais vu mon fils dans un tel état...

Le Journal des Femmes : quand vous a-t-on parlé la première fois d'un PIMS ?

Stéphanie : Comme il n'allait pas mieux, je suis retournée aux urgences. Pour les médecins, mon fils avait tout le tableau symptomatique d'une infection virale. Ils lui ont fait une piqûre dans le doigt qui a révélé une inflammation dans le sang. Ce n'était ni un virus, ni le Covid (le test PCR était négatif). Ils soupçonnaient la maladie de Kawasaki et voulaient faire les tests adéquats : prise de sang et marqueurs cardiaques. A cette époque, on ne parlait pas beaucoup du PIMS. Très peu de médias en parlaient en France. Les médecins de Necker ont évoqué un MIS-C (syndrome inflammatoire multi-systémique) ou un PIMS, dont les symptômes correspondaient plus à ce qu'avait mon fils. 

Les médecins ne savent pas non plus s'il y a un risque de récidive.

Le Journal des Femmes : vous a-t-on dit que c'était contagieux ?

Premier sourire de Nathanaël à l'hôpital Necker, novembre 2020 © Droits réservés

Stéphanie : Non, le PIMS n'est pas du tout contagieux. Il n'y a donc pas besoin d'être isolé. On m'a dit que chaque organisme réagissait différemment à l'inflammation. Mon fils a eu un PIMS, tandis que ma fille de 11 ans - qui partage pourtant le même patrimoine génétique que mon fils - ne l'a pas eu. Les médecins ne savent pas encore la cause exacte du PIMS. Pour le moment, ce syndrome serait soupçonné d'être provoqué par une réponse anormale du système immunitaire à un agent infectieux (un rhume par exemple), encore inconnu. Les médecins ne savent pas non plus s'il y a un risque de récidive. A priori non, mais on n'en est pas sûr. 

Il est resté hospitalisé une semaine.

Le Journal des Femmes : quel traitement a été donné à votre enfant ?

Stéphanie : Les marqueurs cardiaques n'étant pas très bons, des cardiologues sont alors venus faire toute une série de mesures et ont mis le cœur de Nathanaël sous surveillance. Comme ils n'avaient pas de réanimation pédiatrique à Versailles, ils l'ont transféré à l'Hôpital Necker-Enfants Malades à Paris. Ils ont commencé à administrer le traitement spécifique de la maladie de Kawasaki -  corticoïdes et immunoglobulines - ainsi qu'un traitement pour le cœur. Au bout de 4-5 heures, il allait mieux. Au total, il est resté hospitalisé une semaine et je tiens à saluer les urgences de Versailles et l'hôpital Necker qui, une fois que le PIMS a été diagnostiqué, ont été très réactifs et très bienveillants. Ils m'ont permis de rester auprès de mon fils, ils m'ont tenue au courant de chacune des étapes, ils m'ont proposé un suivi psychologique ainsi qu'à mon fils... 

Je trouve ça grave ce manque d'information auprès des médecins.

Le Journal des Femmes : vous semblez très engagée pour faire connaître davantage cette maladie, encore peu connue des professionnels de santé. Que ressentez-vous face à ce manque d'information ?

Stéphanie : A mon petit niveau, j'ai essayé d'alerter les pouvoirs publics. Je trouve ça grave ce manque d'information auprès des médecins. Surtout quand on sait que chaque heure compte pour soigner cette maladie sans séquelles. Mon but n'est pas de fermer les écoles, d'alarmer les parents ou de les inquiéter outre mesure. Je veux juste qu'il y ait de la prévention auprès des professionnels de santé, et particulièrement auprès des médecins des services urgences. J'ai donc écrit à Emmanuel Macron, à Brigitte Macron, à Jean Castex, à Olivier Véran en janvier pour pointer du doigt la méconnaissance et le manque d'information vis-à-vis du PIMS. Le 29 janvier, j'ai reçu une réponse de Brigitte Macron me disant qu'elle allait en parler au ministre de la Santé ainsi qu'au directeur général de l'Agence régionale de Santé d'Ile-de-France. Aussi, j'ai créé un groupe Facebook autour du syndrome post-Covid chez l'enfant (PIMS). Il donne la parole à plusieurs familles dont les enfants ont été atteints de ce syndrome. Encore une fois, mon but n'est pas d'alerter les parents. Cela reste un syndrome rare. Pour autant, il faut que les médecins soient au courant et sachent que ça existe. C'est dommage de ne trouver aucune brochure en France qui explique les symptômes. De nombreux médecins généralistes, médecins de gardes, services des urgences n'en avaient jamais entendu parler ! Je sais que les urgences de Versailles ont alerté leur service du 15 sur ce syndrome. Certes les médecins sont au stade de la recherche et connaissent mal cette maladie. Mais ils ont quand même des connaissances sur les symptômes. Il faudrait prévenir les agences régionales de Santé, tous les services d'urgence, les médecins de garde, les médecins de 15... A part quelques chiffres qui sont sortis quand l'alerte a été donnée en mai 2020 et les bulletins de Santé publique France, les informations sont quasi inexistantes. Il faut pourtant être conscient que si ce n'est pas pris en charge à temps, il y a un réel risque de décès. Chaque jour qui passe, c'est des complications supplémentaires pour l'enfant et potentiellement des séquelles à vie. 

Le Journal des Femmes : comment va votre fils aujourd'hui ?

Stéphanie : Après sa semaine d'hospitalisation, il a eu une semaine complète de convalescence. Il est ensuite retourné à l'école, au départ le matin exclusivement. Aujourd'hui, mon fils a arrêté l'aspirine, mais continue la cortisone, à plus petite dose. Début janvier, il a eu un contrôle cardiaque qui était correct. Il est désormais dans un protocole de suivi au niveau européen. Il reste surveillé, mais il a repris une vie normale, le foot... A priori, il n'aura pas de séquelles cardiaques. 

Merci à Stéphanie, maman de Nathanaël pour son témoignage. Propos recueillis le lundi 1er février 2021 par téléphone.