En France, un homme meurt de la rage à cause d'une chauve-souris
A Limoges, un homme d'une soixantaine d'années est décédé du lyssavirus, le virus de la rage, après avoir été en contact avec des chauves-souris, indique l'Institut Pasteur. C'est la première fois en France métropolitaine. Où ce virus est-il présent en France ? Que faire en cas de morsure animale ?
A Limoges, un homme d'une soixantaine d'années est décédé de la rage après avoir été probablement mordu ou griffé par une chauve-souris, selon des informations de l'Institut Pasteur relayées le 6 janvier 2021 par l'AFP. C'est la première fois en France métropolitaine. Pourtant, pendant plus d'un an, la cause de son décès est restée floue. En août 2019, les médecins du CHU de Limoges ont conclu que le sexagénaire avait succombé d'une encéphalite - une inflammation aiguë du cerveau provoquée généralement par une infection virale ou un dysfonctionnement du système immunitaire qui attaque anormalement le tissu cérébral - d'origine inexpliquée. Après une analyse génétique approfondie d'échantillons post-mortem menée par l'Hôpital Necker et l'Institut Pasteur, il a été montré que l'homme avait en réalité contracté un lyssavirus, le virus de la rage transmis par la morsure ou la griffure d'un animal infecté, et qu'il en était décédé. "C'est grâce à ce diagnostic rétrospectif que ce cas a été mis au jour. Cela démontre qu'il existe des cas de rage que l'on peut rater [...] La trace de ce virus a été identifiée à ce moment-là, en novembre 2020 (en pleine période de coronavirus) et cette découverte est passée inaperçue", a expliqué à l'AFP Laurent Dacheux, responsable adjoint du centre national de référence de la rage à l'Institut Pasteur.
"Il existe des cas de rage que l'on peut rater"
C'est quoi un lyssavirus ?
Le lyssavirus vient du mot grec "lyssa" qui signifie "rage". Il s'agit d'un genre de virus de la famille des Rhabdoviridae, qui inclut notamment le virus de la rage. Ce virus est "transmis par la salive d'un animal infecté après morsure, griffure ou léchage d'une peau lésée ou d'une muqueuse. Il est responsable d'encéphalites inéluctablement mortelles chez l'homme", indique une étude de 2013 menée par l'Institut Pasteur. Le virus pénètre progressivement par les muscles et les voies nerveuses, jusqu'à atteindre la moelle épinière puis le cerveau. L'homme peut contracter ce virus après avoir été mordu, le plus souvent, par un chien infecté (la rage canine est responsable de 55 000 morts chaque année dans le monde selon l'Institut Pasteur) ou par une chauve-souris infectée. "La rage des chauves-souris. désormais première cause de rage humaine dans certains pays d'Amérique, touche un nombre limité d'individus, mais paraît plus difficile à contrôler", poursuivent les auteurs de l'étude. La manipulation d'animaux morts peut également être contaminante.
Ce virus est-il présent en France ?
En France, les seuls cas de contamination humaine sur le territoire sont dus à des animaux importés illégalement (ou à des chauve-souris) et infectés.
Oui. Selon l'Institut Pasteur, il existe actuellement 14 espèces de virus au sein du genre Lyssavirus, infectant une large gamme d'espèce de mammifères.
► Le RABV (virus rabique) est le plus fréquent chez l'homme. Dans le monde, 59 000 décès par an sont provoqués par le RABV.
► Six autres espèces de lyssavirus infectent l'homme de manière létale.
► L'homme de Limoges avait contracté un EBLV-1 (European Bat LyssaVirus de type 1). Il s'agit d'un lyssavirus qui circule chez les chauves-souris européennes, et en France particulièrement dans l'Est. Il avait "semble-t-il été en contact avec des chauves-souris qui nichaient dans son grenier", précise l'Institut Pasteur. En mai 2020, le Centre national de référence (CNR) de la rage de l'Institut Pasteur de Paris avait identifié ce virus chez un chat originaire de Source-Seine, en Côte d'Or. Il s'agissait du troisième cas en France d'un carnivore (en l'occurrence d'un chat domestique) retrouvé infecté par un lyssavirus de type EBLV-1. Ce virus peut se transmettre de l'animal infecté vers l'homme.
En France métropolitaine, la rage sauvage des carnassiers, en particulier des renards et des chiens, a été officiellement éliminée en 2001. Aujourd'hui, les seuls cas de contamination humaine sur le territoire sont dus à des animaux importés illégalement (ou à des chauve-souris) et infectés dans les pays où sévit encore la maladie (Asie, Afrique, Europe centrale, Moyen-Orient, Amérique du Sud...), rassure le ministère de la Santé sur son site internet. Il est recommandé de ne pas s'approcher ni de capturer des chauve-souris, qui sont par ailleurs une espèce protégée, et de ne pas toucher leurs cadavres. |
Que faire en cas de morsure ou de griffure d'un animal ?
En cas de morsure ou de griffure par un animal carnivore (chien, chauve-souris...), il est conseillé de :
- De laver soigneusement ses blessures et/ou plaies au savon de Marseille, puis de rincer abondamment et d'appliquer une solution antiseptique.
- De consulter sans attendre un médecin, surtout en cas de symptômes typiques d'une encéphalite (modification du comportement, engourdissement d'un membre, paralysie ou des difficultés pour parler). Le médecin vérifiera la mise à jour de la vaccination contre le tétanos (revaccination si besoin) et prescrira de façon quasi systématique une antibiothérapie après morsure.
→ Rechercher l'animal qui a mordu :
► Si l'animal qui a mordu est connu : il doit être mis en observation vétérinaire s'il est identifié. Si l'animal est mort ou s'il est euthanasié, le cadavre est adressé à la Direction des Services Vétérinaires qui décide de l'envoyer pour diagnostic de la rage à un laboratoire agréé pour le diagnostic.
► Si l'animal est inconnu ou si on suspecte la rage ou a fortiori si le diagnostic biologique de rage est positif, la personne mordue doit être confiée à un Centre de Traitement Antirabique qui décidera de l'indication d'un traitement après exposition en fonction des circonstances de l'exposition, des lésions, de l'épidémiologie de la rage.
La rage animale fait l'objet d'une surveillance épidémiologique en France. Il s'agit d'une maladie à déclaration obligatoire. Il existe un vaccin contre la rage, préconisé pour certaines catégories professionnelles (vétérinaires, gardes-chasses, équarrisseurs…) et recommandé chez le voyageur se rendant en zone d'endémie.
Sources : Lyssavirus, épidémiologie et neuropathologie, département de santé globale, Hervé Bourrhy, Institut Pasteur / Fiche rage, ministère de la Santé, mise à jour le 6/04/18.