Etude Alpadir et Baclofène : efficace mais pas miraculeux
Le baclofène, ce médicament contre l'alcoolisme contesté, réduit la consommation d'alcool chez les patients dépendants, sans effet secondaire majeur, selon une étude qui vient d'être publiée.
Les résultats de l'étude Alpadir, portant sur l'efficacité et la tolérance du baclofène dans la prise en charge des troubles liés à l'usage de l'alcool, ont été présentés vendredi 2 septembre à l'occasion d'un congrès international sur l'alcoolisme qui se tenait à Berlin. Cet essai a été mené sur 320 patients sous la coordination du Pr Michel Reynaud, professeur en addictologie à l'hôpital Paul Brousse et président du fonds Actions Addictions. L'objectif étant d'évaluer l'efficacité de ce médicament à la posologie de 180 mg par jour. Dans cet essai, 158 patients ont pris le baclofène et 162 autres un plabebo.
Pour rappel, le baclofène avait obtenu une autorisation temporaire d'utilisation de 3 ans par l'Agence du médicament en mars 2014. Celle-ci était alors confrontée à une forte croissance des prescriptions illégales (hors AMM) et à une attente des patients et de leurs médecins, alors que ce décontractant musculaire, était utilisé et prescrit de manière détournée depuis années. C'est en 2008, lors de la parution du livre Le dernier verre, que le baclofène avait été médiatisé. Son auteur, Olivier Ameisen, un cardiologue aujourd'hui décédé, y raconte comment l'administration de ce médicament l'avait soigné de son addiction à l'alcool.
Les résultats sont globalement satisfaisants. En ce qui concerne le maintien d'une abstinence totale pendant 20 semaines et secondairement la réduction de la consommation d'alcool, aucune différence significative n'a été observée entre les deux groupes (11,9% d'abstinents sous baclofène, contre 10,5% sous placebo). Le Pr Reynaud souligne dans un communiqué de presse que "l'efficacité du baclofène n'apparaît pas sur le critère de maintien de l'abstinence, vraisemblablement en raison d'un contexte médiatique orientant à la fois médecins investigateurs et patients vers la réduction de la consommation plutôt que vers l'abstinence." En revanche, une réduction importante de la consommation d'alcool a été observée dans les deux groupes, avec une baisse plus importante pour les patients traités par baclofène, et encore plus marquée chez les buveurs à haut risque (plus de 4 verres/jour pour les femmes, plus de 6 pour les hommes). "Des buveurs de 12 verres/jour sont passés à 3 verres avec le baclofène contre 5 avec le placebo", précise le spécialiste à l'AFP. Enfin, une réduction importante du "craving", cette irrésistible envie de boire, a aussi été rapportée parallèlement à la baisse de consommation, avec une différence significative dans le groupe baclofène. Les effets indésirables (somnolence, fatigue, insomnie...) étaient plus fréquents sous baclofène. Mais aucun problème de tolérance majeur n'a été enregistré.
Pour résumer le baclofène n'est pas un "médicament miracle" selon Michel Reynaud, qui estime cependant qu'il apporte "un plus dans l'arsenal thérapeutique" contre l'alcoolo-dépendance. Rappelons que l'alcool est responsable de près de 49 000 décès chaque année et que l'on dispose de peu de solutions pour traiter l'alcoolisme.